Henri Traoré est un produit de Planet champion international. Après cette étape, il a fait les beaux jours du RCB, de l’EFO et du RCK. Il a aussi évolué à l’Ashantigold au Ghana et fait un bref passage au Qatar. En sélection, l’ex défenseur de l’EFO a connu toutes les catégories (cadette, junior, espoir et senior). Il était du groupe pour la CAN 2013 en Afrique du Sud et était l’un des tireurs lors de la séance des tirs aux buts en demi-finale de ladite CAN contre le Ghana. Dans cette interview, il revient justement sur cette CAN, où les Etalons ont terminé vice-champions. Il a aussi donné son point de vue sur la poule des Etalons pour la CAN au Maroc.

Lefaso.net : Comment se porte Henri Traoré ?

Henri Traoré : Henri Traoré se porte bien. Je vais très bien, comme vous pouvez le constater. Je suis là, ça va très bien dans l’ensemble.

Tout comme certains de vos coéquipiers, vous vous faites rare. Quelle est votre actualité ?

C’est vrai que je ne m’investis plus trop dans le football, mais je suis là et j’essaie d’aider mes jeunes frères comme je peux. Souvent, je leur offre des chaussures et autres, pour qu’ils puissent continuer de s’entraîner normalement. Parce que ce n’est pas simple pour tout le monde. Je fais tout cela dans le silence total. Donc, je n’ai pas complètement tourné le dos au football. Je suis toujours dans le milieu. Vous n’êtes pas le seul à me dire que je me fais rare. Je suis là, je suis bien là dans mon coin. J’essaie de faire un peu de tout. Il y a des coachs toujours en activité que je côtoie au quotidien.

En quelle année, avez-vous raccroché les crampons ?

J’ai raccroché définitivement les crampons en 2017. Quand je suis venu du Ghana, je me suis engagé avec le RCK et j’ai participé avec lui à la campagne africaine. Nous avons été éliminés au dernier virage, je crois. C’était contre l’USM d’Alger entraîné par Paul Put. Nous avons été battus en Algérie par le score de 2-0. Au match retour sur nos installations, nous avons a gagné 1-0. Cette victoire n’a malheureusement pas suffi. Nous n’avons pas pu nous qualifier. Après, le RCK s’est déplacé en Tunisie. Là-bas aussi, nous avons perdu notre match, je crois. C’est après cet épisode que j’ai arrêté ma carrière.

Est-ce que vous pouvez revenir sur votre carrière, notamment les clubs dans lesquels vous avez évolué, au Burkina et à l’international ?

Pour ce qui concerne ma carrière au Burkina Faso, j’ai évolué au Racing club de Bobo (RCB) tout jeune. Au fur du temps, j’ai été nommé capitaine du RCB pendant deux saisons. Après, je suis allé à l’Etole filante de Ouagadougou (EFO), entre 2005-2006, ou j’ai été aussi capitaine. Après l’EFO, j’ai fait un passage éclair au Qatar. Eclair, parce que ça n’a pas marché au Qatar. J’ai fait mon retour et j’ai joué quelque temps avec l’AS SONABEL. Je suis ressorti en 2010 pour le Ghana, à l’Ashantigold. J’ai passé cinq ans dans ce club. C’est de là que j’ai été convoqué pour la CAN 2013 en Afrique du Sud. Il faut rappeler qu’avant ma convocation en équipe nationale A, j’ai joué dans toutes les petites catégories. J’ai joué dans l’équipe nationale cadette, junior, espoir, locale. En équipe nationale cadette par exemple, j’étais avec feu Jacques Yaméogo et Pihouri Wébonga. Je dois aussi mentionner que je suis de la première promotion Planète champion international.

Henri Traoré a fait toutes les catégories en sélection

Quelle a été l’année de votre première sélection avec les Etalons A ?

C’était en 2012, lors des préparatifs pour la CAN 2013. Nous avons été en France dans ce cadre. Il faut dire que le coach avait des doutes sur moi. C’est lors d’un match amical contre le Togo d’Emmanuel Adébayor, que j’ai confirmé et enlevé les doutes de la tête du coach. La certitude de participer à la CAN ne faisait plus aucun doute. Après ce match, nous avons aussi joué un match des éliminatoires contre la Centrafrique. Mais contre la Centrafrique, je suis resté sur le banc. J’ai joué un bout de match.

A la CAN 2013, quels sont les moments forts de cette campagne qui vous ont le plus marqué ?

A la CAN 2013, l’émotion était inexplicable. Vous savez, les Etalons ont joué plusieurs phases finales d’une CAN. Il y a eu des CAN aussi où nous n’avons pas pu nous qualifier. Mais celle de 2013, nous avions un groupe prêt, surtout mentalement. Mes coéquipiers l’ont déjà évoqué, mais je me permets de revenir là-dessus. Avant de partir à cette CAN, notre objectif était de gagner au moins cinq matchs. C’est-à-dire, qu’au partait pour jouer la finale. Dans le groupe, on peut affirmer sans risque de se tromper que les joueurs se valaient. On n’avait plus ou moins les mêmes valeurs. C’était ça la force principale de ce groupe. L’équipe était équilibrée. Les places étaient disputées. Même ceux qui étaient sur le banc pouvaient entrer et faire la différence à n’importe quel moment et dans n’importe quel match. Il n’y avait pas de titulaire incontestable. Avant de monter sur le terrain, si je sais que ma doublure est là et est forme et qu’à la moindre erreur, s’il gagne sa chance il la saisira, tu ne peux qu’être concentré à 100%.

La demi-finale contre le Ghana était spéciale pour vous. Vous avez même marqué aux tirs au but contre votre coéquipier en club au Ghana. Parlez-nous un peu de ce match…

Le match de demi-finale contre le Ghana vraiment spécial, particulièrement pour moi. Je considère le Ghana comme mon deuxième pays. En plus, le gardien ghanéen contre lequel j’ai marqué le penalty était mon coéquipier en club. Il était aussi mon voisin parce qu’on était dans le même appartement au Ghana. Beaucoup n’avaient pas cette information. On faisait tout ensemble. On partait aux à entraînements ensemble, dans la même voiture. C’était mon pote. C’était donc, comme vous le voyez, pour moi un défi et il fallait le relever. Un défi qu’on s’était lancé entre nous. J’étais très sûr de marquer. Je connaissais non seulement son point fort mais aussi son point faible. Aussi, je connaissais la mentalité du Ghanéen, de façon générale. Je le voyais aux entraînements, je connais ses qualités mais aussi ses défauts. Quand on est arrivé aux tirs au but, quand je me suis proposé, le coach a tout de suite validé. Beaucoup m’ont d’ailleurs proposé de tirer parce que j’étais un bon titreur. Nous avons fait plusieurs séances de tirs ou j’ai prouvé. Ce n’est pas un hasard. C’est quelque chose que j’ai préparé depuis longtemps. Comme je le disais, nous savons tous ce que nous valons.

Henri Traoré avec le RCK

Quelques années sont passées après la CAN de 2013. Avec du recul quelle analyse faite-vous du groupe ? C’était quoi votre force ?

Comme je l’ai dit dès le départ, notre force, c’était la solidarité. Parce que c’était comme une famille. Nous nous connaissions tous très bien avant le regroupement. Quand on regardait autour de l’équipe, il y avait l’ambiance. C’était vraiment spécial. Par exemple, j’étais la doublure de Mohamed Kofi et Panandetiguiri. Mais quand tu nous voyais, tu ne sentais pas cela en nous. Il y a des matchs, quand un fait une erreur, on essaie de le corriger. Il en est de même quand c’est bon, on se félicitait. J’ai joué par exemple avec Bakary Koné, avec Paul Coulibaly, à l’EFO. On se connaissait tous. On s’est côtoyé beaucoup de fois. Donc, il n’y a pas de problème. A mon avis, cette familiarité a aussi été pour beaucoup lors de cette CAN en Afrique du Sud.

Pour la CAN 2025, les Etalons sont logés dans le groupe E en compagnie de l’Algérie, du Soudan et de la Guinée Equatoriale. Comment trouvez-vous ce groupe ?

Le Burkina Faso a passé un cap en matière de football. Notre football a atteint un niveau encore plus haut. Je suis très confiant qu’on sortira de cette poule sans souci. Et puis, on a un entraîneur de qualité que je connais très bien. J’informe de passage que c’est grâce à lui que j’ai eu ma première licence avec le RCB. Je le considère comme mon papa, c’est d’ailleurs ainsi que je l’appelle. C’est un entraîneur très fort et le groupe regorge aussi d’énormes qualités. Je peux citer Bertrand Traoré, Dango Ouattara, Issoufou Dayo, etc. qu’on voit chaque semaine dans leurs championnats respectifs. Ce sont des petits-frères très talentueux. Il y a aussi Nasser Djiga qui vient de signer en Angleterre. Il y a vraiment de la qualité dans le groupe actuel. L’essentiel, c’est de bien se préparer.

Quel sont vos projets personnels, vos projets pour le Burkina ?

J’essaie, comme je l’ai mentionné plus haut, d’aider les plus jeunes, mes petits frères, pour qu’ils puissent écrire leur propre histoire. Nous, nous avons fait ce que l’on pouvait même si nous ne sommes pas très populaires. Je souhaite le meilleur à mes petits frères. Je souhaite qu’ils puissent continuer d’écrire les belles pages de l’histoire de notre football, surtout faire ce que nous, on n’a pas pu. Je les soutiens comme je peux et dans l’ombre.

Un dernier mot, ou un appel ?

Je dirais un merci à vous déjà, qui avez pensé à remettre le groupe de 2013 en surface. Ça fait déjà 12 ans. C’est déjà une bonne chose parce que ça permet de ne pas nous oublier. Je remercie aussi le public burkinabè pour le soutien dont on a bénéficié quand on était toujours en activité. Je leur demande de continuer à soutenir nos jeunes frères. Je pense qu’il faut s’investir dans la formation. Pour rêver grand, il faut se former. La formation, c’est la base de tout. Former les encadreurs, former les jeunes. Je pense que ça va aller.

Interview réalisée par Obissa Juste Mien

Source: LeFaso.net