Comme promis à la clôture de la première édition, le Centre national d’études stratégiques-Burkina Faso (CNES-BF) tient, les 27 et 28 juin 2024 à Ouagadougou, la deuxième édition du forum de la recherche stratégique. Les participants à la première édition, tenue en juillet 2023, ont, au regard du succès et surtout des enjeux des questions que le CNES-BF a à son programme, recommandé l’institutionnalisation du forum. Pari tenu donc, avec l’assise effective de la deuxième édition (27-28 juin), sous le thème « La politique étrangère des Etats d’Afrique à l’aune des reconfigurations géopolitiques ».

Cette édition, placée sous le très haut patronage du président du Faso, chef de l’Etat, le capitaine Ibrahim Traoré, et la présidence du ministre des Affaires étrangères, de la Coopération régionales et des Burkinabè de l’Extérieur, Karamoko Jean-Marie Traoré, réunie également plusieurs compétences et spécialistes venus de plusieurs pays.

« Les changements opérés à la tête des États comme le Burkina Faso, le Niger et le Mali, consécutifs entre autres à la persistance des attaques terroristes dans la bande sahélo-saharienne, le départ des troupes étrangères de ces trois pays, suite aux dénonciations des accords de coopération militaire avec certains partenaires, la création de l’Alliance des États du Sahel ainsi que la décision de retrait de ces trois pays de la CEDEAO, constituent des faits majeurs qui illustrent éloquemment le changement du contexte géopolitique et géostratégique ouest-africain », a, entre autres, présenté à l’ouverture du forum, le ministre délégué en charge de la coopération régionale, Stella Eldine Kabré, représentant le ministre en charge des Affaires étrangères.

Ce forum s’inscrit dans le cadre du développement du programme « Synergie et capitalisation de la recherche » du Centre national d’études stratégiques-Burkina Faso (CNES-BF). « Ce programme est, faut-il le rappeler, au cœur de sa mission (du CNES-BF), en ce sens qu’il ambitionne de fédérer et féconder la réflexion sur les thématiques les plus pointues de la recherche stratégique, celles liées aux missions régaliennes de l’Etat, aux équilibres stratégiques nationaux et régionaux, à la sécurité humaine, à la sécurité nationale des Etats, à la paix et la sécurité internationales », a, à l’ouverture, situé le directeur général du CNES-BF, le général Barthélémy Simporé.

Le directeur général du CNES-BF, le général Barthélémy Simporé

L’ancien ministre de la défense nationale a ainsi expliqué que l’institutionnalisation du forum de la recherche stratégique est l’authentique traduction de cette ambition, en ce sens qu’il vise à offrir un espace de rencontre entre chercheurs, experts, praticiens et professionnels nationaux et africains des questions stratégiques pour discuter sur des thématiques contextuelles liées aux défis du moment et formuler des recommandations à l’endroit des décideurs politiques.

Le général a également expliqué que c’est fort des conclusions des panels de la première édition, que le comité scientifique du forum a jugé pertinent de retenir le thème de la présente édition « La politique étrangère des Etats d’Afrique à l’aune des reconfigurations géopolitiques ». Pour Barthélémy Simporé, ce sujet de réflexion, d’une grande densité thématique et d’une actualité brûlante, permet de prolonger les réflexions de l’année dernière sur ce que le monde est en train de vivre en ce moment, en termes de bouleversements géopolitiques.

« L’actualité de ces dernières années nous donne d’observer en effet qu’au Sahel, le terrorisme que je qualifierais avec juste raison, d’objet géopolitique non clairement identifié, a profondément bouleversé la donne stratégique de l’Afrique, modifié la sociologie et le jeu politique internes des Etats, tout en faisant écho aux rivalités géostratégiques des puissances globales mondiales. De même, un peu partout sur la scène internationale nous assistons à une monté des tensions diplomatiques, à l’émergence de blocs alternatifs de puissance, au réarmement généralisé, à une reconfiguration de l’ordre international, et surtout au retour des nationalismes et de la guerre avec comme corolaires, des défis de plus en complexes à détricoter ! Ce ressac des nationalismes et de la guerre de haute intensité interroge autant qu’il inquiète, car la paix et sécurité internationales ont rarement atteint un tel niveau de sensibilité à la lisière des grandes tragédies qui ont déchiré l’humanité au siècle dernier. Mais s’il est vrai que la guerre n’a certainement point changé de visage, il importe de remarquer qu’elle a intégré de nouveaux acteurs nationaux et transnationaux hybrides déstabilisateurs. C’est la guerre dite de 4ème génération, celle qui prolonge les dimensions de la conflictualité sur des registres immatériels plus complexes, ceux de la communication et du cyberespace difficiles à maitriser ! Ce contexte de bouleversements des relations internationales qui souligne toute la profondeur et la pertinence du thème de ce forum, justifie également et assurément, l’intérêt de cette illustre audience ici présente, composée d’éminentes personnalités du monde de la recherche et de la pratique diplomatique », s’est attardé le premier responsable du CNES-BF, Barthélémy Simporé.

De la g.vers la d. : Le président du Conseil d’administration du CNES-BF, le ministre en charge de la défense, le ministre délégué en charge de la coopération, Pr Augustin Loada (du comité scientifique) et le directeur général du CNES-BF

Projecteurs sur les thèmes de ces 48 heures de réflexion

Cette édition du forum est couplée au Grand Prix de la recherche stratégique, qui vise à primer annuellement les meilleures productions scientifiques en catégories senior et junior, sur des thématiques stratégiques contextuelles. La proclamation des lauréats interviendra à la clôture du forum, demain, vendredi, 28 juin 2024.

En attendant, ces 48 heures seront marquées par des communications assurées par des spécialistes venus de plusieurs pays d’Afrique et d’ailleurs. Ainsi, outre la communication inaugurale qui a été assurée à l’ouverture par le Camerounais, Pr Yves Mandjem, sur le thème central sus-cité, ce deuxième forum verra au premier panel (il porte sur la sécurité régionale), des communications sur “Sécurité intérieure et politique étrangère du Burkina Faso : dynamique et dialectique de deux secteurs d’action publique à l’aune des défis sécuritaires hybrides” (thème légèrement modifié) et “La problématique des questions sécuritaires en Afrique centrale : dynamique pour une approche collective”, respectivement traitées par Moussa Thiombiano de la Police nationale (Burkina) et Anne Ines Alem M’Fula de l’Université Yaoundé II (Cameroun).

Le deuxième panel, qui porte sur la fabrique de la politique étrangère, est articulé autour de “Para-diplomatie et nouvel agenda sécuritaire en Afrique : enjeux, acteurs et pratiques de la coopération transfrontalière” et “La politique étrangère du Burkina face à la crise sécuritaire : entre changement de paradigmes et réorientation de la coopération étrangère”, assurés par Dr Aimé Raoul Sumo Tayo de l’Université de Liège (Belgique) et Dr Firmin Nana du Centre national de recherche scientifique et technologique (Burkina).

Pr Yves Mandjem, orateur de la communication inaugurale

Le panel III qui porte sur les stratégies d’adaptation des États et des sociétés africaines se décline en des communications sur “Crises climatiques et déplacements de populations en Afrique subsaharienne : entre absence de politique étatique et action internationale”, “La politique juridique extérieure des États de l’AES” et “ Le vigilantisme transnational : coopération transnationale entre comités de vigilance dans la lutte contre Boko Haram (Cameroun-Nigéria)”, respectivement analysées par Dr N’Dèye Astou N’Diaye de l’Université Cheick Anta Diop (Sénégal), Pr Médard Kiénou de l’Université Nazi Boni (Burkina) et Yvan Hyannick Obah de l’Institut catholique de Yaoundé (Cameroun).

Le quatrième panel qui fait focus sur les organisations régionales africaines comporte deux communications qui seront données par Nelson David Compaoré du CNES-BF sur “Le G5 Sahel à l’épreuve des mutations géopolitiques régionales : épilogue d’une crise de légitimité” et Dr Abdoul Sogodogo de la Faculté des sciences administratives et politiques de Bamako (Mali) sur “L’Alliance des États du Sahel : entre fédéralisme et confédération, enjeux de survie et de développement”.

Le panel V, qui porte sur les stratégies des puissances extra-africaines concernant l’Afrique et le Sahel, se scinde en “Les dynamiques de repositionnement des puissances étrangères en Afrique et les perspectives de redéploiement des États africains à l’aune de la globalisation : socio-analyse des cas français, russe et chinois” qui sera examiné par Christophe Essomba de l’Université de Yaoundé II (Cameroun) et “Les stratégies des puissances extra-africaines concernant l’Afrique et le Sahel” avec pour communicant, Franck Ebogo du Centre de recherches, d’études politiques et stratégiques (Cameroun).

Cette édition comporte également un « panel de haut niveau », qui se veut de « grands témoins de la diplomatie », avec pour intervenants, Mamane Sambo Sidikou (Niger, ancien Secrétaire permanent du G5 Sahel) ; Mélégué Maurice Traoré (Burkina, ancien ambassadeur, ancien ministre, ancien Président de l’Assemblée nationale) et Hawa Aw (Mali, Secrétaire exécutive de l’Autorité pour le développement intégré des Etats du Liptako-Gourma).

Toutes ces communications sont modérées par également des spécialistes, à savoir le constitutionnaliste Pr Augustin Loada (Burkina), Kamissa Camara (Mali, ancien ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale), Paul Robert Tiendrébéogo (Burkina, ancien ministre de l’Intégration africaine et des Burkinabè de l’extérieur), Dr Zakaria Soré (Burkina, sociologue, secrétaire général de la présidence du Faso), Pr Valérie Soma (Burkina, présidente du Conseil exécutif de la Société burkinabè pour le droit international), Pr Vincent Zakané (Burkina, enseignant-chercheur en droit public) et Dr Sampala Balima (Burkina, directrice générale adjointe du CNES-BF).

Oumar L. Ouédraogo

Lefaso.net

Source: LeFaso.net