Ma petite culture philosophique me rappelle, à la sortie en quatre temps de Koudraogo Ouedraogo, combien Platon avait décidément raison de comparer les sophistes à des vases d’airain sur lesquels il suffit que l’on tape une seule fois pour qu’ils se mettent à résonner indéfiniment. Aux sophistes, vous leur soumettez une question précise sur la nature du beau ou de la vertu et ils vous citent longuement des exemples de belles femmes et choses, et d’individus vertueux sans jamais répondre à l’essentiel de la question.

De même j’ai fini par réagir une seule fois à Koudraogo Ouedraogo sur ses prétendues « réponses » à quelques-uns de mes articles, et il se répand en épisodes et nous fait une diarrhée de plume. C’est à croire que pour lui la force et l’efficacité des arguments résident dans leur nombre. À moins que, plus sûrement, ce recours à la quantité n’en atteste l’usage apotropaïque qui est de mettre, ce faisant, toutes les chances de son côté pour contrer et conjurer un adversaire redoutable qui, s’il n’a rien en sa personne de dangereux, soulève et pose des questions embarrassantes. Tout comme la nature dote les espèces animales fragiles (les insectes par exemple) de la capacité de se reproduire en très grand nombre pour parer avec plus de chance de survie les attaques des grands prédateurs gourmands.

Me faut-il produire autant d’épisodes, voire davantage, pour répliquer à Koudraogo ? Non. Pas que je n’en serais pas capable, ni même d’abord parce que renchérir en diarrhées ou rajouter de la diarrhée à la diarrhée ne ferait que repulser le lecteur et l’inciter plus à se boucher le nez qu’à me lire savoureusement, mais parce que je n’en ai même pas besoin. Il y a bien mieux pour atteindre ma cible beaucoup plus effacement et sûrement. Un archer adroit n’a pas besoin de gaspiller ses flèches en les tirant de tous côtés, quand il sait qu’une seule sera décisive et suffira à faire mouche et pan…

Ce n’est donc pas, surtout pas, que je veuille esquiver l’essentiel comme nos sophistes de Platon, et m’y dérober ici par manque d’arguments. Car cet essentiel s’enlève, dans tout le cadre construit par Koudraogo, sur fond de la scansion en quatre temps d’un même titre (Le « soleil Zida », ce nouvel astre de KDC DABIRE) sous lequel sont ramassées et rangées des pièces qui n’ont rien à y voir ou faire (d’où la diarrhée : quand l’on consomme sans art et mélange pêle-mêle des aliments incompatibles, ils finissent par ressortir sous forme de fourre-tout liquide qui semble alors couler abondamment d’une source de consistance), cet essentiel ne porte au fond et finalement sur rien d’autre que sur l’intégrité : la non intégrité ou la malhonnêteté du Général Zida

Or voici que dans tout ce fouillis d’informations, de références, de documents écrits et télé-recopiés par Koudraogo pour servir de pièces à conviction, ses propres écrits et quelques-uns des miens, MANQUE pourtant un article du même Kwesi Debrsèoyir Christophe DABIRE que Koudraogo tient à présenter à tous comme le vénérateur hioliophile (ami du soleil) d’un Zida corrompu :

Tiens tiens ! Dans les quatre tiroirs de l’honnête Koudraogo manque une pièce écrite importante signée de moi sur le même Zida ! Dans le coffre-fort à quatre tours démonstratifs de l’intègre Koudraogo une oeuvre décisive du DABIRE adorateur du Général Zida se trouve…dérobée et soustraite ! Dans la cacophonie en quatre temps quatre mouvements de Koudraogo se laisse audire un silence pour toute oreille attentive et lectrice de DABIRE, silence créé par cette absence douteuse ! Au soubassement même de l’échafaudage en quatre murs de Koudraogo gît donc un gros trou béant qui est la faille imprudemment laissée par la soustraction silencieuse du bloc qu’est l’écrit de Debrsèoyir dérobé et écarté de l’édifice ! Le lecteur voit d’entrée que je n’ai absolument pas envie d’esquiver ici cette question de l’honnêteté, de la fraude, du détournement, de la manipulation, bref de l’intégrité et de la morale. J’y reviens donc forcément, dans un instant…

Telles sont en effet ma méthode et ma stratégie ici : au lieu de perdre temps et raison à répondre à chaque phrase ou chaque paragraphe de Koudraogo, m’en tenir à l’intention et au but premiers de ses quatre écrits qui ne consistent pas tant à me répondre (je n’avais fais que réagir à ses « réponses », ce n’est pas moi qui porte la contradiction à Koudraogo mais lui à moi, et je me réjouis qu’il ait attendu que je lui suggère comment il devrait s’y prendre) qu’à nous « démontrer » que Zida n’est pas intègre, et que moi-même qui le « défends » ne peux que donner dans la vénération de quelqu’un qui ne le mérite pas : tout le titre des quatre textes de Koudraogo le prouve. Mais ce titre qui semble annoncer une monographie, c’est-à-dire un écrit exclusif et précis sur le Général Zida, se dérobe au contraire à ses propres tâche et promesse pour se disperser en d’autres sujets qui n’ont rien à voir avec l’intégrité de Zida et, du coup, devient l’anti-monographie par excellence.

Je préfère, pour ne pas s’éloigner de l’essentiel qui nous oppose lui et moi, fixer les notions elles-mêmes auxquelles notre polémique (plutôt que débat !) se ramène au fond : le patriotisme (dans l’affaire judiciaire liée au putsch de Diendéré) et l’intégrité (les rumeurs de corruption et de malversations financières). Or ces deux notions ne sont pas les mêmes, et n’appartiennent pas au même champ ni sémantique ni lexical, de sorte que l’on peut en parler séparément. Il ne peut donc pas y avoir, contrairement à ce que Koudraogo affirme pour se donner trop vite raison tout seul, de « glissement sémantique » (je le cite en 3/4). L’on peut, tout en étant brigand et même moralement et financièrement corrompu, être un grand patriote qui monte courageusement au front et défend son pays. Je dirai même que le patriotisme est incompatible avec la morale de l’intégrité et l’intégrité de la morale ! Socrate, dans le « Criton » de Platon, met en garde : « Quant à la violence, si elle est impie à l’égard d’une mère ou d’un père, elle l’est bien davantage envers la patrie ». Cela veut que la violence contre mère et père est d’une gravité moindre que celle envers sa patrie, et que, donc, l’on peut même surseoir à notre devoir moral envers nos parents pour répondre à l’appel de la patrie…

C’est méconnaître même la sémantique (le sens) de l’expression « glissement sémantique » telle que Koudraogo est tout heureux d’utiliser comme l’une de ses rares expressions de langue soutenue (3/4), que de penser que l’on peut « glisser » d’un champ différent à un autre : du patriotisme à l’intégrité, l’on ne peut que faire un saut, car l’on ne peut glisser qu’à l’intérieur d’un même champ de sens (sémantique), à la faveur (c’est-à-dire grâce à) d’une polysémie (différents sens) du même mot ; exemple, on peut glisser du patriotisme au nationalisme, ou à la libération d’un peuple, mais pas du patriotisme à l’intégrité et à la morale…

Quant à l’intégrité, justement, son champ lexical, essentiellement moral, recouvre l’honnêteté, la probité, la droiture, la sincérité, la justice ou le juste (être juste), le professionnalisme (faire son travail de façon consciencieuse), etc. Dans la notion d’intégrité il faut distinguer aussi deux choses qui n’ont rien à voir (ou de loin, par synthèse et non par analyse) avec ce premier sens : l’intégrité physique (la vie et le corps intacts d’une personne, à ne pas toucher pour les supprimer, pour tuer) et l’intégrité morale ( la vie privée et la dignité à respecter). C’est au premier sens, moral, de l’intégrité que s’opposent corruption, malhonnêteté, l’injuste, etc. Au passage, la traduction du « Burkina Faso » par « pays des hommes intègres » est inexacte dans son esprit : il n’y a nulle part d’hommes nés corrompus ou nés intègres et vertueux. Dans son esprit et son fond sankaristes, Burkina Faso serait mieux traduit par « pays des hommes dignes ». Car la dignité n’est pas l’intégrité morale, elle est le sentiment qu’a un homme de sa propre valeur qu’autrui doit respecter, le respect de soi qui oblige et force autrui à nous respecter.

C’est exactement en ce sens de la dignité que l’on peut soutenir que nos dirigeants actuels manquent de dignité dans le traitement de l’affaire judiciaire impliquant l’Ivoirien Soro et même l’état-major militaire ivoirien, lorsqu’ils vont se coucher devant et sous la Côte d’Ivoire pour quémander quelques kwatts d’énergie. C’est une honte qui procède d’un non respect de soi qui incite autrui à ne pas nous respecter comme peuple. Le dernier contre-exemple impliquant le conseiller du Président Ouattara dans les élections gabonaises (implication qui fait que même si M Ping avait remporté arithmétiquement les élections, il les perd malheureusement en intégrité et en patriotisme car il n’a pas besoin de non Gabonais pour remporter des élections au Gabon, erreur qu’exploite M Bongo à loisir ) le prouve : la cyber-implication ou hacker-implication ivoirienne est immédiatement réparée par des excuses officielles au « peuple frère » du Gabon (on s’excuse donc d’autant plus spontanément qu’on est frère) auquel la Côte d’Ivoire reconnaît sa « souveraineté » qu’elle respecte. Et dites-moi : la Côte d’Ivoire a-t-elle attendu que l’appel téléphonique entre l’Ivoirien et le Gabonais intercepté par l’Etat de Bongo soit authentifié avant de s’excuser ? A-t-elle demandé que cette interception téléphonique ait été auparavant autorisée par un juge avant de s’excuser ? Non bien sûr :

Mais pas les mêmes excuses publiques et le respect, voire plus, au Burkina qui a été l’objet d’une intention d’agression par les armes, et qui est pauvre (même les USA ou la France n’auraient pas méprisé autant le pays des hommes dignes)… Ce qui me convainc que le Président Ouattara, qui est sans doute aujourd’hui l’homme politique africain le plus fin et intelligent, n’a pas encore dit son dernier mot dans le dossier Burkina /Soro, et me permet de parier qu’une suite judiciaire sinon, du moins politique y sera donnée en Côte d’Ivoire, si ce n’est même déjà ce qui est en train de s’y passer …

Juridiquement, la souveraineté du Gabon n’est pas supérieure ni inférieure à celle du Burkina Faso, et les États sont en droit égaux, tout comme le sont les individus en droits. La souveraineté des nations (autre concept à fixer après le patriotisme et l’intégrité) ne regarde pas à leurs richesses et pauvreté. C’est même précisément cette souveraineté qui explique et justifie pourquoi les dirigeants politiques de n’importe quel État, même petit et pauvre, jouissent d’une immunité judiciaire tant que l’humaine et universelle dignité (les droits de l’homme qui peuvent justifier une ingérence internationale) n’est pas par eux massivement bafouée. C’est la même souveraineté qui permet, par exemple, à un « petit » président philippin Rodrigo Duterte d’insulter publiquement le président Obama des puissants et riches Etats-Unis !…

C’est parce que la polémique ne porte pas sur les personnes de Koudraogo et de Debrsèoyir mais sur des faits et des idées qu’il est nécessaire de fixer à peu près l’essentiel qui fait polémique et les notions et concepts qui y sont engagés. J’insiste : l’on peut être patriote alors même qu’on est brigand et odieux ou injuste avec ses propres parents, ou infidèle avec époux et épouses, etc, le privé étant séparé et soumis au public ; et l’on peut être digne tout en étant inculpé de corruption ou de détournement (c’est bien le cas de Zuma, à la fois digne et honorable face à l’apartheid, mais scandaleux face à l’argent et aux deniers publics entre autres) ; de même que l’on peut être inculpé pour corruption tout en n’étant pas corrompu de nature : encore Dilma, Lula au Brésil. Peut-on prétendre, en toute rigueur, que Lula n’a pas été l’icône qu’il est parce qu’il est aujourd’hui inculpé pour corruption passive ? Peut-on prétendre que la superstar du foot L.Messi est corrompu parce qu’il est condamné par la justice espagnole pour fraude fiscale (alors qu’il n’est pas en manque d’argent) ? Peut-on même soutenir que Blaise Compaoré n’a pas été l’un des héros de la Révolution de 1983 qui est monté de Pô avec ses commandos pour libérer et porter Sankara au pouvoir, parce qu’il a par la suite liquidé ses compagnons et d’autres innocents ? Non, du moins si l’on est…honnête et juste… L’énigme de la nature humaine consiste toute entière dans ce même et son autre qui y sont inséparables …

Remarquez qu’en français l’expression « X ou Y est corrompu », sans précision de circonstances, est inacceptable et injuste : l’on est corrompu ou malhonnête dans une situation ou une affaire précises, jamais dans l’absolu. Car il faudrait être un dieu leibnizien (le philosophe Leibniz soutient que Dieu sait tout de tous les individus et possibles avant qu’ils ne viennent à l’existence) pour avoir l’arrogance prétendument morale, mais en réalité moraliste et intégriste, de dire qu’une personne est corrompue comme un fruit avarié à jamais, c’est-à-dire définir la nature d’une personne par la corruption. En vrai, l’on peut être intègre au bureau, faire consciencieusement son travail, sans mettre un cfa public dans sa poche, mais être un monstre de violence à domicile, tromper épou(ses)x et amis, être un « faux type » notoire : en quoi serait-on alors moralement intègre ?? Or nous ne connaissons pas (en tout cas pas moi CDDK) la vie et la complexion détaillées d’une personne pour pouvoir affirmer qu’elle est absolument ou intrinsèquement corrompue

Zida est corrompu, parce qu’il appartenait au RSP, nous clame-t-on, mais quand l’on demande le dossier de corruption et les chefs d’accusation personne ne peut les fournir aujourd’hui, ce qui revient à insinuer qu’il est né et va mourir corrompu parce qu’il vient du RSP même démantelé : un véritable apartheid anti-Zida qui lie les pratiques d’un ex corps d’élite à une corruption de naissance et de nature, donc ineffaçable à jamais, de sorte que si quelqu’un vient de l’ex RSP il est forcément corrompu quoi qu’il fasse et même fasse contre le RSP ! Je demande : de quel droit ? Et pourtant l’on a réintégré les ex soldats du RSP dans l’armée régulière « normale » : pourquoi ne les a -t-on pas enfermés à vie ?…

Quelques lecteurs mal ou sous-(in)formés pensent que Koudraogo et moi nous disputons sur des questions philosophiques, c’est-à-dire de philosophie : il n’en absolument et malheureusement rien. S’il s’agissait de philosophie nous allions nous passer d’épisodes et de chapitres, et nous entendre sur cet essentiel, avec un peu de culture philosophique. Hélas ! Ceux des (vrais) philosophes qui ont une culture solide reconnaîtront, dans cette polémique qui n’est pas un débat, tout le partage entre le philosophe et l’homme ordinaire chez E Weil (et chacun de nous est ou peut être l’un ou l’autre, sauf que seul le philosophe sait quand il est l’un ou l’autre !) : si le premier a fait le choix du « discours cohérent », qui n’est pas le beau discours mais le discours de raison, le second choisit la violence, laquelle n’est pas d’abord violence physique ni verbale (il peut y avoir de la violence sans insultes ni coups ni armes), mais le refus obstiné d’entendre raison. Koudraogo dit par ailleurs : « il faut que l’on m’en persuade » (cf « Y. I.Zida : patriotisme ou arrivisme ? »), une litote pour dire qu’il refuse d’être persuadé !

Mais personne ne peut persuader quelqu’un qui ne VEUT pas se laisser persuader et convaincre, et qui au contraire veut avoir raison sans entendre raison ! La violence c’est alors précisément de se fermer à toute persuasion pour avoir raison, et de refuser ce sur quoi des hommes raisonnables pourraient s’accorder. Et cette violence-là ne disparaît pas même si l’on utilisait la violence verbale et physique, ou celle des armes (même avec les armes les plus sophistiquées du monde, personne ne peut persuader et convaincre quelqu’un qui ne le veut pas !)…

Comme un certain Blaise Compaoré campé dans son désir de lenga jusqu’au bout refusait d’entendre raison. Ou comme le RSP jusqu’aux coups d’obus dans le camp Naaba Koom II n’a jamais voulu entendre raison : voilà pourquoi je parle d’un nouveau « RSP » en la personne de Koudraogo. Le RSP est mort, vive le nouveau RSP K.O (initiales de Koudraogo Ouedraogo) ! Tout aussi anti-Zida que l’ancien et le vrai RSP. C’est tout le délire de Koudraogo, de penser ou vouloir avoir raison sans entendre raison, et d’écarter sciemment ce qu’il y a de raisonnable dans ma position sur Zida pour avoir raison (j’y viens encore)

La preuve que Koudraogo est loin de la philosophie (mais ce n’est pas une tare intellectuelle en soi de ne pas être philosophe, mais quand l’on répond à un texte qui parle depuis la philosophie, il est plus prudent d’en avoir un minimum d’informations, sinon on parle et écrit dans le vide) est l’utilisation qu’il fait de la métaphore du « soleil Zida » dont il a composé son titre quatre fois scandé, et que j’ai utilisée dans la conclusion de mon article « Pourquoi Y.I Zida est grand » (cf Koudraogo 1/4) sans avoir rappelé clairement le milieu intellectuel d’où cette comparaison a été prélevée et reprise par moi : la philosophie. Et dans cette philosophie, ce qu’un non philosophe a le droit de ne pas savoir (mais quand l’on ne sait pas il est plus raisonnable et prudent de se renseigner avant de me répondre, ce qui, du coup, m’oblige ici à être pédagogue pour éclaircir les idées, au risque d’être long) c’est du philosophe Hegel qu’il s’agissait lequel, aussi bien, pense sa philosophie comme étant toute la philosophie parvenue à son entière effectivité

Tous ceux qui ont fait une Terminale au lycée, ou peut-être même qui ont une bonne culture générale ont déjà rencontré au moins une fois cette citation de la Préface des « Principes de la philosophie du droit » de Hegel, selon laquelle « ce n’est qu’au début du crépuscule que la chouette de Minerve prend son envol ». Autrement dit, c’est quand le soleil se couche que commence la philosophie. Minerve est justement la déesse romaine de l’intelligence et de la pensée élevée. De cette image du soleil couchant (la fin des fonctions politiques transitoires de Zida) que j’ai reprise pour parler du Général Zida, je précisais entre parenthèses qu’il ne s’agissait pas d’un « Zida soleil » pour éviter, écrivais-je noir sur blanc, toutes vénération et adoration

Eh bien le « soleil Zida » de la métaphore n’est donc pas mon soleil, mais celui dont parle Hegel. Et même chez Hegel, ce soleil n’est pas à adorer, au contraire il faut le laisser s’éclipser : ce sont les anciens Égyptiens qui adoraient le soleil (Rê/Râ). Or les Égyptiens représentent pour Hegel, comme pour toute la philosophie occidentale dont Hegel pense porter tout seul le nom, l’absence même et la prénaissance de la philosophie. De sorte que c’est quand le soleil, symbole non pas de philosophie mais de l’adoration pré-philosophique des Égyptiens, décline et s’éclipse dans la nuit, qu’advient la philosophie proprement dite (celle de Hegel en l’occurrence). Le soleil n’est donc pas objet de vénération et d’adoration pour un philosophe, d’où la précaution que j’ai prise de prévenir toute adoration ou vénération !

Et donc c’est un énorme contresens grossier que commet Koudraogo, de me citer dans l’intention d’utiliser l’image contre moi, et faire de moi, malgré mes précaution et mise en garde (ne pas adorer un Zida qui serait le soleil), le « primitif » adorateur égyptien de cet astre du jour qui, on l’aura compris, est finalement l’astre même de la nuit de l’esprit ! Le mot d’Adorno selon lequel « la barbarie, c’est de prendre les choses à la lettre » s’en trouve ainsi confirmé par Koudraogo : la barbarie ici n’est pas la violence sauvage, mais le manque de culture et d’art qui fait qu’un individu est un philistin de l’esprit, ou un terreux béotien sans finesse de goût et d’esprit…

C’est que le but et l’intention de Koudraogo sont bien de me présenter à tout prix et à tous comme celui qui voue, sans raison, vénération et adoration au Général Zida. Mais même à prendre l’image à la lettre, on peut reconnaître, avec beaucoup d’esprit encore, si l’on n’en est pas dépourvu, que Zida s’est bel et bien…éclipsé en Amérique du Nord, comme cela fait partie, pour nous qui habitons la terre, de la nature et du mouvement du soleil ! Cette intention est explicitement lisible dans la « conclusion générale » (4/4) de Koudraogo qui m’interpelle ainsi : « C.DABIRE, cela est apparent pour tous que lorsqu’il s’agit de Zida, tu perds complètement tous les repères. On ne compte plus le nombre d’articles que tu as signé pour vanter les mérites de cet homme, révisant parfois même l’histoire pour servir sa cause. Tu devrais avoir l’humilité de reconnaître que tu serais la dernière personne à rester raisonnable lorsque le sujet traite de près ou de loin de Zida » (sans correction du français : signés)

Pourtant (le lecteur honnête le vérifiera, surtout s’il est habitué à me lire), parmi les articles que j’ai signés sur Zida (trois exactement), il y en a UN, écrit justement après « Pourquoi Y.I Zida est grand », que Koudraogo ne cite jamais dans ses 4 épisodes : « Rentrez, Général Zida : Le Faso n’est pas la MACO » !! Dans lequel je redisais encore que je ne suis adorateur que de la vérité et de la justice et, surtout, appelais le Général à revenir au pays s’excuser et pour répondre des éventuels reproches et accusations dont les rumeurs l’accablent !! J’ai donc écrit en tout trois articles sur Zida (avec son nom en titre), dont « Pourquoi Y I Zida est grand » qui, absolument pas, ne traitait de l’intégrité de Zida, car les rumeurs des « affaires » n’étaient pas encore connues (mais où, tout de même, j’évoquais les erreurs et fautes possibles de YIZ dans ma définition même du grand !!), mais répondait au débat d’alors qui était de savoir non pas si Zida est intègre ou corrompu, mais s’il méritait ou non son nouveau grade de Général (et personne d’ailleurs ne le lui a retiré au jour d’aujourd’hui) !! C’est exactement parce que le contenu et le message très explicites de mon article « Rentrez, Général… » dérangent et embarrassent le raisonnement et toute la thèse que pose Koudraogo et qu’il essaye de démontrer vainement en quatre temps (DABIRE perd la raison sur Zida qu’il vénère), c’est pour cette seule raison qu’il l’a tu et écarté de ses références !! J’avais promis plus haut d’y revenir. Nous y voilà. Pour en tirer la conséquence qui s’impose au sens :

Cette mise à l’écart volontaire et délibérée d’un article d’un DABIRE censé perdre la raison, et « tous les repères », à adorer un Zida corrompu et non intègre, et non patriote, ce silence calculé et manipulateur sur cet article qui montre justement que je ne suis pas sans raison ni souplesse d’esprit sur Zida (je doute qu’on lise un jour Djibo et /ou Nyamsi, que Koudraogo évoque, dans des articles qui demanderaient publiquement à Blaise de revenir au Burkina pour répondre devant la Justice !!) ne viennent pas de n’importe qui, ni de quelqu’un d’autre que du même Koudraogo qui s’aveugle et s’étouffe à « tirer » sur Zida, passionnément, comme un RSP attardé (en retard et à retardement), et surtout qui reproche à Zida sa fraude et sa corruption, bref sa désintégrité, et qui me parle à moi-même…d’ « honnêteté intellectuelle »(4/4) !!

Autrement dit, le même Koudraogo qui s’excite bruyamment contre la fraude et la malhonnêteté du Général Zida, et donne des leçons de morale, est pris en flagrant délit de fraude intellectuelle, de détournement avec sa plume toujours aussi, décidément (et je crains définitivement) …tordue ; le même moralisateur anti-Zida est ainsi pris la main (la plume) dans le sac en pleine malhonnêteté intellectuelle (c’est là un vrai cas de malhonnêteté intellectuelle, pour ceux qui en parlent sans savoir ce que c’est) : et en pleine lumière du…soleil !! Koudraogo fustige d’une main la corruption de Zida et sa malhonnêteté, mais de l’autre main (que dis-je, de quatre mains) il prouve à tous sa propre malhonnêteté intellectuelle en écartant exprès mon article qui appelle Zida devant la Justice, pour mieux établir, par sa construction en quatre murs reposant sur un gros trou de malhonnêteté, que je vénère le soleil Zida !! Drôle de vénération que d’appeler sa propre « idole » à se présenter à la Justice pour être éventuellement puni !! La précaution et la souplesse intellectuelles dont je fais preuve au sujet de Zida choquent et déroutent le plumitivisme borné et seulement passionné !!… Et le plumitif me prend pour son « primitif » héliophile !!…

Conclusion : je ne suis pas, je le répète, un adorateur de Zida ni de personne. La preuve est que le Général n’a toujours pas écouté mon appel qui est, oui, un conseil en ce sens qu’il me semble qu’il a plus à gagner qu’à perdre en revenant faire la lumière sur toutes ces accusations qui sont des condamnations d’office sans être officielles. Même Blaise Compaoré y gagnerait aussi à répondre devant la Justice plutôt qu’à la fuir : je rappelais dans un article l’exemple du Béninois M.Kérékou, qui a certainement fait pire que le dernier et encore plus que Zida, mais qui a eu l’humilité d’aller vers son peuple qui lui en a pardonné pour lui permettre même de mourir en héros national ! Je ne suis pas le corybante (admirateur zélé) d’un soleil Zida, et me garde de toutes ablutions corybantiques devant quelque homme fort et devant quelque voisin opulent … Le peuple burkinabè a aussi tout à gagner si Zida se présentait à la Justice : et si, je le clame, le Général Zida devait à lui seul payer pour tant d’injustices accumulées au pays des hommes dignes mais frustrés de justice, qu’il s’y présente et réponde. Ce serait encore patriotisme et grandeur, car ce n’est pas n’importe qui qui paye pour tous les autres. La victime sacrificielle est toujours différente des autres pour lesquels il paye, a toujours quelque chose de plus que les autres n’ont pas : un animal à une corne, tout noir ou tout blanc, un étranger qui forcément vient d’un autre pays ou d’une autre culture, un Christ rédempteur, un albinos (comme malheureusement encore dans l’Est de l’Afrique), etc…

Mais jamais je ne ferai bande et nombre avec la troupe comique des marchands de morale et des hypocrites moralisateurs dont le populisme rance consiste à tromper et endormir tous les jours le petit peuple avec des « c’est pas bien la corruption » sans accepter ni se résoudre à changer le vieux squelette administratif et politique qui produit et nourrit les corruptions. Quand l’on parle du « système » corrompu, c’est QUI ce système au juste ?? C’est contre ce squelette colossal qu’il nous faut lutter pour l’abolir, et laisser à la Justice seule la tâche de traiter l’ « affaire Zida », à moins que la justice elle-même ne fasse partie du squelette… De toute évidence, si Zida est coupable de fautes, voire de crimes, ce sera devant la Justice, et pas devant quelque instance de morale et de vertu qu’il sera entendu et peut-être inculpé. En tout cas pas devant Koudraogo Ouedraogo : je ne le connais pas pour dire qu’il est absolument malhonnête, mais il est clairement et intellectuellement malhonnête dans son silence sur mon article appelant Zida à revenir au pays pour éventuellement répondre.

Il n’y a pas qu’à propos du seul argent et des seuls comptes publics que l’on peut frauder et être malhonnête : avec sa plume aussi, comme Koudraogo vient de le prouver à tous en taisant un article de moi pour le maquiller et dissimuler ! Dilma Rousseff au Brésil, je rappelle, a été accusée de maquillage de comptes publics et déchue de ses fonctions. Pourquoi Koudraogo ne serait-il pas ici dénoncé, démonté et déchu de son piédestal de moraliste sans honnêteté, et de RSP attardé contre Zida ?! Il révèle ainsi lui-même qu’il est plus proche du Zida dont on dit malhonnête et au double langage que moi je ne l’adore ! Sa fresque en quatre épisodes n’aura été qu’une ridicule frasque hypocrite contre la morale de l’honnêteté qu’il brandit contre le Général. Et sa jactance moralisatrice une insulte à la morale de l’honnêteté qu’il trahit …

Si Koudraogo est un insurgé (je ne veux pas en douter) et un anti-RSP, il doit reconnaître la fissure produite par Zida dans le RSP, et les humiliations publiques que Zida a subies sous la Transition, dans la frousse générale (qui a poursuivi en justice le chef de corps B Kiere de l’époque, devenu putschiste, lorsque ses soldats ont attaqué une radio ouagalaise ? Aujourd’hui que le RSP est mort, chacun frappe sa poitrine bombée et joue les gros bras virils !!). Si Koudraogo a affronté les forces de l’ordre sous Blaise (bravo à lui en 3/4, encore qu’il avait devant lui un gentil gendarme qui ne chargeait pas mais échangeait, sinon Koudraogo ne serait plus là à relater ses « exploits » pour prouver son patriotisme !), il doit savoir reconnaître ce que cela signifie pour Zida de résister au RSP ! Si l’assassinat injuste de Norbert Zongo l’a révolté et indigné, alors Koudraogo doit reconnaître et s’indigner de l’injustice et de l’impunité qui peuvent suivre la mort de dizaines de patriotes lors du putsch qui accuse aussi Soro !

C’est parce que je suis un insurgé que je reconnais et valorise tout ce et tous ceux qui ont eu une attitude insurrectionnelle à quelques moment et niveau que ce fut pour que nous vainquions. Personne ne s’occupe de savoir si tous les millions de Burkinabè qui étaient dans la rue contre Blaise étaient moralement propres ou sales (certainement y avait-il aussi des délinquants voleurs de mobylettes, et des détourneurs anonymes de fonds publics), pas plus que de savoir si parmi les millions de femmes qui ont manifesté contre Blaise avec des spatules il y en avait qui étaient des prostituées ! Or, parce que Zida est soupçonné de malversations et de fautes après la Transition, après avoir été du côté du peuple, l’on juge rétrospectivement (en arrière, après coup) sa présence place de la Révolution d’après ces soupçons de malversations : il était donc déjà corrompu lorsqu’il s’adressait aux insurgés place de la Révolution !?

L’on peut donc être, comme Zida, ex RSP soupçonné de corruption mais avoir eu le courage de se démarquer du RSP et l’affronter ; tout comme l’on peut être, comme Koudraogo, capable d’ « exploits » patriotiques et militants mais ne pas trouver de honte dans la perte de dignité et de souveraineté de son pays qui demande justice après une agression ; et, alors même que l’on se dit intègre, manquer d’honnêteté intellectuelle vis-à-vis d’un contradicteur dont on tait soigneusement ce qui de lui embarrasse ! L’on peut faire des exploits à un moment mais devenir malhonnête et injuste à d’autres : comme Blaise, comme Zida, comme Zuma, comme… Koudraogo !! C’est la raison pour laquelle je soutiens que personne n’est né corrompu ni intègre, ce que la traduction française du Burkina Faso en « pays des hommes intègres » peut entretenir comme confusion et illusion, au lieu de « pays des hommes dignes » : si nous étions (nés) intègres au Burkina, nous n’aurions pas à parler de « lutter contre la corruption » aujourd’hui !! D’où viendrait alors cette corruption ??…

Comme les extrêmes opposés finissent toujours par se ressembler (encore que Koudraogo et moi ne sommes pas des extrêmes), j’arrête d’écrire pour ne pas faire moi-même une diarrhée (mais il y a des diarrhées plus consistantes que d’autres, et je ne vous souhaite franchement pas la moins…solide !)…

Kwesi Debrsèoyir Christophe DABIRE

PS :

1. La petite tentative de coup d’Etat de Zida et d’autres, dont parlait un papier de la journaliste Caroline Ouanré (« Insurrection d’octobre au Faso, ce que le peuple doit savoir ») m’a été confirmée par un ancien ministre de Blaise Compaoré. Mais les dates indiquées par la journaliste sont inexactes et, surtout, ce n’est pas Zida mais le colonel Coulibaly qui avait conduit Blaise jusqu’à Abidjan…

2. Les lecteurs peuvent lire sur le site de Jeune Afrique des articles sur les écoutes de Zida et Barry, et aussi l’opposition catégorique de Zida contre l’exfiltration de Fatou Diendéré vers le Togo après le putsch…

3. Je ne suis pas SOME, ni KA, ni les Tapsoba de H et de Bobo, ni d’autres qui souvent abondent dans le même sens que moi dans les forums ; les intéressés ne manqueront pas, surtout SOME que je ne connais même pas (sauf qu’il indique un nom dagara comme moi : je n’ose pas croire que Koudraogo soit ethniciste, et me croie décidément stupide pour me camoufler dans des forums en passant de DABIRE à SOME ), ils ne manqueront pas d’éclater de rire comme moi-même en lisant le 4/4 de Koudraogo !! Quand l’inspiration me vient, c’est par des articles que je l’exprime, pas par des posts anonymes dans des forums !! Mais Koudraogo nous dévoile ainsi indirectement comment il s’y prend lui-même dans les forums…

4. J’aurais pu nommer Idrissa DIARRA qui écrit sur une « conférence internationale » sur Zida en ne tenant pas compte des mises en garde que je lui ai adressées en privé sur Arendt et la banalité du mal qui n’est pas la banalisation du mal, mais son humilité m’a dissuadé de le nommer et de l’éreinter publiquement…

5. Que Koudraogo me tutoie alors que nous ne nous connaissons ni d’Adam ni d’Eve ne me dérange pas : c’est sans doute moins une question d’éducation qu’un désir de proximité et de camaraderie que ma propre simplicité ne repousse pas. C’est donc parce que nous sommes proches que nous sommes opposés. Je le remercie pour l’exercice d’écriture dont il m’a donné l’occasion, et qui m’a permis de développer et préciser des idées au-delà de ses quatre articles sur « le soleil Zida » …

6. Franchement, si je devais être conseiller d’un politique, ç’aurait été du président Blaise Compaoré, au sujet de l’ex 37, pour lui éviter la fin qu’il a connue, mais c’est tant mieux finalement pour le peuple burkinabè !… CDKD.

Source: LeFaso.net