Seydou Koné dit « Cercueil », est un ancien footballeur international burkinabè, un défenseur central très rugueux. Il a fait les beaux jours de la JCB, du RCB, de l’USO, etc. Repéré par feu Drissa Traoré dit Saboteur, il a été appelé en sélection en 1992, en 1993 et en 1994. Il a mis fin à sa carrière dans les années 2000. Depuis lors, il s’est converti dans le transport. Les choses n’ont pas été simples et tout s’est compliqué ces derniers mois. Dans cette interview qu’il a bien voulu nous accorder, « Cercueil » lève le voile sur sa carrière, les difficultés qu’il traverse actuellement.
Lefaso.net : En quelle année avez-vous débuté votre carrière ?
Seydou Koné dit « Cercueil » : J’ai commencé ma carrière en première division en 1982 avec le Jeunesse club de Bobo (JCB). Après le JCB, j’ai joué un peu à l’Union sportive de Ouagadougou (USO) entre 1983 et 1984. Après, je suis allé au Racing club de Bobo (RCB). Du Racing club de Bobo, je suis revenu à Ouagadougou pour jouer avec l’USO qui devait participer, cette saison, à la Coupe d’Afrique des clubs champions. J’y ai participé et je n’avais que 19 ans. Après cette compétition, je suis reparti à Bobo, au Racing club de Bobo. Je ne suis pas sorti du Burkina. Toute ma carrière, je l’ai faite au pays. Mais j’ai eu la chance de jouer à l’équipe nationale du Burkina en 1992, 1993 et 1994, avec Idrissa Traoré dit Saboteur. Mon poste de prédilection, c’est défenseur central. Mais à l’équipe nationale, le coach Saboteur me faisait jouer comme demi-défensif.
D’où vient le surnom Cercueil ?
Ce surnom est venu d’un de mes anciens entraîneurs, malien du nom de Bamba. C’est lui qui m’a donné ce nom alors que j’avais environ 12 ans. Pourquoi il m’a donné ce nom ? Parce que je jouais libéro, c’est-à-dire, défenseur central. Mon « stopper », Daouda Traoré, avait été surnommé « assassin ». Le coach dit que si « Assassin » tue, « Cercueil » ramasse. Voilà comment le nom Cercueil est resté. Tout petit, je ne savais pas que ce surnom allait me coller. Après, quand j’ai tenté de nettoyer ça, c’était trop tard. Quand je me battais pour l’interdire, voilà que mon propre père commence à m’appeler « Cercueil ». Donc, j’ai compris que ce n’était plus la peine.
En quelle année avez-vous mis fin à votre carrière ?
J’ai mis fin à ma carrière dans les années 2000. Après la CAN 1996, j’ai joué un peu avec le Rail club du Kadiogo (RCK). Après, j’ai décidé de raccrocher les crampons, car l’âge faisait ses effets, le corps ne répondait plus comme avant.
Êtes-vous satisfait de votre carrière ?
Oui, je suis satisfait de ma carrière. À notre époque, il n’était pas donné à tout le monde de faire ce parcours. J’étais un défenseur très teigneux, qui avait du caractère. J’ai par exemple eu à faire à Abedi Pélé du Ghana, à Abdoulaye Traoré dit Benbady et à Hamed Ouattara de la Côte d’Ivoire. Ce sont des souvenirs inoubliables. Je suis sûr que ces derniers ne m’ont pas oublié non plus. Saboteur m’a appelé en équipe nationale lors d’un match amical Étalons contre les Silures de Bobo où je jouais. Ce match s’est joué à Bobo. J’étais l’attraction. Après le match, Saboteur a dit qu’on ne pouvait pas laisser un tel défenseur à Bobo. Voilà comment j’ai intégré le groupe de Saboteur. Donc, je suis satisfait de ma carrière.
Est-ce que, du côté financier, on s’occupait bien de vous à l’époque ?
À notre époque, il n’était pas question d’argent mais de passion. C’était un peu compliqué du côté financier. À l’équipe nationale, par exemple, nous, on gagnait 15 000 francs CFA par semaine. Et ça même, c’est Saboteur qui a œuvré pour que l’on revoie à la hausse ce que l’on gagnait. Avant, c’était moins que cela. Pour avoir joué un match international, les primes tournaient entre 700 000 et 800 000 francs CFA. Donc, financièrement, ce n’était pas trop ça.

Dans quelles activités vous êtes-vous reconverti depuis que vous avez raccroché les crampons ?
Quand j’ai raccroché les crampons, c’était difficile pour moi de joindre les deux bouts. Je n’avais pas de boulot. J’avais une moto P50 que j’ai vendue pour essayer de me lancer dans une activité. Mais ce n’est pas allé loin. J’étais là et je tournais. Après, je me suis lancé dans la vente de friperie. Donc, je prenais des habits chez un jeune, je tournais à pied pour vendre.
Un jour, un propriétaire d’un magasin m’a rencontré, il était stupéfait. Il m’a demandé ce que j’étais devenu après le football. J’ai répondu que je ne faisais rien. Voilà comment, le jeune m’a dit : « Si tu ne fais rien, viens. Comme tu es connu, viens, on va faire des affaires ensemble ». Il m’a donné d’abord quelques cravates, que je me promenais pour vendre. J’ai commencé avec ça et ça marchait bien. Donc, j’ai continué jusqu’à ce que je fasse un peu d’économie pour monter une petite société. Je proposais mes services dans l’administration publique et autres.
Dieu merci, j’ai eu quelques marchés. C’est dans ça j’ai pu m’acheter un terrain, et j’ai pu construire. Après, je suis rentré dans le transport, qui est devenu ma base. J’ai réussi à acheter une remorque, DAF en 2020. Je faisais le transport de marchandises entre Abidjan-Ouaga, Ouaga-Ghana, etc. Jusque-là, ça s’est bien passé, jusqu’à ce mois de mars où j’ai eu un contrat de livraison de vivres de l’État à Pensa, un village à 45 km, derrière Barsalogho. J’ai chargé les vivres le 29 décembre 2024, je suis allé garer à Kaya pendant plusieurs mois avant de démarrer en mars 2025, pour Pensa en convoi. Finalement, ça s’est très mal passé. Avant d’arriver à Pensa, j’ai eu une panne. Les militaires m’ont dépanné. Je suis arrivé, j’ai déchargé les vivres. Au retour, mon camion a eu encore des soucis et, comme c’est une zone rouge, il n’y a pas de mécanicien.
Les mêmes militaires m’ont tracté. À 10 km de Barsalogho, le véhicule qui me tractait est monté sur une mine. Les camions, les cabines, tout est resté là-bas. Tout ce que Dieu fait est bon. Ce qui devait arriver est arrivé. Les militaires ont déjà fait beaucoup pour moi. Je ne demande rien, car c’est mon pays avant tout. La seule chose que je demande, c’est de l’aide pour tirer le reste du camion pour le laisser à Barsalogho ; moi, j’allais faire ce que je peux pour ramener le reste à Ouagadougou. Ce sont des angoisses, parce que le camion, c’est toute ma vie. Je n’ai plus d’activité. Je suis en train de courir de gauche à droite pour faire venir le reste.
Quels conseils donnez-vous à vos jeunes frères qui désirent être des footballeurs ?
Le seul conseil que je peux donner à mes jeunes frères, c’est de travailler. Seul le travail paye. Si tu es fainéant, tu ne peux pas aller de l’avant. C’est impossible. Parce qu’aujourd’hui, être un footballeur professionnel, on sait tous ce qu’on y gagne. Donc, j’encourage mes jeunes frères à travailler. C’est la seule clé qui mène au succès.
Comment trouvez-vous le groupe actuel des Étalons ?
Je trouve que le groupe est équilibré avec des individualités. C’est très bien. Le coach Brama Traoré, qui est un grand frère à moi, fait du bon boulot. Il est très travailleur, lui et moi on a joué au JCB ensemble. Après, il est allé au RCB. Au moment où je venais au RCB, il avait déjà arrêté suite à une blessure. Il a tous mes encouragements parce qu’il est en train de faire un très bon travail. Que Dieu le bénisse, que Dieu fasse qu’il arrive à qualifier les Étalons à la Coupe du monde. Cette équipe est en mesure aujourd’hui de nous ramener la Coupe d’Afrique.
Interview réalisée par Obissa Juste Mien
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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