Les 20 et 21 juin dernier, le Groupement des éditeurs de presse publique de l’Afrique de l’Ouest (GEPPAO) a organisé un forum sur la sécurité et la lutte contre le terrorisme dans la zone de l’Union économique et monétaire ouest -africaine (UEMOA). Réunis à Ouagadougou, les professionnels et les autres acteurs de la lutte ont échangé sur le rôle des médias.
« Le rôle des médias dans la lutte contre le terrorisme en Afrique de l’Ouest : entre contraintes sécuritaires et devoirs professionnels ». C’est sous ce thème que le Groupement des éditeurs de presse publique de l’Afrique de l’Ouest (GEPPAO) a organisé son forum de haut niveau.
Ce thème a fait l’objet de la première conférence dudit forum sous la modération de Venance Konan, président du GEPPAO, par ailleurs directeur du groupe de presse publique ivoirienne « Fraternité matin » et Dr Aïchatou Mindaoudou, juriste et ancienne ministre des Affaires étrangères du Niger.
Dans sa communication, Dr Aïchatou Mindaoudou a rappelé que les attaques terroristes de nos jours ne doivent pas être considérées comme visant une seule nation, mais elles interpellent tout le monde. Et d’ajouter que ce forum initié par le GEPPAO doit faire école, car chaque composante de nos sociétés doit définir son rôle et apporter sa contribution dans la lutte contre ce fléau qui menace l’existence des Etats et l’aspiration légitime des populations à vivre dans la paix.
Pour Dr Aïchatou Mindaoudou, la montée de l’extrémisme violent a pour corollaire une aggravation des tensions et une amplification des actions politiques, qui profitent de la situation pour opposer les citoyens afin d’obtenir une grande audience. « Ces situations interpellent les médias qui doivent éviter d’entretenir la division, la haine entre les différentes composantes de la société », a-t-elle précisé.
La liberté d’expression donne-t-elle le droit de tout dire ?
Lorsque le travail du journaliste profite à la propagande terroriste en amplifiant le climat de terreur et d’insécurité ou en diffusant des informations sensibles en matière de sécurité nationale, l’on est en droit de se demander si la liberté d’expression donne le droit de tout dire, de tout écrire, de tout diffuser, de tout dessiner. C’est par cette interrogation que la conférencière a ouvert le débat.
Avant que les participants ne puissent apporter leurs avis, Dr Aïchatou Mindaoudou a donné le sien. « A mon avis, la réponse est négative. Le journaliste n’a pas le droit de tout dire, tout écrire et tout diffuser », a-t-elle affirmé.
Pour soutenir sa position, elle a laissé entendre qu’en matière de sécurité nationale et de terrorisme, elle ne pense pas que les sociétés [africaines] soient assez solides pour pouvoir supporter « la diffusion de n’importe quelles informations ».
- Dr Aïchatou Mindaoudou
Avis partagés
Partageant le même avis que la conférencière, l’expert en communication de crise et ancien journaliste malien, Hamadoum Touré, a insisté sur la formation des journalistes afin de les protéger des attaques terroristes et leur permettre de donner l’information qui tienne compte des réalités de la communauté.
Quant à Azize Dabo, responsable politique, il a salué la qualité de la réflexion avant de regretter l’absence des « lanceurs d’alerte » à ce forum.
« Lorsque le marabout prédit la mauvaise saison des pluies, il est également touché au moment venu », a caricaturé le modérateur de la séance, Venance Konan, pour faire référence aux œuvres des journalistes.
Pour conclure, la conférencière s’est résumée en citant l’UNESCO dans son manuel pour les journalistes : « Savoir où placer le curseur entre la liberté et la responsabilité d’informer, entre le droit de savoir et le devoir de protéger, et ce, dans le respect des valeurs et normes fondamentales du journalisme ».
Cryspin Masneang Laoundiki
LeFaso.net
Recommandations
Au regard des insuffisances décelées au cours des échanges, les participants à ce forum ont fait des recommandations.
A l’endroit des médias, ils les chargent de créer des espaces d’information, d’éducation et de sensibilisation sur le vivre ensemble et de travailler à la spécialisation des journalistes reporters au traitement de l’information sécuritaire.
Pour les gouvernants, il est leur demandé de faciliter le travail des journalistes en renforçant leurs capacités d’intervention sur le terrain et de développer la confiance en valorisant les médias nationaux et en instaurant un climat de confiance entre les acteurs de la lutte.
Quant aux institutions de la sous-région, le forum leur recommande de travailler à renforcer les capacités d’action des journalistes à travers l’équipement et la formation. Elles doivent également développer avec les membres du GEPPAO des projets et programmes éducatifs dans les domaines de la paix et de la sécurité.
Source: LeFaso.net
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