04 août 1983 – 04 août 2017. La révolution burkinabè conduite par le capitaine Thomas Sankara a 34 ans aujourd’hui. A l’occasion de cet anniversaire, le Comité international Mémorial Thomas Sankara a organisé une conférence publique, ce jour, au CENASA.
Sous la révolution de burkinabè menée par une poignée d’officiers réunis autour du capitaine Thomas Sankara, le Burkina Faso (ex-Haute-Volta) était un vaste chantier de développement. Le peuple avait pris son destin en main, le bien commun, la justice et la transparence n’étaient pas que des mots. De cette période, beaucoup gardent encore jalousement des souvenirs heureux. Les compagnons d’hier de Thomas Sankara sont aujourd’hui des bibliothèques vivantes qui ont tantôt le sourire aux lèvres tantôt le visage grave lorsqu’ils content les grands moments de la révolution. De ces ex-compagnons l’on retient entre autre le Dr Abdoul Salam Kaboré, président des Comités de défense de la révolution (CDR), ancien ministre de la santé, et le Colonel Bernard Sanou. Ce dernier est le président du Comité international Mémorial Thomas Sankara. Et à l’occasion du 34e anniversaire de la révolution, ce comité a organisé une conférence publique pour parler de la vie et des chantiers de développement entrepris par le capitaine rebelle.
« La révolution d’août 83 était une nécessité »
- Dr Abdoul Salam Kaboré, président des Comités de défense de la révolution (CDR)
A la table des conférenciers, outre le Colonel Bernard Sanou, il y avait Jean Hubert Bazié, ex-compagnon de Thomas Sankara, le Dr Barro Abdoulaye, enseignant à l’Université Ouaga 1 Pr Joseph Ki-Zerbo, et M. Yoda de la Télévision nationale. La conférence avait pour modérateur Jonas Hien, chargé des programmes de l’ONG ORCADE. Comme l’on pouvait s’y attendre, avant le début des interventions, l’hymne national a été entonné et une minute « pleine » de silence observée.
« La révolution du 4 août 83 répondait à une exigence et à une nécessité historique inévitable », a déclaré le Dr Barro Abdoulaye. Selon lui, l’organisme politico-social érigé par tous les régimes antérieurs à la révolution étaient à bout de souffle. L’alternative révolutionnaire était donc la seule issue possible pour « une Haute-Volta affaiblie et humiliée politiquement, économiquement, diplomatiquement et dominée par des régimes décadents ».
- Une vue des participants
Dans son exposé, il a fait étalage des différents chantiers de développement réalisés dans le cadre du programme populaire de développement (PPD). Réduction de l’importation des produits agricoles, réduction de la dette, construction de grands barrages dont celui de Kompienga, du Noumbiel, de Bagré, instauration de l’Effort populaire d’investissement (EPI), construction du chemin de fer, création de la Société nationale burkinabè d’hydrocarbures (SONABHY), campagnes de vaccination commando, lotissement rapide de quartiers et construction de cités (1200 logements, cités AN 2, 3, 4), opérations de reboisement, redynamisation du Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou (FESPACO), etc.
« Je ne suis pas faux activiste politique »
- Le Colonel Bernard Sanou (ici au milieu) ému lors de son allocution
Au regard de toutes ces réalisations qui ne sont pas exhaustives, le Dr Barro tire la conclusion que la période révolutionnaire est l’une des plus fertiles dans le processus de développement du Burkina Faso. Et même si saluer les actions de la révolution « ne signifie pas justifier aveuglement toute les tares de la révolution », l’enseignant affirme sans détours que cette révolution a réussi à introduire un esprit nouveau au sein de la société et du peuple burkinabè. L’homme ne prétend pas être un « faux » activiste politique venu prêcher une quelconque révolution mais croit fermement que contrairement à la période révolutionnaire, « le culte de l’inertie et la peur du nouveau constituent de véritables menaces qui pèsent sur la gouvernance actuelle des Etats ».
De son côté, l’ex-compagnon de Thomas Sankara, Jean Hubert Bazié, a indiqué dans son intervention que sous la révolution, des journaux ont vu le jour. Il s’agit notamment de Sidwaya, l’Intrus, de Kélè massa (le chef de guerre en bambara), etc. Des orchestres avaient également été créés : les colombes de la révolution et les petits chanteurs au poing levé.
Les traces de la révolution existent
- Une vue des conférenciers
Des traces audiovisuelles sur la révolution existent bel et bien pour la jeune génération qui n’a pas connu Thomas Sankara. M. Yoda de la Radiodiffusion télévision du Burkina l’a démontré à travers la présentation d’un film documentaire qui fait un zoom notamment sur les travaux de construction du chemin de fer, l’inauguration du stade du 4 août, la « dé-baptisation » de l’avenue Binger en avenue Nelson Mandela, etc. Même si les médias publics regorgent d’archives sur la révolution, le technicien a toutefois indiqué que l’accès aux contenus demeure difficile et que la RTB n’a pas eu le réflexe de garder des machines témoins pour la lecture des cassettes de l’époque révolutionnaire. L’autre difficulté rencontrée, selon lui, est la rigueur du climat qui menace de dégrader les supports.
« Là, où Thomas Sankara a été tué, c’est là où il faut le faire renaitre, le faire ressusciter »
- Le Colonel Bernard Sanou s’exprime sur le projet mémorial Thomas Sankara
La commémoration de ce 34e anniversaire de la révolution démocratique populaire a été aussi une occasion pour le Colonel Bernard Sanou de parler de nouveau du projet de mémorial pour Thomas Sankara et des raisons qui ont conduit la société civile à se mobiliser derrière ce projet initié en collaboration avec l’Etat burkinabè. « Le président Thomas Sankara n’appartient plus au Burkina Faso. Et si nous ne prenons garde la mémoire de notre Thomas Sankara sera récupérée par d’autres personnes et là, ce sera sa deuxième mort ». Pourquoi avoir choisi le Conseil de l’entente comme site pour abriter le mémorial ? C’est presque les larmes aux yeux que le président du comité a justifié ce choix en paraphrasant Thomas Sankara « Là, où Thomas Sankara a été tué, c’est là où il faut le faire renaitre, le faire ressusciter ».
Rappelons qu’après le lancement du projet le 2 octobre 2016 en présence du l’ex-président ghanéen, John Jerry Rawlings, un concours architectural a été lancé le 10 mai dernier. Mais après le dépouillement, les résultats ont été jugés infructueux par le jury. Et selon le Colonel Bernard Sanou, le concours sera donc relancé à partir du 15 septembre jusqu’au 15 décembre 2017. Et pour ce qui est de la mobilisation de souscription volontaire, le comité compte la lancer le 2 octobre prochain. « Si tout va bien, peut-être que Mariam Sankara sera présente ce jour-là », a laissé entendre son président.
Herman Frédéric Bassolé
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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