Devant les locaux du Groupement des compagnies républicaines de sécurité (GCRS) de Ouagadougou, de nombreux éléments de la police nationale ont dénoncé ce mardi 18 avril 2017, le manque de transparence dans la gestion des services privés. Par ce mouvement d’humeur entamé depuis le 15 mars, les hommes exigent désormais la présentation de « contrats authentiques » pour toute prestation entrant dans le cadre des services privés. C’est d’ailleurs la condition posée par ces derniers pour la reprise desdits services.

« On nous dit : vous êtes des jeunes policiers, vous ne pouvez rien changer dans la police, vous êtes venus trouver ça comme ça, vous allez partir laisser ça comme ça » a déclaré un agent CRS, qui campe devant le Groupement des compagnies républicaines de sécurité (GCRS) depuis 4 heures du matin.

Pourtant, pour ce dernier qui a souhaité garder l’anonymat et ses frères d’arme, les choses doivent changer. « On demande seulement des contrats authentiques pour les services privés (…) On ne demande pas une augmentation de salaire, on n’a jamais demandé ça ; c’est ce qui nous revient de droit que nous réclamons. On ne peut pas travailler et c’est une autre personne qui va émarger à notre place » a poursuivi notre interlocuteur. Ainsi, en attendant une transparence dans la gestion des services privés, les agents de la police exigent le départ de leur directeur général et du directeur des unités d’intervention.

Et si dès l’entame du mouvement, le ministre de la Sécurité a échangé avec les agents au sujet de leurs revendications, ces derniers regrettent qu’il n’y ait plus eu de suite. « Le 15 mars, le ministre est venu nous rencontrer ici à 5 h du matin, il nous avait promis un retour, mais nous n’avons jamais eu de résultats. Il nous a accordé une audience à domicile le jour de la fête de pâques, mais il n’y a rien de concret ».

Où sont passés les 15 millions de la mission d’escorte ?

Les frais de mission perçus dans le cadre des services privés indignent les agents du GCRS. Prenant l’exemple d’une mission d’escorte de sécurisation d’un site minier, situé à une soixantaine de kilomètres de Fada N’gourma, un élément CRS confie : « Vous quittez ici à 4 heures du matin (…), vous revenez à Ouaga aux environs de 22 heures et vous recevez la somme de 2500 francs CFA comme prise en charge » a-t-il déploré. Et un autre d’ajouter à ce sujet : « Quand on a rencontré le ministre de la Sécurité, il nous a fait savoir que les frais de mission s’élevaient à 10 000 francs CFA. Nous avons demandé à savoir qui prenait les 7500 francs, il nous a dit qu’il ne sait pas », a noté l’agent CRS qui semble jouer le rôle de porte-parole du groupe, soulignant ceci : « Cette mission a débuté en fin 2014, cela fait 3 ans, où sont passés les 15 millions ».

Quid de la somme 400 000 francs… ?

Des exemples où les policiers se sentent lésés dans leurs droits, il n’en manque pas. Dans le cadre d’une prestation offerte à une église, un agent CRS confie : « Il arrive que le pasteur nous dise, la sécurité, vous avez bien travaillé, il nous donne 400 000 francs. Chez nous, si on nous donne cette somme, on est obligé de rendre compte à la hiérarchie qui elle, empoche l’argent » a-t-il dit. Puis de renchérir : « Pourtant, tout a été géré (…) on se retrouve avec 1500 francs. Ce qu’on nous donne comme pourboire, ils prennent ça, si tu réclame (…) ils ont affecté des gens pour ça » a-t-il regretté.

Des prestations gratuites ?

A en croire ces agents de la police, certains frais de mission sont payés des mois, voire une année après. C’est le cas de la mine d’or de Kalsaka pour laquelle les agents soutiennent : « Vous allez effectuer une mission pour vous retrouver avec 50 000 francs CFA une année après, après avoir fait 15 jours en brousse ».

Et un autre agent GCRS de souligner qu’il existe des prestations gratuites offertes aux particuliers : « Pour un travail de 18 h à 5 h du matin pour Ludic Lydia, c’est gratuit ; on donne 2000 francs aux éléments. C’est le patron de Ludic Lydia qui voit que les éléments travaillent bien, il leur donne 2500 ou 2000 francs pour leur café ». Et le porte-parole de poursuivre : « Pour le collège Horizon international et l’hôtel Palm Beach, c’est zéro franc. A Royal Beach, ils nous doivent 24 millions. On ne peut pas comprendre, on nous paye à crédit » a-t-il lancé, consterné.

Les agents de la police soutiennent que les services privés ne seront plus assurés tant qu’ils n’auront pas gain de cause. Toutefois, disent-ils : « Ce n’est pas une grève, on n’a jamais grevé, on exprime notre mécontentement. On travaille toujours. Le mouvement concerne uniquement les services privés ». Du côté de la direction générale de la police, on nous informe que le dossier est géré par le ministre de la Sécurité et que « Ce sera difficile pour le DG de se prononcer ».

Nicole Ouédraogo

Lefaso.net

Source: LeFaso.net