Originaire du Burundi, il se définit comme étant « profondément africain ». Ecrivain, journaliste, ancien fonctionnaire international, David Gkunzi, dirige le Paris Global Forum (institution indépendante favorisant les échanges culturels et économiques entre l’Afrique et le reste du monde). Fasciné par le pays des hommes intègres, il y met les pieds pour la première fois en février 1987 à l’occasion du FESPACO (Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou). Revenu fin septembre de la même année lors de la conférence anti apartheid, il témoigne d’un attachement particulier au père de la révolution burkinabè, Thomas Sankara. Grand voyageur, il a visité plus de 35 pays africains mais le Burkina Faso reste l’un des pays auxquels il est « sentimentalement attaché ». D’ailleurs il ne manque pas d’éloges à l’égard de ce peuple qu’il qualifie de « peuple d’une grande richesse humaine », « très attachant ». Présent à Ouagadougou dans le cadre du lancement du projet de mémorial Thomas Sankara, ce panafricaniste né, dans un entretien qu’il nous a accordé le 4 octobre 2016, parle du Président Thomas Sankara, de son pragmatisme. Il n’occulte pas la situation qui prévaut dans son pays d’origine, suite à la volonté du Président Pierre Nkurunziza de rester au pouvoir. Nous vous proposons cet entretien en deux phases.
Lefaso.net : A quand remonte votre dernière visite au Burkina Faso ?
David Gakunzi : Je ne suis plus revenu au Burkina Faso depuis 1987. Depuis l’assassinat de Thomas Sankara. Il a marqué la génération d’un certain nombre d’entre nous. Les gens ne se rendent pas compte de cela.
Que recherchiez-vous en venant au pays des hommes intègres à l’époque ?
Mais quand on venait au Burkina Faso dans ces années-là, on venait rechercher de l’espérance. Nous sommes dans les années 80 où partout en Afrique il y a des pouvoirs marqués par la corruption, les parties uniques. Ou bien des dictatures partout, où il y a les politiques d’ajustements structurels, où l’Afrique semble un continent sans présent ni avenir. Et puis quelque part là, dans le sahel, tout d’un coup, apparut ce personnage de Sankara qui dit ce que la plupart des africains portent au fond de leurs entrailles, la souffrance et l’espoir d’une autre Afrique. Surtout qui va au-delà de la parole, qui pose des actes simples et concrets et qui portent la dignité de toute une génération. Et qui sait exprimer les choses d’une manière simple et droite. Et tout le monde vient vers le Burkina Faso, tout le monde se tourne vers le Burkina Faso.
Il nous montre que la pauvreté, la misère n’est pas une fatalité. Que nous devons retrouver notre dignité en tant qu’africain. Que nous pouvons écrire notre développement par nous-mêmes. Il redonne vraiment de l’espérance à toute une génération. Et on venait à cette époque-là au Burkina Faso, comme certains vont presqu’à la Mecque. Le Burkina avait une force d’attraction incroyable. Dans les avions quand on venait ici, on retrouvait des africains de partout, des militants de l’ANC (African national congress), des opposants politiques, des gens de la société civile, des journalistes, des artistes, des écrivains, des blancs, des européens. C’était devenu presque la Mecque de gens qui rêvent d’améliorer notre monde.
Et qu’est-ce qui a changé ?
Tout d’un coup il y a le 15 octobre (1987) et le choc. L’espoir qui tout d’un coup, du jour au lendemain est assassiné. En assassinant Sankara, on assassine cette espérance d’une autre Afrique, d’une Afrique qui était en train de se relever. On nous renvoie comme à notre fatalité presque de malédiction. Pire, il y a un acte qui est tragique dans tout cela. C’est un acte fratricide. Alors que vous savez qu’en tant qu’africain, nous chantons souvent la fraternité. C’est aussi un choc dans ce qui constitue le fondement de nos propres valeurs, ces valeurs de fraternité. Moi à partir de 1987, je suis vraiment sous le choc.
Qu’avez-vous fait pour préserver la mémoire du père de la révolution du 4 août 1983 ?
J’ai essayé de faire ce que je peux le mieux pour sauver la mémoire de Sankara. A l’époque j’étais presqu’un gamin. Je le fais avec des ainés notamment Sennen Andriamirado, journaliste de Jeune Afrique qui a écrit, « Sankara le rebelle, « Sankara l’immortel » à l’époque, avec un écrivain, un grand intellectuel qui s’appelait Yves Benot, qui était dans le mouvement anti colonial, qui a écrit beaucoup de livres sur l’Afrique. Qui étaient des ainés, moi j’étais presqu’un petit gamin. Avec d’autres après on essaie de préserver la mémoire.
Si vous aimez tant le Burkina, pourquoi avoir mis 29 ans pour y revenir ?
Certains arrivent à revenir au Burkina mais moi je n’y arrive pas. J’ai vraiment du mal parce que j’ai du mal à faire le deuil. On ne sait pas où est le corps, on ne sait pas ce qui s’est passé. On n’a pas d’explications. Ceux qui ont posé cet acte, n’ont même pas le courage de s’expliquer et de demander pardon. Parce qu’on ne sait jamais, on peut au moins avoir ce courage-là de dire voilà ce qui s’est passé, la vérité. On se retrouve avec un meurtre commis et sans aucune explication donc sans une possibilité de faire le deuil et de passer à autre chose. Et puis moi je viens du mouvement anti-apartheid. J’étais très jeune dans le mouvement anti apartheid en France. J’étais très actif dedans. J’étais de ceux qui prônaient le boycott du régime à l’époque.
Pour moi, je me vois mal revenir par exemple au FESPACO 89. Il y a un débat. Il y a certains qui disent, il faut y aller et marquer notre présence là-bas. Il y a d’autres qui disent on ne peut pas y aller. Je suis de ceux qui ne pourront pas venir, sans porter de jugement sur ceux qui sont venus, mais je n’avais pas cette force-là. C’était trop dur pour moi.
Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?
Et puis miracle. Il y a ce changement de fin octobre 2014 qui est comme un miracle. Qui nous redonne de nouveau l’espérance en toute l’Afrique. Qui montre que les africains peuvent dire non, qu’ils ont de la conscience. Une conscience politique ici qui est très forte. Et ils disent non d’une manière très digne, sans violence. C’était l’un des plus beaux jours de ma vie. Je ne bois pas d’alcool, mais ce jour-là j’ai appelé tous mes amis et j’ai bu de l’alcool. J’ai fait une exception. Pas parce que je me réjouissais de la chute du régime, il ne faut jamais se réjouir de la chute de quelqu’un, mais parce que je me disais, il y a de l’espérance de nouveau. Ce pays peut se reconstruire de nouveau. C’est un nouveau départ et c’est comme cela qu’aujourd’hui je suis là.
C’était émouvant pour moi de revenir au Burkina Faso. J’ai retrouvé encore un peuple très conscient. Un peuple avec grande conscience, un peuple avec une culture du débat, qui a une culture politique. Ce qui manque souvent en Afrique. J’ai retrouvé des jeunes impressionnants et ça m’a fait de nouveau chaud au cœur. Quelque part on se dit que Sankara n’est pas mort. Parce que Sankara était comme tous ces jeunes-là.
Comment pouvez-vous définir Sankara ?
C’était quelqu’un qui voulais quoi ? On cherche souvent trop de complications à expliquer Sankara. Sankara c’est simple, c’est quelqu’un qui voulait améliorer le quotidien des gens. C’était quelqu’un qui voulait que nos mamans aillent mieux. Que nos enfants aillent à l’école. Qu’on puisse se faire soigner. Que les gamins puissent avoir trois repas par jour. Qu’on puisse être respecté dans le monde. C’était ça, ce n’était pas des choses compliquées que ça. Que la caisse de l’Etat n’est pas la caisse de quelques-uns. Que personne, aucun pouvoir n’est propriétaire d’un pays. Parce que de fois on a l’impression que y a des chefs d’Etat en Afrique qui sont propriétaires de leur pays. C’est pour cela que nos parents se sont battus pour les indépendances, que l’Afrique soit un continent libre, où il fait bon vivre. Et je pense que Sankara a voulu retraduire dans les actes cette aspiration.
Et je pense que c’est le défi qu’il nous laisse à tous. Comment faire pour que nos pays soient de nouveau libres, où il fait bon vivre, où c’est la même loi pour tout le monde. Qu’il n’y ait pas une loi pour les uns et une loi pour les autres. C’est le même droit pour tout le monde. Où on essaie de dialoguer, de négocier de sorte que chacun puisse avancer dans sa vie individuelle que notre vie collective. En sachant que l’arme de tout cela, c’est d’abord la connaissance. Si on est dans l’ignorance, on ne peut pas avancer. On peut être manipulé sur des bases ethniques. Certaines de nos guerres qu’on voit en Afrique, où les jeunes sont manipulés les uns contre les autres pour des politiciens qui ont des ambitions personnelles, pas des ambitions nationales ou collectives. Combattre l’ignorance. Et quelque part, Sankara aussi, c’est un éducateur.
Parlant d’éducation, je crois que c’est le combat le plus important du mémorial. Permettre l’accès à la culture pour les jeunes, la culture pour les TIC, la culture politique mais aussi tout simplement comprendre le monde dans lequel on vit. D’où nous venons en tant que société et comment on peut essayer de faire pour faire avancer les choses. Parce que si on veut transformer une société, il faut connaitre le réel, le monde dans lequel on vit. Et aussi savoir comment construire des alliances. Parce qu’il n’y a pas de changement si on ne sait pas construire des alliances. La politique c’est des alliances. Et puis savoir faire la part des choses entre le rêve et la traduction dans les faits du rêve. Soit on peut rester dans le rêve, il est beau et bien. Mais on ne le met pas en action. Ou alors on essaie de traduire le rêve dans la réalité. Et ça, il faut parfois avoir des compromis. Voilà je suis revenu ici, je suis très heureux d’être revenu dans ce pays et je vais revenir très souvent.
Sankara était un espoir pour l’Afrique mais un danger pour les autres ?
Absolument. Comme on l’a vu avec Kwamé Nkrumah, Amilcal Cabral et dans une certaine mesure Julius Nyéréré. Quand il y a des gens qui veulent changer des choses, il y a des gens qui veulent garder le statu quo. Que ça soit au niveau national, ou au niveau international, tu heurtes des intérêts quand tu veux changer, transformer l’Afrique. Et parfois, le retour de bâton est violent. Je pense que Sankara lui-même, il savait qu’il était dans une course contre la montre. Et que son ambition c’était pas de durer au pouvoir. Son ambition c’était de montrer que les choses sont possibles. C’est pourquoi au moment crucial de la crise, quand certains lui disent de prendre les devants, il dit non. Si je fais cela, je ne suis plus Sankara, je deviens Sekou Touré. Parce que des gens comme Sékou Touré étaient dans une stratégie de durer au pouvoir et finalement, au bout du compte ils ont fait le contraire de ce qu’ils prônaient. Vous savez Sékou Touré avec le camp Boiro, etc.
Sankara refuse cela en disant, moi l’important ce n’est pas le messie. C’est que les gens réalisent que, eux-mêmes peuvent transformer les choses. C’est ça que je veux transmettre aux gens. Avec moi ou sans moi, ils peuvent le faire, si je laisse un exemple positif. Il savait qu’il était une cible dans la ligne de mire, mais chaque jour pour lui était important. Chaque jour de gagné était important et il fallait qu’il montre que les choses sont possibles. Et il n’est pas mort. Parce que, je pense que, comme il le disait lui-même d’une manière prophétique, on ne tue pas les idées. Ou quand il disait, tuez Sankara, il y aura des milliers de Sankara demain. On ne peut pas tuer l’espérance. On ne peut pas tuer l’idée de liberté. L’idée de liberté est innée chez tous les individus. L’idée de chacun d’être respecté est innée chez tout le monde.
Quand on enferme Mandela pendant 27 ans, on ne tue pas pour autant l’idée de libération des noirs en Afrique du Sud. Quand on a tué Lumumba au Congo, le Congo est devenu indépendant même s’il y a eu des drames après. Donc on a essayé de tuer ce personnage là, mais on ne l’a pas atteint. Parce qu’il a su préserver jusqu’au bout son intégrité. S’il était entré dans une compromission par rapport à ses propres valeurs et à son intégrité, là il serait mort physiquement et symboliquement. Mais symboliquement, on n’a pas pu le tuer.
Nous au début, on a essayé de préserver la mémoire dans des conditions très difficiles à l’époque parce qu’il fallait accéder aux archives, tout ça. Et le plus grand plaisir, c’était de voir à un moment que les jeunes générations se sont ressaisies de cet héritage-là. L’on traduit dans leurs propres mots et qu’ils assurent l’immortalité même de Sankara dont parlais Sennen Andriamirado à l’époque d’une manière très poétique. Quelque part Sankara comme Mandela, pourquoi nous aimons c’est gens-là ? C’est parce qu’ils représentent non seulement le reflet de notre dignité, et de notre aspiration à la dignité, mais parce qu’ils représentent la part de notre propre bonté en nous. Et ils nous montrent que nous pouvons être au-delà de ce que l’histoire violente que nous avons vécu depuis des siècles a essayé de faire de nous. C’est-à-dire des zombis, des gens qui ne sont plus sujets de leur propre histoire, qui ne savent plus vivre ensemble. Donc, on les aime parce qu’ils nous ont retracé cette voie-là.
Qui était l’homme concrètement pour vous ?
Concrètement, Sankara ce n’est pas des paroles, ce sont des actes concrets, c’est l’exemple. Sankara ne dit pas « faites comme je dis ». Non, il dit, « je vais faire ce que je dis, je vais essayer de faire ce que je dis ». Il y a une fidélité entre les actes et les paroles. C’est ce manque de leadership aujourd’hui qui fait le problème de l’Afrique. C’est-à-dire des gens qui ont une intégrité en termes de valeur, qui sont des modèles d’exemple en termes de valeur d’éthique. Le problème fondamental de l’Afrique c’est les problèmes d’éthiques et en même temps qui sont des gens pragmatiques. Ce n’est pas une dogmatique. C’est un type pragmatique qui revient à la vie des gens et qui aime les gens. C’est un leader où tu sens qu’il ne méprise pas les gens. Notre conception du pourvoir souvent en Afrique c’est que, on pense qu’être en position de pouvoir, c’est mépriser les autres en dessous, c’est les écrasés de son pouvoir. Que c’est ça le pouvoir.
Sankara, il montre que le pouvoir c’est un service, on doit être au service des gens. Et c’est ce modèle de leadership qui manque aujourd’hui. Un leadership qui est un comportement mais qui est aussi une pensée parce qu’il ya derrière tout ce qu’il fait une pensée, une cohérence. Et surtout il y a cette volonté d’apprendre tout temps. Quand il arrive au pouvoir, le Sankara de 83 et de 87 c’est deux personnes. Quand on voit culturellement, son langage, il apprend tous les jours. Pour apprendre, il faut avoir de l’humilité et souvent nos gens quand ils sont dans le pouvoir, ils n’ont plus d’humilité. Il a de l’humilité il apprend, il essaie de voir comment il peut améliorer les choses.
Donc ce manque de leadership, c’est ce qu’il comblait, c’est-à-dire un comportement, une pensée et une pratique avec des résultats. Il faut des résultats quand on est en situation de direction d’un pays. Il faut des résultats concrets, il faut améliorer concrètement la vie des gens. On n’est pas là pour faire des discours. Non, non, il faut des résultats tous les jours. Chaque jour, on doit avoir avancé un tout p’tit peu. On n’a pas besoin d’avoir des milliards de dehors pour tracer une route. On n’a pas besoin de milliards de gens pour faire un centre de santé. Parce qu’on nous a transformés en mendiants.
Julius Nyéréré disait que l’Afrique ressemble à un mendiant assis sur une montagne d’or. Nous avons la montagne d’or, on est assis dessus et on tend la main. Et Sankara il montre qu’il faut chercher cette montagne d’or. Cette montagne d’or c’est dans cette confiance en soi. Cette capacité en disant qu’est-ce que je peux faire déjà pour moi-même. Je ne dois pas attendre que le FMI (Fonds monétaire international) ou la Banque mondiale nous donne de l’argent pour tracer une route, pour soigner, pour faire une vaccination commando. On a des gens, on a des compétences, on a des gens intelligents, on a un continent qui est très riche. Mais si dans nos têtes on pense qu’on ne peut rien pour nous-mêmes, on ne peut pas se développer.
Donc Sankara renverse les choses en disant, qu’est ce qui nous empêche de faire comme les autres, on est égaux. On est des humains comme les autres. Ce que les autres on fait pourquoi on ne peut pas le faire. Et je pense que c’est ce leadership qui nous manque. Ecoutez aujourd’hui la plupart des dirigeants. Ils vous disent oui, on va aller dans telle capitale, on va avoir un partenariat stratégique. Commencez à avoir un partenariat stratégique avec votre propre peuple. Le plus grand développeur de l’Afrique c’est d’abord les africains.
Donc la jeunesse africaine n’a plus de référence de nos jours ?
On a un grand problème de référence. Vous savez, on a eu une histoire tragique depuis l’esclavage, la colonisation. On a été déstructuré dans nos sociétés, nos manières de concevoir le pouvoir, de gérer le pouvoir, de gérer les contradictions sociales, de transmettre la connaissance. Avant on transmettait la connaissance et après, la connaissance est devenue un moyen de pouvoir. On ne la transmet plus. Quand on va à l’école, on va à l’école, non pas pour venir être utile à la société. Mais on va à l’école pour revenir s’enrichir. Vous voyez, l’éducation n’est plus un moyen, quelque chose que l’on veut attirer pour être utile à la société. Mais quelque chose que l’on va acquérir pour avoir du pouvoir sur les autres. Donc il y a un problème de transmission de connaissance, de savoir dans nos sociétés et le plus grand combat que je pense aujourd’hui en Afrique, c’est celui-là. C’est le combat de la pensée politique.
Je dis toujours, y a deux questions fondamentales, au-delà de tout ce qu’on entend, démocratie, pas démocratie. Qu’est-ce que nous voulons ? Il faut d’abord qu’on soit clair là-dessus. Ensuite comment on fait pour arriver à ce que nous voulons ? C’est ça la question fondamentale. Qu’est-ce que nous voulons, ça veut dire ce pour quoi nos parents se sont battus pour les indépendances. Une société où tout le monde a les mêmes droits. C’est la même loi pour tout le monde, une société où les intérêts généraux priment sur les intérêts de quelques individus. L’intérêt général d’abord. Une société ou le quotidien de chacun doit être amélioré. Une société ouverte sur le monde puisque nous faisons partie de ce monde d’aujourd’hui. Et comment y arriver ? Après on va trouver des formules pour y arriver. On a besoin de la construction d’une pensée politique.
Vous savez, les indépendances on les a acquises comment ? Les indépendances ont été précédées par des mouvements culturels et de pensées politiques. Il y a eu la Négritude au niveau des pays francophones. Il y a eu le courant de l’African personality dans les pays anglophones. Il y a eu de grands penseurs. Kwamé Nkrumah était un grand penseur politique, Jomo Kenyatta était un grand penseur politique. Ici dans ce pays vous avez eu des Ki-Zerbo (Joseph). Peu importent les tendances, mais il y avait des penseurs. On ne peut pas avoir un changement, si on n’arrive pas à résoudre cette question-là de la pensée politique africaine.
C’est quoi la pensée politique africaine ? On navigue à vue, c’est ça le problème. On navigue à vue d’une élection à l’autre, alors qu’on pouvait arriver à faire ressortir une pensée commune avec je dirai un dénominateur commun par rapport à toutes les sociétés. Même y compris par rapport à tous les partis de gouvernement. En disant, il y a des priorités au-delà des générations. L’éducation, la santé, l’emploi des jeunes, l’amélioration de la vie des paysans, les droits des femmes. Il peut y avoir des chantiers comme cela sur lesquels on arrive à se retrouver et à structurer une pensée. Je pense que le combat c’est un chantier énorme qu’on doit faire et la pensée de Sankara peut nous aider là-dessus parce que même s’il n’a pas fait une doctrine, il a laissé une pensée, une parole très forte et très riche.
Source: LeFaso.net
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