Le paludisme est un problème de santé majeur au Burkina Faso. ll est endémique dans tout le pays, avec une poussée saisonnière de juin à octobre. Au niveau mondial, le pays fait partie des onze pays les plus touchés par la maladie. En 2022, le Burkina Faso a enregistré 4 243 décès dont 2 925 enfants de moins de 5 ans, selon le Secrétariat permanent de lutte contre le paludisme. En cette période de saison des pluies, quel comportement adopter pour éviter le paludisme ? Dr Yaro Jean Baptiste, médecin spécialiste en recherche clinique et spécialiste en épidémiologie des sciences biomédicales, nous en dit plus sur cette maladie.
Lefaso.net Qu’est-ce que le paludisme et quelles en sont les manifestations ?
Dr Jean-Baptiste Yaro : De façon générale on dit que le paludisme est une maladie parasitaire, infectieuse transmise à l’homme par la piqûre du moustique appelé anophèle femelle. Ce moustique va déposer dans le sang des humains un parasite qu’on appelle plasmodium. Ce plasmodium peut être distingué de façon diverse en termes de caractérisation d’espèces. On va distinguer essentiellement le plasmodium falciparum qui est l’espèce la plus fréquente que nous rencontrons. On trouve également l’espèce plasmodiale malariée, on trouve également l’espèce plasmodiale ovalée, l’espèce plasmodiale vivax et l’espèce plasmodiale knowlesi. Les manifestations du paludisme dans sa forme très simple sont là fièvre qui est habituelle, les maux de tête qu’on appelle céphalées, les douleurs articulaires, parfois des nausées accompagnées de vomissements ou pas. On peut également, dans certaines situations, avoir des douleurs abdominales et autres. Lorsque le paludisme se manifeste dans sa forme compliquée si l’on n’a pas pu arrêter son évolution dans sa forme simple, le patient va présenter dans nous, notre contexte, des formes majeures anémiques. On peut également avoir des manifestations d’ordre neurologique. On peut avoir des troubles de la conscience, parfois des convulsions. On peut également observer des manifestations de pertes de connaissances etc.
Quelle est la situation actuelle du paludisme au Burkina ?
De façon globale, les efforts des premières autorités à travers le ministère de la Santé et les organes techniques qui ont apporté leur contribution dans le cadre des stratégies combinées pour la lutte contre le paludisme au Burkina, nous observons ces dernières années une grande avancée. Il y a des motifs de satisfaction par rapport aux apports des différents efforts qui ont été réalisés. Mais le paludisme reste encore l’une des infections majeures qu’on rencontre dans nos hôpitaux. On constate malheureusement que c’est la première cause des consultations dans les hôpitaux. C’est toujours la première cause des hospitalisations et c’est encore la première cause des décès. C’est ce qu’on pourrait observer. Mais nonobstant la comparaison des chiffres des statistiques des dernières années, on constate que nous venons de loin. Si par exemple, on compare les données qui disaient que le Burkina Faso fait partie des onze pays où le paludisme est d’autant plus préoccupant, on verra qu’il y a un changement. Parce que ces dernières années, le Burkina Faso tire son épingle du jeu. Nous ne faisons plus partie des quatre pays qui a eux seuls représentent plus de la moitié de la charte du paludisme en Afrique. C’est déjà une grande avancée.
Pensez-vous que le paludisme a régressé en 2023 par rapport aux années antérieures ?
Oui tout à fait. De façon globale même dans le monde on peut constater que l’incidence globale a régressé. Au Burkina Faso, la mortalité globale est en dessous de 1% pour la population. On est encore à la barre de 1% pour les enfants de moins de 5 ans qui sont en fait la population cible la plus affectée. Le nombre global en termes de patients à risque a régressé.
Quel est le comportement à adopter en cas de paludisme ?
Si quelqu’un ne se sent pas bien, c’est conseillé de se rendre dans un centre de santé. Si après examen, la personne est diagnostiquée, ayant le paludisme alors la prise en charge se fait en milieu hospitalier.
Il y a souvent confusion entre paludisme et dengue : comment peut-on les distinguer ?
On entend souvent les gens dire palu-dengue. Alors que ces deux maladies sont totalement différentes. Elles ont des causes différentes. Le paludisme est transmis par la piqûre d’un moustique qui transmet un parasite qui est le plasmodium mais dans le cas de la dengue quand bien même qu’il y a de la similarité, le germe responsable de la maladie est plus un virus transmis à l’être humain par la piqûre d’un moustique appelé Aedes. Il y a des manifestations communes aux deux maladies. De façon générale, les maladies infectieuses ont des symptômes qui peuvent être parfois des signes de confusion. On peut généralement avoir des céphalées, des nausées, des vomissements, des courbatures et autres. Mais il y a des signes distinctifs pour les cliniciens avertis. Si le patient se présente tôt en milieu hospitalier, nous avons donc des caractéristiques bien distinctes qui permettent de faire le diagnostic différentiel.
Peut-on prévenir le paludisme ?
Oui, Les formes de prévention c’est surtout la barrière protectrice qu’on doit mettre en place. On conseille d’adopter des mesures barrières afin d’éviter le contact avec le vecteur essentiel. Il faut assainir notre environnement. Il est conseillé la destruction des différents gîtes larvaires. On peut conseiller des médicaments de prévention. Il faut dormir sous une moustiquaire et utiliser les répulsifs. Pour les enfants de moins de cinq ans, on parle de chimio prévention ou on fait des administrations de manière standard. Mais de nos jours, le secrétariat permanent de lutte contre le paludisme envisage l’extension jusqu’aux moins de 10 ans. Chez les femmes enceintes, il y a également une chimio prévention qu’on appelle le TPI.
Quels conseils avez-vous à donner à la population pour éviter le paludisme en cette période ?
Il est approprié que nous mettions l’accent sur les mesures hygiéniques. Il faut nettoyer votre environnement pour éliminer toutes les sources de développement du vecteur. Éventuellement il faut utiliser les mesures barrières. Le secrétariat permanent de lutte contre le paludisme a pu mettre à la disposition des populations les moustiquaires imprégnées à longue durée d’action. On conseille à la population de dormir sous ces moustiquaires. Il faut porter des vêtements qui réduisent l’espace de contrôle entre le vecteur et le corps. Si toutefois quelqu’un venait à manifester des signes cliniques du paludisme, il est préférable d’éviter les automédications, de se rendre le plus rapidement possible dans les formations sanitaires les plus proches pour bénéficier d’un bon diagnostic et éventuellement d’un traitement approprié.
Interview réalisée par Rama Diallo
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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