Wendyam Laetitia Pogbéogo, étudiante en psychologie atteinte de déficience auditive, a soutenu son mémoire de maîtrise ce jeudi 22 novembre 2018. Le thème du mémoire, rédigé sous la direction du Dr Léopold Badolo, est « Education inclusive, abandons et rendements scolaires chez les apprenants déficients auditifs au post-primaire et au secondaire : Exemple du Centre d’éducation et de formation intégrée des sourds et entendants (CEFISE)/Ouagadougou ». Une soutenance à laquelle a assisté la ministre de la Femme, de la Solidarité nationale et de la Famille, Marie Laurence Ilboudo/Marchal.

C’est sans doute une soutenance qui fera date au département de psychologie de l’Unité de formation et de recherches en Sciences humaines (UFR/SH) de l’Université Ouaga I Pr-Joseph-Ki-Zerbo, tant il n’est pas courant de voir des étudiants en situation de handicap soutenir un mémoire.

Wendyam Laetitia Pogbéogo, déficiente auditive, après un parcours jalonné d’embûches et de difficultés, y est parvenue.

Disposant de 15 minutes, elle a présenté le fruit de ses recherches qui ont porté sur le thème « Education inclusive, abandons et rendements scolaires chez les apprenants déficients auditifs au post-primaire et au secondaire : Exemple du Centre d’éducation et de formation intégrée des sourds et entendants (CEFISE)/Ouagadougou. »

Il s’est agi, pour l’impétrante, de mettre en évidence les causes de l’abandon mais aussi de l’échec scolaire chez les élèves déficients auditifs. Et elle est parvenue à la conclusion que plusieurs raisons expliquent ces abandons. Il s’agit notamment de problèmes psychologiques liés au handicap, des pesanteurs sociales, du manque d’accompagnement, du sentiment d’incapacité, des difficultés langagières, etc.

Elle suggère donc une meilleure prise en charge de la déficience auditive chez l’enfant, la mise à disposition d’appareillages. Elle a surtout invité les autorités à redoubler d’efforts en faveur de l’éducation inclusive.

Après la phase des remarques et des questions, le jury s’est retiré pour la délibération.

A l’issue du conciliabule, le jury a salué la pertinence du thème mais également le travail de qualité effectué par l’impétrante. Ainsi, Laetitia Pogbéogo s’est vu attribuer la note de 16 sur 20.


Laetitia Pogbéogo, un avenir professionnel déjà assuré ?

Pour Marie Laurence Ilboudo/Marchal, ministre de la Femme, de la Solidarité nationale et de la Famille, venue encourager l’impétrante, Laetitia Pogbéogo est un exemple de courage qui mérite d’être accompagné et le ministère s’engage à cela.

« C’est son expérience qu’elle a partagée. Et il n’y a pas meilleure expérience que l’expérience personnelle. (…). Nous allons l’aider à pouvoir faire son master. Nous avons été interpellée par beaucoup. C’est vrai, on ne la connaît pas. Vous allez vous demander pourquoi je suis là. C’est parce qu’il y a eu un lobby autour d’elle. Nous avons été heureuse d’être là auprès d’elle et le ministère s’engage à l’accompagner pour qu’elle puisse avoir une insertion socio-professionnelle », a laissé entendre la ministre.


« Je veux devenir ministre… »

Laetitia Pogbéogo n’est pas née déficiente auditive. C’est en classe de CM2 que les troubles ont commencé. Ce qui ne l’a pas empêchée de poursuivre ses études. Avec l’aide de ses camarades de classe, elle arrive à suivre tant bien que mal les cours.

A la question de savoir comment elle est parvenue à ce niveau d’études, Laetitia répond : « Le public entendant a souvent des difficultés à comprendre qu’une personne en situation de handicap, spécifiquement de déficience auditive, puisse réussir. Je suis un exemple. Ce que j’ai fait pour réussir n’est pas sorcier, c’est naturel. Cela s’est passé comme si j’avais été entendante, avec la seule différence que je suivais les cours avec mes voisins de classe ».

« Pensez-vous avoir réussi ? », lui lance un journaliste. Avec plein d’humour, Laetitia réplique : « Je vous retourne la question : j’ai réussi ou je n’ai pas réussi ? J’ai réussi ? Alors moi aussi je réponds : j’ai réussi ! ».

Et en ce qui concerne ses ambitions, elle voit grand. « Je veux devenir ministre, avec ou sans la déficience auditive ».

Mais en attendant de réaliser ce rêve, pour le court terme, le jury l’encourage à s’inscrire pour le master en psychologie en vue de sortir psychologue.

Justine Bonkoungou

Lefaso.net

Source: LeFaso.net