Les membres de la Coordination nationale de veille citoyenne se sont regroupés, ce vendredi 28 juin 2024 à quelques mètres de l’ambassade de la France pour réclamer sa délocalisation. A écouter certains membres de la coordination, il s’agit de venir « les déloger purement et simplement ». L’ambassade de la France, à côté de la présidence du Faso, constitue une menace pour le président du Faso, selon eux.

Il est environ 10h30 quand la foule, rassemblée un peu plus loin au niveau du rond-point des Nations unies, commence à avancer en direction de l’ambassade de France, jouxtant la présidence du Faso. Ils passent le premier feu, puis le deuxième. Au troisième feu, juste au croisement, un barrage dressé par la garde présidentielle stoppe l’avancée des manifestants. Sur les côtés, des pickups remplis de policiers de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS). Un groupuscule formé par les responsables de la coordination, avance. C’est parti pour quelques minutes de discutions. « Nous voulons avancer jusqu’à l’ambassade. On ne veut pas qu’un représentant de l’ambassade vienne ici », lance un des leaders au chef d’équipe de la CRS.

Les manifestants en fuite

La foule, massée un peu plus loin, s’impatiente. Et face au refus catégorique de la CRS de les laisser passer, les manifestants forcent la barrière pour contourner le dispositif et rejoindre l’ambassade par le côté droit. « Même si c’est par « la mur », on va rentrer », menace un Wayiyan. Les journalistes qui couvraient la manifestation ont vite compris que la situation allait dégénérer et qu’il fallait faire un « repli tactique » pour mieux réagir au cas où. Avant même qu’ils aient traversé le goudron pour se retrancher vers le ministère en charge de la Sécurité, un ordre sec retentit : « embarquez et chargez ! ». Les gaz lacrymogènes commencent à pleuvoir. L’atmosphère devient irrespirable. C’est la débandade. Wayiyans et journalistes confondus cherchent un refuge ou un point de chute. Les policiers chargent jusqu’au rond-point des Nations unies. « Hayii…ils n’ont qu’à arrêter de gazer comme ça, c’est bon ! », implore juste derrière nous, en langue mooré, une dame âgée, visiblement fatiguée de courir. C’est finalement à la direction régionale de la douane que presse et certains manifestants trouvent refuge pour prendre des forces avant d’aller chercher leurs engins garés un peu plus loin.

Les manifestants bloqués au dernier feu en face de la présidence du Faso

Le pays est gouverné

Lassané Sawadogo, coordonnateur du Front de défense pour la patrie, membre de la Coordination nationale des associations de la veille citoyenne, était de ceux qui se sont retranchés à la direction régionale de la douane. « Nous rendons grâce à Dieu. Je félicite le camarade, le capitaine Ibrahim Traoré. Je félicite l’ensemble de nos gouvernants. Parce que l’acte qu’ils ont posé ce matin nous prouve que le pays est gouverné. Nous sommes les Wayiyans et nous resterons toujours les Wayiyans. Nous avons demandé à l’ambassade de déménager de Koulouba parce qu’elle fait face à la présidence du Faso », déclare-t-il d’un air toujours hagard, avant d’ajouter : « vous savez, on n’a pas demandé une autorisation pour sortir. C’est logique qu’on soit gazés. Parce qu’un pays où les gens n’ont pas d’autorisation de manifester, si l’autorité n’avait pas fait ça, j’allais avoir peur de ce gouvernement », a-t-il philosophé.

« Nous sortirons encore », lance Lassané Sawadogo

La coordination n’a pas dit son dernier mot, à écouter M. Sawadogo. « Si l’autorité et les représentants de l’ambassade ne réagissent pas, nous allons sortir encore, même si nous allons être gazés. L’objectif est que le monde entier sache que ce n’est pas logique qu’une ambassade soit à quelques pas de la présidence d’une nation. Nous allons sortir parce que la puissance du gaz n’est pas plus que la puissance des balles que nos soldats prennent en brousse », a-t-il prévenu.

Obissa Juste Mien

Lefaso.net

Source: LeFaso.net