L’Institut supérieur des sciences de la population (ISSP) a abrité une conférence publique sur la mise en œuvre des politiques publiques au Burkina Faso, le jeudi 25 novembre 2021 à Ouagadougou. Durant deux heures d’horloge, les conférenciers ont fait le diagnostic de ces politiques publiques. Il est ressorti des différentes communications, une insuffisance du contrôle citoyen, ce qui constitue un handicap majeur dans la mise en œuvre de ces politiques dites publiques.
Ils sont trois orateurs, issus du milieu de l’enseignement, qui se sont prêtés à cet exercice dans la salle de conférence de l’Institut supérieur des sciences et de la population (ISSP). Ce sont Alain Siri, secrétaire permanent du Plan national de développement économique et social (PNDES), Séni Ouédraogo, chef du département de la qualité de l’éducation de base et Dr Bilampoa Gnoumou, enseignante à l’ISSP. C’est une conférence qui s’inscrit dans le cadre du projet « Valorisation et diffusion des connaissances pour un plus grand impact des politiques sociales au Burkina Faso ».
C’est pourquoi le bal des communications a été ouvert avec une présentation de ce projet par Dr Bilampoa Gnoumou. Elle a indiqué que le projet, en organisant cette conférence, vise à renforcer le contrôle citoyen sur la gestion des finances publiques ainsi que les capacités d’analyse des finances publiques, économiques et statistiques. Tout en soulignant que le projet est une initiative de l’ISSP, elle a laissé entendre que les principales cibles sont les organisations de la société civile, les médias et les centres de recherche. Et cela, pour leur permettre d’assurer un contrôle citoyen.
L’insuffisance de contrôle citoyen des politiques publiques, dira-t-elle, a considérablement joué en défaveur d’importants projets de développement.
- Dr Bilampoa Gnoumou a salué le public pour l’intérêt accordé à la conférence
C’est donc pour trouver une parade à cette problématique que l’ISSP a entrepris cette démarche. « Tout est parti du constat de mauvaises élaborations de politiques publiques. Nous avons aussi constaté que les données utilisées dans le processus d’élaboration et même de gestion de ces politiques ne sont pas toujours de bonne qualité, elles ne sont pas toujours à jour et ne s’adaptent donc pas aux réalités du contexte du moment », a-t-elle souligné, ajoutant qu’il y a souvent un déphasage entre les problèmes et les stratégies développées. Pour elle, l’étude de base constitue le socle de la mise en œuvre des politiques publiques. Malheureusement, déplore-t-elle, il y a très peu d’études de base pour soutenir l’élaboration des politiques publiques.
« De 1960 à 2015…. la mise en œuvre de nos politiques publiques ont été financées par des partenaires étrangers »
« Les grandes étapes du processus de mise en œuvre de la politique sectorielle de l’éducation et de la formation de 2017-2020 ». C’est l’intitulé de la communication de Séni Ouédraogo, chef du département de la qualité de l’éducation et de la formation au sein du ministère de l’Education nationale. A travers cette thématique, Séni Ouédraogo dit avoir choisi parmi tant de secteurs un exemple de mise en œuvre de politique publique. L’étude englobe tous les ordres d’enseignement, du préscolaire à l’enseignement supérieur en passant par celui professionnel. « Dans cette étude d’élaboration de politiques, il était question de l’implication des acteurs et des partenaires à tous les niveaux pour une démarche réussie de politique sectorielle », résume-t-il.
- Séni Ouédraogo a plaidé pour un grand suivi citoyen dans la mise en œuvre des politiques publiques
Tout comme son prédécesseur, il a dénoncé une « insuffisance du contrôle citoyen » dans la mise en œuvre de ces politiques. « On vous dit que tous les acteurs sont associés, mais c’est dans la mise en œuvre que vous allez vous rendre compte que ce n’est pas le cas », a-t-il relevé, avant d’égrener les principales difficultés qui frappent le système éducatif burkinabè.
A l’entendre, ce système était en manque de compétences avant l’élaboration de la politique sectorielle de l’éducation et de la formation qui couvre la période 2017-2030. Notre système éducatif, depuis la colonisation jusqu’en 2015, poursuit t-il, a formé des diplômés et non des praticiens. « Lorsque vous vous retrouvez dans une salle, la grande majorité se présente comme étant titulaire de tel diplôme. Mais de façon pratique, lorsqu’on demande qu’est-ce que tu sais faire ? C’est là que le balbutiement commence », a-t-il lancé avec ironie, provocant le sourire chez les participants.
- Une modeste mobilisation autour de la conférence
A en croire le conférencier, l’étude sectorielle de cette politique a permis de relever cette grande insuffisance. C’est désormais mentionné comme un défi dans l’écriture de la politique, a-t-il déclaré. L’autre défi aussi, c’est la mobilisation de ressources endogènes pour les financements des différentes politiques. « Les analyses macro-économiques ont démontré que toutes les grandes politiques qui avaient été mises en œuvre de 1960 à 2015, étaient essentiellement financées par des partenaires techniques et financiers étrangers », a-t-il relevé, en mentionnant la nécessité de la mobilisation de ressources endogènes. « On a dit que 80% des ressources mobilisées pour le financement sont endogènes, mais on a constaté le contraire dans la mise en œuvre », a-t-il soutenu.
PNDES 2, un autre exemple de politique publique
Le secrétaire permanent du PNDES, Alain Siri, a axé sa communication sur la mise en œuvre du PNDES 2, le référentiel national de développement. Il a éclairé la lanterne du public sur la notion de politique publique avant d’aborder la problématique du PNDES. Selon lui, une politique publique est définie comme étant un ensemble de mesures prises ou d’intervention d’une autorité investie de puissance publique ou de légitimité en vue d’agir dans un domaine spécifique de la société ou du territoire pour résoudre un problème public.
- Alain Siri a exposé sur l’expérience du PNDES
Le PNDES 2 en est un exemple dans ce cas, a-t-il expliqué. Tout en rappelant la nécessité du contrôle citoyen dans la mise en œuvre de ces politiques publiques, il laissé entendre que le PNDES 2 a suivi un processus plus rigoureux. Après l’adoption du processus de reformulation en 2020, plusieurs démarches ont été entreprises pour aboutir à son adoption en conseil des ministres. Ces démarches ont consisté à identifier les défis avec les différents acteurs.
Pour lui, plusieurs difficultés ont émaillé la mise en œuvre du PNDES. Il s’agit de difficultés d’ordre sécuritaire, de la fronde sociale, de la faible mobilisation des ressources (82% des ressources mobilisées) et de la pandémie liée au coronavirus. Toutefois, il a indiqué que l’expérience du PNDES interpelle les différents acteurs sur la considération de certains aspect essentiels dans la mise en œuvre des politiques publiques.
Le projet « Valorisation et diffusion des connaissances scientifiques pour un plus grand impact des politiques sociales au Burkina Faso » est porté par l’ISSP et financé par l’Union européenne. L’objectif est de sensibiliser les différents acteurs à la veille citoyenne au niveau des politiques publiques.
Serge Ika Ki (stagiaire)
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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