Des acteurs du monde de la recherche ont, une fois de plus, rassuré les populations burkinabè qu’il n’y a pas de lien de causalité entre le lâcher de moustiques du projet Target malaria et la maladie de la dengue. Selon eux, il est inadmissible de penser ou de croire que le gouvernement ou les scientifiques peuvent autoriser une recherche qui met en danger la santé des populations. C’est pourquoi ils invitent les populations à faire confiance aux chercheurs burkinabè ainsi qu’au projet Target malaria qui présente « un intérêt scientifique » pour le Burkina Faso.

Lors de sa visite à l’Institut de recherche en sciences de la santé (IRSS) de Bobo-Dioulasso, l’Académie nationale des sciences, des arts et des lettres du Burkina Faso (ANSAL BF) a appelé les Burkinabè à soutenir le projet Target malaria. Selon les membres de l’académie, ce projet a un intérêt scientifique pour le Burkina Faso. Du Pr Robert Guiguemdé (membre de l’académie) au Dr Paco Sérémé (président de l’académie), tous ont reconnu le bien-fondé de ce projet dit « innovant ». Le Dr Sérémé a d’abord rassuré que « toutes les activités menées dans le cadre de ce projet sont purement scientifiques ».

« Nous avons vu ici un excellent travail qui est abattu dans les laboratoires et la méthodologie derrière cette approche pour réduire le nombre de moustiques qui transmettent le paludisme dans notre pays. Nous sommes émerveillés par ce que nous avons vu et nous félicitons les acteurs du projet pour tout le travail mené sur le terrain. Le rôle de l’académie c’est de promouvoir l’excellence scientifique. Donc pour nous qui sommes ici, nous avons vu ce qui est utilisé ici en termes d’approche méthodologique, cela nous a vraiment convaincu de l’excellence du travail qui est fait ici. Donc nous repartons très satisfaits par rapport à l’objectif qu’on avait en venant ici », s’est-il réjoui.

Au niveau de l’amalgame qui est fait entre le lâcher de moustiques du projet et la maladie de la dengue, le président de l’académie a suggéré aux acteurs du projet d’intensifier la communication ou encore de changer la stratégie de communication pour avoir l’adhésion des populations car il estime que le projet mérite l’accompagnement de tout le monde. « C’est vrai que nous nous sommes dans le domaine de la science et nous comprenons. Mais il y a toujours des gens qui ne comprennent pas le projet. Donc il faut qu’on continue de communiquer avec les détracteurs pour les amener à comprendre le bien-fondé de ce projet pour eux-mêmes et pour le Burkina », a suggéré Dr Paco Sérémé.

Le Dr Sérémé a d’abord rassuré que « toutes les activités menées dans le cadre de ce projet sont purement scientifiques »

Avant de poursuivre : « Si on arrive à rassurer la population sur tous les aspects, je pense que ce projet a toutes les chances de réussir pour notre pays. C’est un projet qui a un grand potentiel pour notre pays donc il n’y a pas de raison pour décourager ceux qui font ce travail car ils le font pour l’amour qu’ils ont pour leur pays ».

Le paludisme et la dengue sont deux maladies différentes

Pour le Pr Robert Guiguemdé, membre de l’académie, il n’y a pas de lien de causalité entre le projet Target malaria et la dengue qui est observée depuis quelques temps. « Et cela est scientifiquement prouvé », a-t-il souligné. Il a expliqué que le paludisme et la dengue sont deux maladies différentes parce qu’elles sont dues à des agents totalement différents. « L’agent du paludisme est un parasite et celui de la dengue est un virus. Les virus et les parasites sont complètement différents. Les vecteurs des deux maladies sont différents également. Pour le paludisme c’est l’anophèle et pour la dengue c’est l’aèdes. Et ces deux moustiques sont différents sur le plan morphologique, génétique, comportement vectoriel. Et c’est une vérité scientifique universelle que les mâles ne transmettent pas le paludisme. Seules les femelles transmettent le paludisme », a expliqué Pr Robert Guiguemdé.

Et d’ajouter : « Dans cette recherche sur le mâle qui est modifié, déjà que le mâle non modifié ne transmet pas le paludisme, donc il ne va pas piquer l’homme pour lui transmettre le paludisme et encore moins la dengue. Donc cette peur ne se comprend pas parce que les chercheurs travaillent sur des mâles qui ne piquent pas l’homme, qui ne peuvent pas transmettre le virus de la dengue. Même modifié, l’anophèle ne transmet pas le virus de la dengue ». Donc pour lui, il n’y a pas de raison à faire la confusion entre ces deux maladies.

Pour le Pr Robert Guiguemdé, membre de l’académie, il n’y a pas de lien de causalité entre le projet Target malaria et la dengue qui est observée depuis quelques temps

Pour lui, c’est une confusion monstrueuse lorsqu’on parle de palu-dengue dû au fait que les deux maladies ont comme manifestation la fièvre ». « Il faut savoir que ce n’est pas seulement dans le paludisme ou la dengue qu’on fait la fièvre. Il y a des maladies comme la rougeole ou la méningite où il y a la fièvre. Donc on ne peut pas se baser sur la fièvre pour parler de palu-dengue. Donc il n’y a pas de palu-dengue. Il y a le paludisme et il y a la dengue. Deux maladies différentes qui se ressemblent mais il faut faire la part des choses parce que les manifestations ne sont pas toujours les mêmes et les traitements ne sont pas les mêmes stratégies », a-t-il rappelé.

À l’en croire, le Burkina est en phase avec trois autres sites qui ont le même protocole de recherche dans le cadre du projet Target malaria. « Ce n’est pas au Burkina seulement que ce travail est mené. Il est fait également dans d’autres pays, avec la compréhension et l’autorisation des plus hautes autorités scientifiques internationales. Donc s’il y avait un problème cela aurait été soulevé », a-t-il dit. Pour lui, les travaux du projet sont menés dans l’intérêt de la santé humaine.

« Les chercheurs veulent améliorer la santé humaine, pourquoi penser qu’ils fassent une recherche pour avoir le résultat contraire. Nous rassurons que cette recherche est soumise à l’avis de plusieurs censeurs. Il y a sur chaque site des agences de sécurité qui vérifient le protocole sur le plan de l’équipe et sur le plan de la sécurité de la santé humaine. Ici au Burkina, nous avons l’agence nationale de la biosécurité qui suit le projet ainsi que le comité d’éthique pour la recherche en santé qui regarde aussi ce projet pour s’assurer qu’il n’y a aucun risque pour les personnes qui sont dans l’aire du projet », a-t-il insisté.

Pour lui, si toutes ces personnes avaient trouvé un risque en ce projet, elles n’auraient pas donné leur autorisation pour son exécution. « Donc il faut que les personnes qui désinforment sachent qu’il y a des gens qui prennent leurs responsabilités, des gens qui ont prêté serment dans le comité d’éthique pour servir l’être humain sans lui causer des dangers, alors on ne peut pas penser que toutes ces autorités politiques et surtout scientifiques autorisent une recherche qui va mettre en danger la santé de la population », a-t-il conclu.

Romuald Dofini

Lefaso.net

Source: LeFaso.net