Cette troisième journée d’audience (23 juin) sur l’affaire dite « appel à incendier le palais du Mogho Naaba » a été celle de confrontations des prévenus avec les contenus de leurs conversations. Entre déballements de la partie poursuivante et contre-attaques des prévenus, le mercure monte parfois entre parquet et avocats, le tribunal, lui, calme le jeu en rappelant : « chacun joue son rôle ».

Parmi les messages qui ont suscité de vifs commentaires, celui-ci de Alain Traoré alias Alain Alain : « Ce capitaine est … (nous nous abstenons de reprendre ici) et sanguinaire ».

L’auteur du message reconnaît le message. Il explique ensuite que c’est une conversation privée, qu’il n’a jamais voulu rendre publique. En clair, pour Alain Alain, le message n’aurait jamais été public, si le procureur ne l’avait pas brandi. « Celui qui rapporte les injures du chef au chef , c’est lui qui l’a injurié, comme le dit un adage mooré. Et comme c’est le procureur qui les a rapportés, c’est lui qui a injurié, ce n’est pas moi. (…). D’ailleurs, je crois avoir bien écrit ceci : ‘’ce capitaine est … et sanguinaire ». Mais vous remarquerez également que je n’ai pas précisé quel capitaine ? C’est le Parquet qui fait allusion au président », argue le prévenu.

Dans une réponse du berger à la bergère, et comme par parallélisme de forme, le procureur renvoie au prévenu, cet adage : « le jour de l’accouchement, il n’y a pas de honte ». Une passe d’armes qui arrache des acquiescements et rires dans l’auditoire.

La partie poursuivante évoque le contexte et d’autres messages pour revenir à la charge. Comme cet échange entre le prévenu et l’activiste Naïm Touré : « Il faut que ces gars tombent. Rien ne peut empêcher cela. Ça va péter. Vivement, que ça pète ». Pour Alain Alain, ces propos sont une « opinion » personnelle dans l’appréciation de la situation nationale. Il estime d’ailleurs qu’aucun contexte n’interdit d’opiner. « Je peux vouloir que ça pète, mais ne pas avoir les moyens de le faire », soutient Alain Traoré.

« Ce sont des faits, ce n’est pas une opinion », réfute le ministère public, qui met en lien les propos avec le ‘’mode opératoire » décliné par Abdoul Karim Baguian dit Lota et qui consiste entre autres à mobiliser des jeunes dans les quartiers, dégager les pro-russes, brûler des pneus dans les carrefours, etc. Cette argumentation du parquet est combattue par Lota, pour qui, ce ‘’mode opératoire » n’a pas été suivi d’actes.

Toujours au titre des échanges, on peut retenir … : Aminata Rachow à Pascal Zaïda : « Grand frère, on ne comprend pas vos silences actuellement ». Réponse de Zaïda : « On travaille ma sœur ». Aminata Rachow : « Mais on ne voit rien, personne ne parle ». M. Zaïda : « Quand on va démarrer, ça sera film fin. On connaît leur stratégie ».

Plus loin dans son commentaire relatif à son message « Ce capitaine est … et sanguinaire », Alain Alain a expliqué avoir utilisé le terme « sanguinaire », en prenant au mot le président de la transition. Il rappelle en effet qu’à son arrivée, le président de la transition a, au cours d’une de ses sorties, déclaré que lorsqu’il entend qu’un Burkinabè est tombé, il a envie de prendre son véhicule et aller sur le terrain. D’où son incompréhension vis-à-vis du silence du président face à des massacres. « J’ai eu trop mal », déclare Alain Alain, ajoutant qu’il estime dès lors que le président de la transition est ‘’capable de sacrifier tout le monde pour son pouvoir ».

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Source: LeFaso.net