Après l’épisode judicaire, le Conseil municipal de la commune rurale de Pabré, située à une vingtaine de kilomètres au nord de Ouagadougou, fait de nouveau parler d’elle. En effet, une partie des élus locaux, en l’occurrence ceux du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP, ont décidé de subordonner leur participation aux sessions à un audit préalable sur les lotissements. Les intéressés ont porté cette décision à la connaissance de l’opinion par une conférence de presse tenue samedi, 20 août 2016 à Pabré.

« Nous, conseillers municipaux MPP de la commune rurale de Pabré, en accord avec les populations que nous représentons, avons décidé de surseoir à toute participation aux sessions du conseil municipal de Pabré », ont-ils informé. Par cette démarche, les conférenciers disent exiger un audit sur les lotissements effectués dans la commune. « Ces lotissements sauvages ; souvent sans délibération en session du conseil municipal conformément aux textes en vigueur en la matière, ont engendré des frustrations, des divisions et des tensions au sein de nos populations. Ces tensions et divisions menacent gravement la cohésion sociale dans la commune, socle de tout développement », justifient-ils.

« Cette décision vise à interpeller les autorités car, avec ce qui s’est passé dans notre pays, les populations ont cru au changement. C’est-à-dire tout le monde s’attendait à ce que tout change dans le bon sens. Nous ne pouvons pas imaginer qu’après l’insurrection, le désir de changement manifesté par les populations ne soit pas traduit sur le terrain. Nous croyons à nos autorités, nous croyons à la démocratie. Nous n’osons donc pas penser un seul instant que la lumière ne soit pas faite sur les cas évoqués », a situé le porte-parole des conseillers Christophe Ouédraogo. Il précise au passage que leur initiative n’est nullement à mettre en rapport avec l’action en justice qui avait été initiée (voir lien au bas de l’article).

« Ça, c’était uniquement pour contester la régularité du scrutin. (…). La direction politique (du MPP) n’est pas mêlée à nos actions ; ça, c’est nos actions parce que ce n’est pas un problème politique, c’est un problème social. Mais, nous pensons aussi que notre direction politique est-là pour le bien-être des populations….On veut dire non à l’impunité. La tension sociale est réelle et nous sommes en train de tempérer les populations, mais jusqu’à quand ? Si le bouchon lâche, nous ne serons pas responsables de ce qui peut advenir », a dit M. Ouédraogo, expliquant que l’équipe actuelle est celle qui a dirigé la mairie depuis près d’une dizaine d’années.

A l’en croire, les populations ont maintes fois manifesté leur désapprobation face à ce qu’il a qualifié de gestion gabégique des lotissements par le conseil municipal sous protection politique. Les conférenciers soutiennent que cette même équipe a été interpellée par la gendarmerie de Boulmiougou « sur sa gestion chaotique » des lotissements.

« Appâter les honnêtes citoyens avec les projets de lotissements fictifs afin de leur extorquer des fonds était en vogue sous le règne de l’administration du conseil municipal antérieur. Plusieurs milliers d’honnêtes citoyens (rongeant certainement leurs freins mais jusqu’à quand, tiendront-ils ?) détiennent toujours par devers eux des quittances délivrées par la mairie, communément appelées chemises dans le vocabulaire local, depuis 2007, sans espoir de voir un millimètre carré de terrain loti leur revenir un jour dans la commune », affirment les conférenciers, ajoutant que sous la transition, le conseil a poursuivi un « lotissement clandestin » dans les villages de Saabtenga et de Bendatoega, malgré l’arrêt des opérations de ce genre. « Nous nous interrogeons légitimement sur le rôle qu’a bien pu jouer le préfet PDS (président de la délégation spéciale) de Pabré en son temps ( ?) », poursuivent-ils.

A en croire Gabriel Zaongo, des populations résidentes sont expropriées de leurs terres habitables et cultivables sans aménagements. Il affirme que la vente des parcelles sous la transition a servi à financer la campagne électorale de l’équipe actuelle avec en sus, la corruption électorale et des promesses de parcelles. Pour les conférenciers, il ne s’agit pas d’une démarche contre des individus, il s’agit simplement de défendre la justice sociale et des valeurs de gestion transparente.

« L’ancienne équipe communale étant revenue à la direction actuelle de la mairie par le truchement de cette corruption électorale à ciel ouvert, nous, conseillers MPP, dont la vision du développement se fonde entre autres sur les valeurs de transparence, de justice sociale et du devoir de redevabilité vis-à-vis de nos populations, et face à ces graves dérives de la mal gouvernance locale, exigeons que la lumière soit faite sur la gestion communale antérieure, en particulier en ce qui concerne les lotissements, avant toute participation aux sessions du conseil communal actuel. Cela sera, pour les braves populations de Pabré qui nous ont mandatés, la preuve d’une bonne disposition au changement positif et à la rupture avec les anciennes pratiques décriées, dans l’intérêt des administrés pour un développement local réel, durable, juste et équitable », a conclu Gabriel Zaongo, pour qui, il faut cet audit pour « désamorcer les tensions vives latentes » au sein des populations.

En rappel, la circonscription électorale de Pabré compte 44 conseillers municipaux et à l’issue du scrutin du 22 mai dernier, le MPP a obtenu 19 conseillers ; 21 pour le CDP ; trois pour Le Faso autrement et un pour l’UPC.

Oumar L. OUEDRAOGO

Lefaso.net

Source: LeFaso.net