Le diabète est une maladie en constante progression au Burkina Faso. Véritable problème de santé publique, il constitue de plus en plus un motif de consultation dans les formations sanitaires. Dans cet entretien qu’il nous a accordé, Dr Yempabou Sagna, médecin endocrinologue au CHU Souro Sanou de Bobo-Dioulasso et enseignant à l’INSSA de l’université Nazi Boni revient, entre autres, sur les différents types de diabète, les principales causes de cette maladie et prodigue des conseils pour l’éviter. Lisez plutôt !

Lefaso.net : Peut-on avoir une idée de l’ampleur du diabète au Burkina ?

Dr Sagna : Le diabète sucré est un ensemble de maladies qui ont en commun une augmentation chronique de la glycémie (taux de glucose ou de sucre dans le sang). Au Burkina Faso, 7,6% des adultes de plus de 20 ans souffrent de diabète, selon les données de la dernière enquête STEPS OMS conduite par le ministère de la Santé et de l’hygiène publique en 2021. On dit que le diabète sucré est un ensemble de maladies car il en existe quatre types. Il y a le diabète de type 2 qui est le plus fréquent partout dans le monde (90% des cas de diabète) et qui touche surtout les personnes âgées de plus de 40 ans ; le diabète de type 1 qui touche les moins de 35 ans mais plus fréquemment les enfants et adolescents. Au Burkina Faso, nous recensons environ 400 enfants et adolescents qui sont suivis pour un diabète de type 1. J’ouvre une parenthèse pour dire que ces jeunes bénéficient gratuitement du traitement par insuline dans la plupart des services de médecine interne au Burkina jusqu’à l’âge de 30 ans. Nous avons aussi le diabète gestationnel. C’est quand on découvre un diabète chez une femme enceinte alors qu’elle ne savait pas qu’elle a un diabète. Au Burkina Faso et selon les études du Pr Joseph Drabo et du Pr Macaire Ouédraogo, 9,1% des femmes enceintes sont concernées. Le dernier type de diabète est beaucoup plus rare et relève du spécialiste.

Quelles sont les causes principales ?

Avant de parler de causes il faut rappeler que les glucides (sucre) sont la principale source d’énergie du corps humain, on en a besoin pour vivre. On retrouve ces glucides dans notre alimentation de base (mil, maïs, riz, fonio, pâtes alimentaires, lait, fruits…). Quand on mange ces repas, ils se retrouvent dans le sang sous forme de sucre qui est utilisé essentiellement par nos muscles et notre cerveau puis l’excès est stocké dans le foie et les graisses. Mais pour que ces organes utilisent ce sucre il faut l’aide du pancréas qui est un organe du ventre qui fabrique une substance appelée insuline. C’est cette insuline qui aide les organes à utiliser le sucre et quand il y a trop de sucre ça stocke le surplus dans le foie et les graisses pour maintenir la glycémie (taux de glucose ou de sucre dans le sang) normale.

Le diabète sucré est un ensemble de maladies qui ont en commun une augmentation chronique de la glycémie et cette augmentation est due soit au fait que le pancréas dont on a parlé ne fabrique plus suffisamment d’insuline, soit parce que l’insuline sécrétée n’arrive pas à agir, ou encore les deux mécanismes ensemble. Dans le diabète de type 2 le facteur principal est que l’insuline sécrétée n’arrive pas à bien agir. Plusieurs causes sont possibles mais la principale est l’obésité surtout abdominale (le gros ventre) qui est responsable de la moitié des cas de ce type de diabète. Dans le diabète de type 1, le pancréas n’est plus capable de fabriquer l’insuline. Dans le diabète gestationnel, ce sont les hormones de la femme qui font que l’insuline n’arrive plus à bien agir. Cela arrive fréquemment chez les femmes qui sont déjà en surpoids ou obèses.

Peut-on éviter le diabète ?

Le diabète de type 2 est celui qui peut être évité en luttant surtout contre le gros ventre. Pour le diabète de type 1, des études sont toujours en cours.

Quelles sont les principaux conseils que vous pouvez donner dans ce sens ?

Pour lutter contre le diabète de type 2 il faut pratiquer régulièrement au moins 30 min de sport par jour ; ne pas rester assis plus de 7 heures au total par jour, que ce soit d’affilée ou non. Ne pas manger ni trop gras, ni trop sucré ni trop salé : manger trois repas par jour et si possible à heures régulières, ne pas faire des fast-foods une habitude (hamburger et autres burgers, chawarma, kebab, glaces…), éviter de grignoter, éviter l’alcool et les boissons sucrées en dehors des fêtes, manger au moins cinq portions de fruits et légumes par jour, boire suffisamment d’eau. Faire contrôler sa glycémie et sa tension artérielle au moins une fois tous les ans ou tous les deux ans dès qu’on atteint l’âge de 40 ans. Les services de santé sont habilités à donner des conseils pour la prévention et les soins du diabète y compris pour la diététique et l’activité physique pour la santé.

En matière de régime alimentaire particulièrement, que faudrait-il faire ?

Cela dépend de son poids. Pour ceux qui sont de poids normal, ils gardent un régime normal. Ceux qui sont en surpoids ou obèses devraient fournir un effort pour surtout éviter les excès dont on a parlé plus haut et réduire les quantités si l’évaluation nutritionnelle en trouve la nécessité. Il faut fixer un objectif de poids et tendre progressivement vers ce poids. Nous déconseillons les régimes trop restrictifs car ce sont des régimes qui, non seulement sont sources de carences nutritionnelles, mais aussi ceux qui les essayent ne peuvent pas les maintenir sur le long terme et quand ils arrêtent ils reprennent plus de poids que ce qui est perdu.

Il ne faut pas perdre brutalement le poids, il faut perdre environ 10% du poids en un an. Par exemple quelqu’un qui a 100kg aujourd’hui, il devrait être autour 95 kg dans six mois, puis 90kg dans un an avec le régime et ainsi de suite, c’est de cette façon qu’on ne reprend pas du poids. Mais beaucoup veulent passer de 100 à 90kg en quelques mois par le régime et après ils se retrouvent à 105 ou 110 kg. Dans tous les cas, ce régime doit être équilibré.

Comment peut-on définir le régime alimentaire qui nous convient ?

Le régime alimentaire qui nous convient est celui qu’on peut maintenir sur le long terme ou, idéalement, toute sa vie en fonction de nos moyens, de nos habitudes alimentaires et de ce qu’on a à disposition comme aliments. Il doit être équilibré. Un plat équilibré est un plat dont la moitié est constituée de glucides (to, riz, pâtes alimentaires, fonio, couscous, igname, pomme de terre…), le quart constitué de légumes (salades, concombre, feuilles, haricot vert…) et le dernier quart des protéines (viande non grasse, poisson, haricot blanc, œuf… du lait ou fromage et une tranche de fruit).

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Source: LeFaso.net