Au Burkina Faso, précisément à Ouagadougou, ces derniers jours, il y a une suspension de poussière accompagnée de vent sec. Quelles sont les conséquences de cette poussière sur l’organisme ? Et comment les asthmatiques doivent-ils se comporter ? Le médecin pneumologue et allergologue à l’hôpital Yalgado Ouédraogo, Pr Martial Ouédraogo, évoque les conséquences.
Lefaso.net : Nous sommes dans une période où il y a trop de poussière. Quelles sont les maladies que la poussière peut provoquer ?
Pr Martial Ouédraogo : La poussière peut contenir plusieurs éléments qui peuvent entraîner des maladies. La poussière peut contenir des germes. Dans la poussière, il peut y avoir des éléments allergisants comme les pollens. Vous savez qu’actuellement, c’est la pollinisation. Dans la poussière, il peut y avoir des éléments qui ont une action abrasive sur le tissu pulmonaire et qui détruisent ce tissu. Ceci étant, les germes que vous allez inhaler vont entraîner des infections respiratoires bactériennes ou virales. D’autres composants de la poussière peuvent occasionner la destruction du tissu pulmonaire ou surcharger le poumon, compromettant son fonctionnement. Aussi, l’inhalation d’allergènes contenus dans la poussière peut déclencher ou aggraver des maladies allergiques comme l’asthme.
Quelle attitude adopter pour se mettre à l’abri des maladies liées à la poussière ?
Il y a classiquement ce qu’on appelle les moyens individuels et les moyens collectifs. Les moyens individuels s’appliquent à l’individu lui-même. Au niveau individuel, il faut déjà savoir quelles sont ses tares au niveau respiratoire. Et se faire suivre pour ces tares. Quand le patient est régulièrement suivi, il sait généralement les précautions à prendre concernant sa maladie. Au niveau individuel, on peut porter le masque pour se protéger lorsque le niveau de poussière est élevé.
Le lavage ou l’humidification des fosses nasales peuvent être envisagés. Il faut également consulter précocement un agent de santé en cas d’alerte respiratoire. Aussi, il existe des vaccins contre certaines infections respiratoires prévalentes. Au niveau collectif, il faut veiller à ce que le taux d’empoussiérage ne soit pas élevé dans l’environnement interne comme externe, il faut de ce fait réduire les ouvertures si nécessaire, nettoyer les surfaces intérieures à l’humide, humidifier les routes non bitumées pour réduire la poussière avec la contribution, si possible, des riverains, etc. Mais il faut savoir que l’organisme a des moyens de défense très efficaces pour nous soutenir, mais ces moyens peuvent, dans certains cas, être débordés.
On entend souvent dire que pendant cette période, la méningite devient virale, est-ce que c’est vrai ?
C’est une manière de dire que la méningite devient plus prévalente. Pendant les périodes où les muqueuses s’assèchent et que le taux d’empoussiérage est élevé, effectivement, il y a des effractions au niveau des muqueuses des voies supérieures qui font que, malheureusement, quand vous avez une infection au niveau des voies respiratoires supérieures, les germes peuvent passer par cette effraction pour coloniser l’organisme et donner donc des méningites.
Mais il y a bien d’autres voies que la voie respiratoire. Également, de nombreux germes comme le méningocoque, le pneumocoque, les virus, les champignons et même le germe de la tuberculose peuvent donner des méningites. Méningite veut dire tout simplement inflammation des méninges, qui sont les enveloppes protectrices du cerveau et de la moelle épinière. Cependant, cette inflammation résulte généralement d’une infection.
Nous sommes dans une période où il y a assez de poussière, accompagnée de vent sec. Pour les personnes qui vivent avec l’asthme, comment elles doivent se comporter pendant cette période ?
Il faut d’abord comprendre que lorsqu’il y a de la poussière, il y a plusieurs éléments qui peuvent composer cette poussière. La poussière peut être constituée de fumée, d’allergènes, de microbes, de sable très fin, de résidus de la combustion d’hydrocarbures, etc. Mais ce qu’il faut retenir, c’est que plus les particules que vous respirez en suspension sont petites, et plus ces particules pénètrent profondément dans les poumons. Plus les particules de poussière sont petites, plus elles sont nocives.
Car d’une part, elles pénètrent très profondément dans les poumons, mais d’autre part, ces particules peuvent être nocives en raison de leur composition.
En ce qui concerne l’asthme, ces particules pouvant contenir des allergènes et l’asthme étant une maladie allergique, cet empoussiérage peut occasionner un asthme ou aggraver un asthme existant. Les asthmatiques, donc, devraient appliquer les mesures individuelles et collectives sus-évoquées. Aussi, l’agent de santé pourrait, en cas de nécessité, renforcer le traitement de la maladie pendant les périodes difficiles pour son patient.
Qu’est-ce que l’asthme ?
L’asthme est une maladie qui évolue généralement par des crises. Ce sont des crises de difficultés respiratoires. Souvent, on entend le malade siffler. Ces sifflements peuvent être audibles même par l’entourage ou par le médecin. Ces crises surviennent généralement la nuit, obligeant le patient à se réveiller et à s’asseoir au bord de son lit. Le malade a alors l’impression de suffoquer. Mais c’est généralement la forme d’asthme la plus reconnaissable.
Très souvent, les gens disent : j’ai vu quelqu’un qui avait de l’asthme, mais ça ne ressemble pas à l’asthme que vous avez diagnostiqué chez moi. En effet, dans l’asthme, comme dans d’autres maladies, il y a ce qu’on appelle la forme typique, et il y a les formes cliniques, c’est-à-dire les autres façons dont la maladie se présente en dehors du tableau qui est facilement identifiable. Le diagnostic de ces formes relève généralement du spécialiste. L’asthme peut donc se présenter sous forme de toux. Une toux qui est isolée ou qui survient à l’effort. L’asthme peut se manifester sous forme de difficultés respiratoires survenant seulement à l’effort. L’asthme peut simuler des bronchites à répétition, etc.
Quel message avez-vous pour les populations ?
Quand on présente des signes de maladies, il ne faut pas banaliser. Il faut se rendre dans un centre de santé. À défaut, il faut se rendre en pharmacie. Le pharmacien pourra éventuellement vous dire s’il s’agit d’une manifestation pouvant relever d’un conseil pharmaceutique ou nécessitant une consultation. Nous sommes tous les maillons d’une même chaîne.
Pour ceux qui ont des tares respiratoires, il faut se faire suivre régulièrement. Il ne faut pas attendre les exacerbations. Parce que souvent certaines maladies sont parties pour être des maladies de toute une vie. Quand on est bien suivi, la maladie se stabilise. Mais si on ne l’est pas, la maladie s’aggrave progressivement. Le véritable problème de la prise en charge des malades, c’est la consultation tardive et l’absence de prévention. Si ces deux aspects sont bien gérés, cela va réduire de manière drastique le taux de mortalité.
Interview réalisée par Rama Diallo
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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