L’inquiétude se lit sur les visages dans quatre villages de la commune rurale de Koubri, dans la province du Kadiogo. Cette peur est liée à une rumeur sur le lotissement des terres agricoles des villages de Tansablogo, Moincé, Pikioko et Kankanghin. Ce lotissement des champs serait une décision des propriétaires terriens de Koubri.

Si l’idée de lotissement des terres est en soi une bonne initiative, les habitants des quatre villages auraient des informations relatives au fait que non seulement chacun devrait payer pour le lotissement de ses champs mais aussi et surtout les champs lotis seront enregistrés sous le nom du chef de Koubri. Il louerait alors les terres aux occupants actuels pour exploitation. Pour combien de temps et à quelles conditions ? Personne n’a pu donner des informations précises.

Il faut rappeler que certains de ces habitants sont les fondateurs de ces villages. Ils avaient été installés là il y a une quarantaine d’années par les grands-pères et les pères de ceux qui veulent aujourd’hui lotir et louer les terres à ces mêmes habitants.


Selon certains paysans, ces quatre villages sont visés parce qu’ils abritent peu de populations originaires de Koubri. La majorité des habitants sont originaires du Sanmatenga et d’autres provinces du Burkina Faso. Ils sont traités d’étrangers par les propriétaires terriens malgré leur installation dans les zones visées depuis plus de 30 ans.

Rappelons que l’un des conseillers municipaux du village de Tansablogo est un natif de Koubri, retraité, qui s’y est installé il y a quelques années. Bien qu’au courant du projet de lotissement, ce dernier aurait affirmé ne pas faire partie du groupe qui envisage d’entreprendre l’initiative.


Après la création de ces villages, l’Etat central a doté ces villages d’infrastructures sanitaires et éducatives. En 2017, à travers les villages de Tansablogo, Moincé et Pikioko, la commune rurale de Koubri a bénéficié d’une réalisation d’adduction d’eau multi-villages (images : château d’eau, collège, CSPS, école primaire de Tansablogo). Certains de ceux qui ont peur aujourd’hui sont les fondateurs de ces villages qui étaient une brousse appartenant coutumièrement aux propriétaires terriens de Koubri. Ils ne comprennent pas les raisons qui justifient l’initiative portée par les descendants de leurs bienfaiteurs.

Le maire de la commune rurale de Koubri et le haut-commissaire du Kadiogo seraient informés des rumeurs de lotissement à l’initiative des propriétaires terriens.

Si la peur est réelle, il est difficile de croire que dans le Burkina Faso d’aujourd’hui, une telle entreprise d’aménagement soit portée par des propriétaires terriens sans l’aval de la mairie et des structures déconcentrées de l’Etat, notamment la préfecture et le haut-commissariat.


L’auteur de ces lignes a tenté de rassurer certains habitants en leur faisant savoir qu’à la périphérie de Ouagadougou, une telle entreprise ne pourrait se faire sans l’autorisation ou même sans l’implication de la mairie. Si cela se produit, il faut craindre que tout le Burkina devienne la propriété privée de quelques privilégiés. Dans un pays qui se soucie de sa cohésion sociale et de son vivre-ensemble, espérons que cette initiative n’est qu’une pure rumeur. Même si, en tant que rumeur, elle est un mauvais jeu et même jeu capable de heurter la cohésion sociale.

Ces lignes ont pour but d’alerter les autorités de la commune et de la province concernées mais aussi toute l’opinion nationale afin que des démarches soient prises pour rassurer les populations de Tansablogo, Moincé, Pikioko et Kankanghin sur le fait que l’initiative de lotissement de leurs champs au profit du chef de Koubri est une fausse rumeur.


Peut-on oser, dans une situation aussi fragile que celle du Burkina Faso, tolérer une telle entreprise porteuse d’injustice ?

Les gouvernants peuvent-ils restés sourds à cette inquiétude des populations des villages de Tansablogo, Moincé, Pikioko et Kankanghin ?

Cette note a pour but d’interpeller et d’inviter toutes celles et tous ceux qui peuvent aider les communautés concernées à retrouver la quiétude de s’engager. Le conseiller municipal originaire de Koubri pourrait porter le plaidoyer des habitants auprès de ses parents propriétaires terriens afin de taire une telle initiative porteuse de conflit communautaire. Tous les regards sont portés sur lui. En tant que membre du conseil municipal, il devrait représenter les populations de Tansablogo préoccupées par la situation. Nous espérons qu’il assumera sa part de responsabilité aux côtés du maire et des autres pour que les quatre villages retrouvent la quiétude.

Runi Wumyan (zunoogo@yahoo.fr)

Source: LeFaso.net