Depuis un certain temps, nous constatons avec amertume la situation qui prévaut au Burkina Faso, relativement au mouvement d’humeur observé par le personnel la Garde de sécurité pénitentiaire. De fait, depuis plus d’un mois, sur toute l’étendue du territoire national, la justice pénale est à l’arrêtdu fait de la grogne du personnel de la garde de sécurité pénitentiairequi exige du gouvernement un traitement transparent, diligent et définitif de la situation statutaire de la garde de sécurité pénitentiaire.

En rappel, la loi portant statut du personnel de la Garde de sécurité pénitentiaire (GSP) a été adoptée courant 2014, après une longue et âpre lutte syndicale. Il a fallu attendre fin 2015 pour que des décrets d’application puissent être adoptés par le gouvernement de Transition. Toutefois, ces textes n’ont pas atteint une formalisation définitive, car, jusqu’à la passation du pouvoir aux nouvelles autorités issues des élections, les autorités de la transition n’avaient pas signé les dits décrets, pourtant adoptés en Conseil des Ministres. En outre, les démarches auprès des nouvelles autorités pour la résolution du problème n’auraient apparemment pas porté fruit. L’on comprendra alors aisément que c’est lasse d’une situation on ne peut plus confuse, et de tentatives infructueuses afin de la démêler, que la GSP s’est vue obligée de durcir le ton et de manifester son mécontentement par le présent mouvement d’humeur.Cette lutte est donc revêtue d’une légitimité incontestable.

En tout état de cause, cette situation est inconcevable et inadmissible dans un Etat de droit car, d’une part, elle remet en cause un principe cardinal de gestion de l’administration publique, et d’autre part, elle viole des droits des plus fondamentaux à divers niveaux.

Cela est tangible que la GSP est victime du non-respect du principe de la continuité du service public. En effet, les décrets déjà adoptés en conseil des Ministres par le gouvernement de Transition n’ont pas été signés jusqu’à sa passation de charge. L’inertie du gouvernement actuel face à la cause en instance s’apparente purement et simplement à de l’indifférence, voire du mépris ; dès lors que l’on sait avec quelle frénésie et diligence il s’est attelé à régulariser des situations voisines (dans tous les sens du mot). Un comportement d’autant plus inconcevable que les conséquences de la légitime lutte de la GSP touchent directement aux droits des personnes détenues dans les maisons d’arrêt et de correction et dans les cellules de garde à vue de la police judiciaire. Le gouvernement, se trouve ainsi engagé dans la situation de violations de droits des personnes détenues, en attente de déferrement ou de jugement, et subissant des prorogations de détentions, de toute évidence arbitraires. Il en est de même pour les inculpés dans les cabinets d’instruction. Quant aux parties civiles, elles sont toujours en attente de la réparation des préjudices à elles causées. La Police Judiciaire, elle, se retrouve confrontée aux difficultés et angoisses liées au déferrement des gardés à vue. Cette situation qui irrite la conscience des défenseurs des droits humains et des hommes biens et qui rend l’Etat coupable des violations, d’une part des droits du personnel de la garde de sécurité pénitentiaire, et d’autre part, des droits de l’homme consacrés par la constitution et les instruments juridiques internationaux, nous préoccupe et interpelle le gouvernement sur ses propres responsabilités vis-à-vis de tous et de chacun.

Face à cette situation de négation des droits humains et ses corollaires, les syndicats des greffiers réaffirment leur soutien et solidarité à l’ensemble du corps de la garde de la sécurité pénitentiaire, en lutte pour plus de justice à la Justice ; et invitent le gouvernement à prendre en compte diligemment les légitimes préoccupations à lui soumises, pour une reprise effective de toutes les activités pénitentiaires, judiciaires et juridictionnelles.

Ouagadougou, le 25 mai 2016

Syndicat National des Agents de la Justice(SYNAJ) Maître Adama NIKIEMA

Syndicat des Greffiers du Burkina (SGB) Maître Abdoul Aziz KAFANDO

Source: LeFaso.net