Le Haut conseil pour la réconciliation et l’unité nationale (HCRUN) a échangé, ce vendredi, 13 septembre 2019 à Ouagadougou avec les militaires radiés et fonctionnaires de police révoqués suite à la mutinerie de 2011. A l’ordre du jour, le décret portant octroi d’une aide spéciale à la réinsertion sociale des militaires radiés et des fonctionnaires de police révoqués suite à la mutinerie de 2011.
Le 7 août 2019, le gouvernement burkinabè a adopté un décret portant octroi d’une aide spéciale à la réinsertion sociale des militaires radiés et des fonctionnaires de police révoqués suite à la mutinerie de 2011. Ledit texte fixe à 1 500 000 F CFA, le montant pour les radiés ayant subi des peines privatives de liberté, c’est-à-dire reconnus coupables devant les institutions judiciaires et à 3.500.000 F CFA pour les radiés acquittés, relaxés et autres. Outre l’aspect pécuniaire, il est donné la possibilité à ceux qui le désirent de bénéficier d’une formation dans un centre de formation professionnelle.
C’est autour de cette information que les responsables du HCRUN ont échangé avec les intéressés.
Ainsi, après les propos introductifs du président du HCRUN, Léandre Bassolé, et la présentation du contenu dudit décret, la parole a été donnée aux participants. Là, certains ne sont pas allés du dos de la cuillère.
« La décision n’est pas de notre goût. On n’est pas d’accord. Jusqu’à demain, on n’est pas d’accord avec cette décision (décret, ndlr). Nous n’allons jamais accepter cette proposition. Je demande aux policiers de quitter la salle », a lancé, à son tour d’intervention, Arnaud Francis Kinané, chargé de communication des 136 policiers radiés. Un appel qui a été suivi par la majeure partie des participants. Miliaires comme policiers. Ces mécontents rejettent avec force, le décret du 7 août 2019 et s’interrogent sur ce qu’est devenue la proposition du HCRUN de les réinsérer dans la fonction publique.
‘’Chacun de nous paiera le prix de ce qu’il a semé. Vous les autorités, vous n’aimez pas la vérité. Vous n’êtes pas venues pour servir les populations, vous êtes venues vous servir. Si je ne gagne pas à manger, je viendrai vous arracher ce que vous avez. J’en suis capable et je le ferai. Ce n’est pas seulement dans notre cas que les autorités déplacent les problèmes au lieu de trouver des solutions, c’est avec tous les Burkinabè. Vous nous proposez d’autres métiers, pourquoi voulez-vous nous imposer un travail ? Si je voulais faire la maçonnerie, depuis le bas-âge, je l’aurais fait. Nous avons choisi d’être dans l’armée, pourquoi voulez-vous nous imposer un autre métier en nous ramenant en arrière », s’est plaint cet intervenant.
« Moi, j’ai 23 ans de service ; j’ai été recruté en 1988. Je suis un sous-officier de l’armée. On m’a fait partir sans jugement. On ne m’a interpellé ni à la gendarmerie ni à la justice. Ce que je veux demander, vu mon âge, est-ce qu’on peut me faire gagner tous mes droits ? Les 3.500.000, c’est bon, mais ce n’est pas bon. Il faut qu’on dédommage les gens. Les 3.500.000, je ne prends pas. Je veux qu’on me donne mon droit normal, parce que quand on fait partir quelqu’un innocemment, on doit le dédommager. Normalement si je devais partir à la retraite, on devait calculer mes droits me remettre », témoigne un autre intervenant dans un ton d’agacement.
« On parle toujours de vérité, justice et réconciliation. Où est vérité et où est justice dans notre dossier ? », s’interrogent également d’autres, pour qui, le HCRUN est en train de filer le mauvais coton. Certains parmi ces mécontents estiment d’ailleurs que le président du HCRUN doit rendre le tablier pour « préserver sa dignité », car ayant échoué. De leur avis, en abandonnant sa proposition (de les réinsérer dans la Fonction publique) pour le décret du 7 août 2019, le premier responsable du HCRUN se laisse aller au gré des ordres.
Si cette position de rejet du décret semble être ‘’largement » partagée, on note que certains intéressés lui sont favorables. « L’armée n’est pas la seule porte de sortie. Ce qu’on nous propose-là, on n’a qu’à prendre. Nous on a besoin de cet argent, même si c’est 5 francs, moi je vais signer et prendre. Il y a des gens qui nous soutiennent depuis que nous sommes dans ce problème. Vont-ils continuer à nous soutenir s’ils apprennent que nous avons refusé de prendre cet argent ? », suggèrent pour leur part, ces intervenants. Ceux-ci ont d’ailleurs félicité le HCRUN pour le travail abattu, aboutissant à cette proposition.
Pour sa part, le président du HCRUN, Léandre Bassolé, a, dans un ton calme et apaisé, expliqué à ses interlocuteurs que la mission de l’institution s’inscrit dans un cadre global (5065 dossiers à traiter) avec comme objectif à terme, la réconciliation de tous les Burkinabè.
« Nous comprenons la situation. Le fait que l’accent ait été mis sur l’aide à la réinsertion sociale devrait être salué. Je rappelle qu’une des préoccupations à laquelle on était très sensible, c’est la question des familles des uns et des autres. (…). Ceux qui les trouvent acceptables, les acceptent, ceux qui ne les trouvent pas acceptables peuvent les rejeter. Nous ne les contraignons pas. Si vous refusez, nous prenons note que vous ne faites plus partie des 5 065 dossiers », a expliqué Léandre Bassolé, pour qui, le HCRUN n’est l’avocat ni des radiés ni du gouvernement.
A en croire le premier responsable du HCRUN, le paiement des indemnisations devra débuter dans la première semaine d’octobre 2019.
OHL
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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