Le philosophe Lazare Ki-Zerbo est lauréat de l’« Arikana Excellence Award ». C’est un prix d’excellence décerné par l’African Diaspora Development Institute à ceux qui auront fait montre d’un engagement et d’un dévouement exceptionnels envers la communauté panafricaine. Avant de recevoir son prix le 29 septembre 2023, le fils de l’historien burkinabè Joseph Ki-Zerbo, professeur de philosophie à Nouméa (Nouvelle-Calédonie), membre fondateur du Centre international Joseph Ki-Zerbo pour l’Afrique et sa Diaspora-N’an lara an sara (CIJKAD-NLAS) et de Dialogue sans frontières, s’est confié à Lefaso.net. Il explique notamment le sens de son engagement pour la cause du panafricanisme.
Lefaso.net : L’African Diaspora Development Institute (ADDI) créé par l’Ambassadeure Arikana Chihombori-Quao basé à Washington DC a décidé de vous honorer du « Arikana Excellence Award ». Cette distinction vient couronner votre engagement exceptionnel au sein de la communauté panafricaine ; pouvez-vous nous parler un peu des activités que vous menez au titre de cet engagement ?
Lazare Ki-Zerbo : Bonjour et merci de m’ouvrir de nouveau vos colonnes. Notre dernier entretien s’était terminé par ce souhait : « Le traité révisé du Liptako-Gourma et la convention de l’Union africaine sur la coopération transfrontalière sont des bases à approfondir et même à dépasser dans le sens de la supranationalité ». Cinquante ans après la création du CILSS, l’Alliance des Etats du Sahel représente un sacré espoir !
Je dédie ce prix Arikana aux victimes du terrorisme, aux déplacés, à celles et ceux qui donnent leur vie pour la patrie, aux travailleurs, aux patriotes qui assument l’héritage du fédéralisme panafricain, à mes parents et à tous ceux qui me sont chers. Je remercie au passage l’Ambassadeure Arikana et son équipe pour cet hommage. Après la publication, avec Jean-Jacques Ngor Sène, de l’ouvrage collectif « L’idéal panafricain », une notion devenue beaucoup plus visible aujourd’hui, j’ai choisi de m’investir dans le Mouvement fédéraliste panafricain (MFPA) dont je suis sous-secrétaire général pour l’Europe. C’est une initiative centrée sur la naissance des Etats africains unis d’ici 2030. Un comité national existe au Burkina Faso. Je suis également facilitateur au sein d’un Haut conseil panafricain de la sixième région ou diaspora africaine, sur l’initiative de la sœur Barryl Biekman (Surinam/Pays-Bas), un leader international du Mouvement pour les réparations.
Cette initiative panafricaine a commémoré le 11 juillet dernier à Maputo, le 20e anniversaire de la Résolution 3q de la Charte de l’Union africaine consacrant la reconnaissance de la diaspora. Enfin, je participe assidument à Dialogue sans Frontières et anime le Centre international Joseph Ki-Zerbo pour l’Afrique et la Diaspora- N’an laara an sara avec des personnalités telles que l’écrivain Emmanuel Ndongala, le professeur Noël Magloire Ndoba, Mariana Gino, et bien d’autres.
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Aujourd’hui, le panafricanisme semble être revenu à la mode ; vous qui avez beaucoup écrit sur la question, comment appréciez-vous ce regain et les combats qui sont aujourd’hui menés au nom de cette idéologie ?
Les engagements que je viens de citer s’inscrivent dans la continuité de mon combat pour le panafricanisme concrétisé dès 1988 au sein du Comité d’initiative pour le fédéralisme en Afrique noire (CIFAN), ou ma participation à de nombreux congrès panafricains. Il ne s’agit pas que d’un combat intellectuel, encore moins d’une mode, mais d’une dimension essentielle de notre lutte collective de libération, depuis plusieurs générations. Il est donc nécessaire que les plus jeunes, qui s’engagent aujourd’hui, certains héroïquement, aient une claire conscience historique et démocratique, à la hauteur des enjeux, sinon ce ne serait qu’un feu de paille.
En outre, être panafricaniste c’est d’abord reconnaître et accepter le pluralisme, l’ouverture démocratique, le non alignement, sans lesquels la volonté d’union (Ubuntu) n’aurait aucun sens. Tirons les leçons du passé. Au-delà de cette opinion publique, la question est devenue affaire d’Etat, comme en Afrique de l’Est également où le Kenya, la Tanzanie, l’Ouganda maintiennent la flamme du fédéralisme panafricain.
Le défi à ce niveau sera d’articuler de façon optimale la culture démocratique burkinabé, fruit d’énormes sacrifices, et l’exigence patriotique d’une transformation radicale de l’intégration africaine, dans le sens d’une Fédération réellement souveraine, démocratique, beaucoup plus puissante et prospère que les Etats existants.
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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