Dans cette interview accordée à votre journal Lefaso.net, le président de l’Union des producteurs de riz de Bagrépôle (située à environ 45 kilomètres de Tenkodogo dans la région du Centre-est), Adama Bantango, parle sans langue de bois de la filière rizicole à Bagrépole et des défis auxquels, ils sont confrontés.
Présentez-nous votre union et dites-nous quelles sont les principales difficultés auxquelles font face les producteurs de riz dans cette plaine rizicole de Bagrépole ?
Adama Bantango : Je suis Adama Bantango et je dirige cette union des producteurs de riz depuis 2012 qui regroupe plus 4 000 producteurs répartis en 22 coopératives installées sur la plaine de Bagré (environ 45 kilomètres de Tenkodogo, dans la région du Centre-est). Et sur cette plaine de près 8 000 hectares aménagés, plus de 3 000 sont entièrement dédiés à la riziculture. Nous cultivons plusieurs variétés de riz, mais les plus promues sont la TS2, l’Orilux et le Nerica. Cependant, la production est confrontée à divers défis tels que l’insuffisance de matériel agricole, de main-d’œuvre, la cherté et la mauvaise qualité des intrants, mais le fait aussi que le riz importé domine le marché.
…Justement vous parlez du riz importé, est-ce qu’à vous seuls, vous pourrez combler les besoins des consommateurs ?
Pourquoi, pas ? Bagrépole n’est pas la seule zone de production de riz au Burkina. On en trouve presque partout dans toutes les régions. Si on nous accompagne de façon sincère et qu’on construit d’autres barrages ajoutés à ceux qui existent déjà, on pourra bien sûr combler les besoins des consommateurs.
Mais les consommateurs vous reprochent le fait que le riz local n’est pas toujours de bonne qualité, comparé aux autres riz sur le marché ?
C’est vrai que souvent par manque de moyens et d’expériences, les producteurs n’arrivaient pas toujours à produire dans de bonnes conditions et cela joue aussi sur la qualité du riz. Mais maintenant grâce aux formations et expériences que les producteurs ont eues, ils ont été sensibilisés effectivement à mettre l’accent sur la qualité du riz afin de répondre aux besoins des consommateurs. C’est d’ailleurs dans cette dynamique que maintenant, nous ne produisons plus pour produire. Nous échangeons d’abord avec les commerçants et également avec les consommateurs pour qu’ils disent quel type de riz est bien apprécié sur le marché, avant de produire. Et au-delà de ces aspects, nous les écoutons par rapport aux critiques pour que nous les intégrons dans nos productions.
On vous reproche aussi d’être trop chers… Qu’est-ce que vous en dites ?
(Rire), les consommateurs doivent comprendre que ce qu’ils paient moins cher, c’est du riz pourri, parce que, ce n’est pas un riz de moins de dix ans. Et ailleurs les gens n’en veulent plus et c’est pourquoi on envoie en Afrique pour vendre moins cher. Sinon, le bon riz d’une durée d’une année, le prix d’un kilogramme, c’est minimum 3 200 FCFA et tout le monde ne peut pas acheter ça en Afrique. Alors que notre riz, c’est nouveau et il n’y a pas de produits chimiques. Ils doivent aussi comprendre que ce n’est pas de notre faute, tout est cher, que ce soit les intrants, les engrais, tout est cher sur le marché. Et si vous vous sacrifiez pour faire toutes les dépenses, il faut vendre à un certain prix pour espérer récupérer au moins tes dépenses. Tout cela pour dire que c’est le marché des engrais et des machines qui justifie la cherté du riz sur le marché. Parce que les producteurs ne vendent pas cher parce qu’ils le veulent, ils n’ont pas le choix. Si vous dépensez beaucoup, vous ne pourrez pas venir vendre moins cher, sinon, vous ne pourrez plus reproduire. Mais je pense que tout cela va changer parce que l’Etat a fait des promesses et on aura cette année de l’engrais subventionné et du matériel, et je pense que cela réduira aussi le prix du riz sur le marché. Mais il faut qu’ils sachent aussi que le riz local, quel que soit son prix, est meilleur parce que vous connaissez l’origine, contrairement au riz bon marché, dont on ignore souvent la vraie origine. C’est pourquoi, j’invite les Burkinabè à consommer le riz produit sur place parce que là au moins, on sait ce qui entre dans notre corps et, parce que ce sont nos parents qui produisent et c’est le Burkina Faso qui gagne. Sinon, en consommant le riz importé, en plus de contracter des maladies, vous enrichissez d’autres personnes.
On dit aussi que quand on le cuit, le volume du riz local n’augmente pas…
Si le riz local ne gonfle pas, c’est parce que c’est du nouveau riz et on n’a pas besoin de beaucoup d’eau pour sa cuisson. Ce qui gonfle trop qu’ils achètent là est dû aux produits chimiques et aussi au fait que c’est du vieux riz. Alors que le riz local, c’est chaque année …
Interview réalisée par Yvette Zongo
Source: LeFaso.net
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