Toujours au titre de témoin, a comparu en cette soirée du 29 juin 2023, le Directeur adjoint au siège du Nouveau temps pour la démocratie (NTD), Amidou Derra. Commerçant de son état, le sieur dit avoir bénéficié d’un contrat pour la confection de gadgets au profit du parti. Qui est-ce qui l’a contacté et comment s’est faite la commande à cette époque, le temoin situe sans langue de bois le tribunal sur son niveau d’implication dans l’affaire.
« J’ai été contacté par un camarade du parti, en la personne de Jean Gabriel Séré. Il s’agissait d’une commande d’imprimerie et il m’a dit qu’il m’appelle de la part du président du parti, Vincent Dabilgou. Je précise au passage que je n’ai pas appelé le président pour confirmer. C’était des gadgets qui comportaient le logo du parti. Pour ce qui est des commandes, il y en a qui sont faites de façon particulière. D’autres sont faites par le parti. Mais dans ce cas précis, c’était une commande faite par Jean Gabriel Séré. J’ai été payé par chèque à hauteur de 3 600 000 fcfa, plus précisément le 30 janvier 2020, à 11h07. » Voilà la version des faits du témoin à la question du procureur de savoir qui l’a contacté et comment son contrat a-t-il été réglé.
Des faits que Jean Gabriel Séré ne niera pas, précisant toutefois au passage qu’il a plutôt utilisé le terme ministre et non celui de président. « A cette période là, on ne pouvait pas savoir qui serait candidat et qui ne le serait pas » justifie t-il.
Pour Me Marcelin Ziba, conseil du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC), le témoin manque de cohérence car, de ses propos, il ressort qu’il a été payé par chèque, alors que les procès-verbaux révèlent qu’il a aussi été payé en espèces. Toute chose qui l’emmène à poser la question suivante au témoin : « Quand vous avez reçu le chèque il avait été émis par qui ? » En réponse à cette question, Amidou Derra remet en cause le fond des procès verbaux de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption (ASCE-LC).
« Déjà quand on vous prend en question d’une période à une autre, vous ne pouvez que dire ce qui s’est passé pendant la période concernée. Je ne sais pas si vous le savez, mais quand on vous dit que l’ASCE-LC vous appelle, c’est comme si vous avez des problèmes. Les choses ont été mélangées là-bas. On m’a pris en interrogation pendant 15 minutes avant que je ne sache de quoi il est question. Ils m’ont demandé comment on me paie pour mes prestations et j’ai dit que je peux être payé par chèque mais aussi en espèces. Pour ce qui est de ce cas précis, j’ai été payé par chèque. Mais dans d’autres cas, à la même période, j’ai été payé en espèces.
Mais ce n’est pas de ça on parle. Vous me demandez aussi qui a émis le chèque. En bon commerçant, quand tu prends un chèque, tu cherches l’argent ou bien tu cherches ce qui est écrit dessus ? Moi je suis commerçant je cherche mon argent. On est nombreux à faire ce que je fais. Je devais donc m’exécuter vite avant que le marché ne me soit retiré. J’ai eu mon argent pour nourrir ma petite famille, je suis content. C’est mon gain que je cherche. Mon souci quand on me dit que j’ai un chèque, c’est de savoir si le montant est exact. Vous même qui êtes là, là,c’est pour l’argent que vous me posez des questions. Ou bien ? » dira t-il dans un style hilarant.
Reprenant la parole, le procureur dit ne pas comprendre pourquoi celui-ci n’a pas vérifié si la commande était bel et bien ordonnée par le ministre ou pas. A cette question, M. Derra répondra : « vous me posez une question, mais je vais répondre en vous posant une autre question. Je suppose que c’est le bâtonnier qui est le supérieur ici, si tout de suite on vous dit que le bâtonnier a dit de faire quelque chose, vous allez faire où vous n’allez pas faire ? »répondra t-il avant que la salle n’éclate de rire.
L’audience reprend le vendredi 30 juin 2023 au Tribunal de grande instance.
Erwan Compaoré
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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