Les difficultés d’accès à la ville de Diapaga, située dans la province de la Tapoa (région de l’Est burkinabè), ont entraîné une situation de crise alimentaire préoccupante. Depuis la fin du mois de mars, « des gens se nourrissent de feuilles sauvages pour survivre », en attendant les opérations de ravitaillements, selon un déplacé interne ressortissant de la localité, qui s’est confié à Lefaso.net.

Depuis 2015, le Burkina Faso fait face à une crise sécuritaire sans précédent. De multiples attaques perpétrées pour la plupart contre les civils ont occasionné un déplacement massif d’environ deux millions de personnes, des pertes en vies humaines et des fermetures de services sociaux. Parmi les régions les plus touchées du pays figure l’Est. Au 31 janvier 2024, plus de 29 000 nouveaux déplacements y sont signalés. Et le cauchemar perdure. Dans cette localité, durement touchée par les affres des attaques armées, des habitants craignent pour leur survie du fait du manque de denrées alimentaires, la nourriture qui normalement est un droit fondamental et la base d’un bon développement physique et mental de l’homme. Parmi eux, Jeanne Noula (le nom a été modifié pour des questions de sécurité). Elle est arrivée à Diapaga avec sa famille en 2023. Âgée d’une trentaine d’années, elle alerte sur sa condition de vie dans sa localité d’accueil.

« Depuis quelques jours, nous dormons avec la faim », raconte-t-elle. « Il n’y a plus de céréales pour acheter. On tient chaque jour notre argent pour en acheter, mais on n’en trouve même pas. S’il arrive que tu trouves, le plat coûte cher. C’est en raison de 3 500 à 4 000 FCFA. On vit dans un calvaire accru », soutient-elle. Tout comme Mme Noula, S.T. explique avoir été obligé de fuir de chez lui avec sa famille pour se mettre en sécurité à Diapaga, dans un camp des personnes déplacées internes. Il éprouve également des difficultés pour se nourrir. « Ça fait trois jours que je n’ai pas allumé du feu en famille. Les enfants pleurent à longueur de journée sans secours. Aucune solution à notre niveau. On n’a plus d’argent pour oser chercher, à en acheter. Je me rends dans les différents moulins pour ramasser les résidus de farine versée pour pouvoir faire la bouillie pour les enfants. Dans ces deux jours, même dans les moulins, on n’en trouve plus. Puisque les femmes viennent rarement pour moudre », témoigne S.T.

Agir au plus vite

La situation est similaire pour cet autre chef de famille. Il explique qu’il essaie de s’occuper des 15 membres de sa famille depuis leur arrivée à Diapaga. « C’est vraiment compliqué pour nous, ces deux jours. Il n’y a plus rien comme céréales. Ce petit sachet que tu vois coûte 600 francs au marché (cf. photo) de Diapaga. Il y a plus de 15 jours que je suis en train de chercher des céréales avec mon argent, mais je n’en trouve pas », indique N.D qui a fui les attaques terroristes à Partiaga avec sa famille. Il se demande si cette saison, les personnes déplacées de Diapaga pourront repartir chez elles pour cultiver. « La faim nous fatigue plus à Diapaga. On a plus de solutions », conclut-il. A Partiaga, le soja est devenu l’unique produit alimentaire. En plus du soja, les gens mangent les feuilles de certains arbres, notamment le flamboyant et le moringa, rapporte tristement un habitant qui a requis l’anonymat.

Selon l’aperçu de la situation humanitaire mondiale, 6,3 millions de personnes (soit 27% de la population) auront besoin d’aide humanitaire dans les 13 régions du pays, soit une hausse de 35 % par rapport à 2023. Quelque 935 millions de dollars américains seront nécessaires pour répondre aux besoins urgents de 3,8 millions de personnes ciblées (soit 17% de la population) pour recevoir de l’aide. Selon le CH (integrated phase classification-IPC) de mars 2024, 1,7 million de personnes ont besoin d’assistance humanitaire immédiate.

Aïssata Laure G. Sidibé

Lefaso.net

Source: LeFaso.net