Les auditions du putsch manqué se poursuivent devant le tribunal militaire. Ce vendredi 23 novembre 2018, deux accusés se sont succédé à la barre.
Le premier accusé qui est passé à la barre est Faiçal Nanema. Poursuivi pour complicité de dégradation volontaire aggravée de biens et pour recel, il avait été entendu les 5 et 8 octobre devant cette même cour. Durant cette audition, l’accusé avait chargé le caporal Sami Dah (défendu par le même avocat, Me Arnaud Sampébré) en le taxant de « suspect sérieux ».
Cela, suite à la lecture, par le parquet militaire, d’une partie du procès-verbal du caporal qui accusait le sieur Nanéma d’avoir participé à la bastonnade de certains manifestants à l’hôtel Laïco, durant les évènements de septembre 2015. Conflit d’intérêts oblige, Me Sampébré, après avoir requis l’avis du bâtonnier, s’est déporté.
C’est défendu par Me Zaliatou Aoba, que l’accusé est entendu une fois de plus à la barre. Faiçal Nanéma, dans la même ligne de défense, clame son innocence. Il reconnaît avoir été au domicile de son « parrain », feu Salifou Diallo, le 17 septembre 2015, pour empêcher les jeunes de piller et de saccager ladite maison qui a finalement été incendiée le lendemain 18 septembre.
Il affirme ne s’y être pas rendu. Quant au matériel qu’on a retrouvé en sa possession, l’accusé est clair : il l’a acquis avec un marchand ambulant. C’est plus tard que ce matériel s’est avéré provenir du domicile de l’ancien président de l’Assemblée nationale.
Avant de quitter la barre, l’accusé a remercié des personnalités comme l’ancien président du Faso, Blaise Compaoré ; Léonce Koné ; le général Bassolé ; et son « tonton », le général Gilbert Diendéré, pour leur soutien depuis son arrestation. « L’engagement en politique, c’est aussi le cachot », lance-t-il ; ce qui a suscité des rires dans la salle.
L’accusé va plus loin en disant que lorsqu’on s’engage en politique, il faut s’attendre à faire de la prison. En plus de la prison, il y a la mort, l’exil et le pouvoir. Lui, en tous les cas, est prêt à mourir pour ses opinions politiques, à aller en prison, à être au pouvoir, mais pas à aller en exil.
« Tonton, je voulais vous dire merci beaucoup. C’est comme cela la vie. Quand on a la force, quand on est au pouvoir, on ne connaît pas ses vrais amis. C’est la mort qui va nous séparer. Je resterai toujours avec vous », adresse-t-il au général Diendéré. Il n’a pas manqué de souhaiter prompt rétablissement aux blessés et paix aux âmes de ceux qui sont morts pour défendre la démocratie.
Par la même occasion, l’avocat de l’accusé Nanéma a introduit une demande de liberté provisoire. Chose que le parquet trouve inopportune à cette étape de la procédure. En plus, l’accusation trouve qu’il n’y a aucune garantie que l’accusé ne se volatilise pas dans la nature. Surtout qu’il avait bénéficié d’une liberté provisoire (décembre 2016) et n’avait pas jugé nécessaire de se présenter à l’audience du 31 mars 2018. D’où sa prise de corps à nouveau. Le délibéré est attendu le mardi 27 novembre 2018.
A la suite de l’accusé Nanéma est appelé à la barre le sergent Lamoussa Badoum. Il est poursuivi pour complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, meurtre, coups et blessures volontaires, dégradation aggravée de biens. Lors de son interrogatoire le 28 août 2018 à cette même barre, le parquet avait fait lecture d’une partie du procès-verbal de l’accusé que ce dernier a réfuté.
Après vérification, il s’est avéré qu’il y avait une différence entre la réponse de ladite, contenue dans les pièces tenues par le Parquet militaire et celle tenue par Me Stéphane Ouédraogo, avocat de l’accusé. En son temps, l’avocat avait demandé la communication de la pièce.
Ce vendredi, Me Ouédraogo a affirmé n’avoir pas encore reçu cette pièce. Chose que le parquet nie et brandit une correspondance en date du 4 septembre 2018. C’est donc l’avocat qui a refusé de recevoir la pièce en question, avançant que le parquet militaire cacherait la véritable pièce.
Après quelques minutes de ping-pong entre le parquet militaire, l’avocat et le président du tribunal. Ce dernier décide de continuer l’interrogatoire du sergent Badoum. N’étant pas d’avis avec cette décision, l’avocat décide de consulter le bâtonnier car il ne compte pas défendre son client dans ces conditions.
Marcus Kouaman
(kmagju@gmail.com)
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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