Dr Salam Savadogo, médecin anesthésiste réanimateur, et Dr Kalilou Daganon, médecin généraliste, recommandent, dans la tribune qui suit, de confier la gestion du nouvel hôpital de Bobo à une équipe militaire ou mixte (militaire et civile). Cela pour éviter qu’il ne suive le même chemin que ses prédécesseurs, Yalgado, Bogodogo et Tengandogo, entre autres.
Le Burkina Faso s’apprête à accueillir un nouvel hôpital de référence à Bobo-Dioulasso, dont les travaux ont débuté 2020 et la livraison est prévue en mars 2025, selon les déclarations du coordonnateur du projet.
Cette amélioration du système de santé par la construction d’un nouvel hôpital à Bobo-Dioulasso représente une opportunité unique pour anticiper son mode de gestion
Ce futur Centre Hospitalier Universitaire (CHU), d’une envergure sans précédent, répondra aux normes internationales avec des infrastructures modernes et des équipements de pointe. Cependant, au-delà de son inauguration, un défi de taille se profile : quel mode de gestion adopter pour éviter les erreurs du passé ?
Une leçon à tirer des échecs des CHU actuels
L’expérience récente de la gestion hospitalière au Burkina Faso nous impose une réflexion profonde en prenant l’exemple des anciens CHU. Le CHU de Tengandogo dans ses premières années a bénéficié d’un partenariat entre une équipe locale et des experts taïwanais. Cette collaboration a été un succès sur plusieurs plans entre autres un approvisionnement constant en réactifs et médicaments, limitant les ruptures, une maintenance efficace des équipements médicaux, un accueil satisfaisant des patients avec une prise en charge rapide, une propreté et entretien régulier des infrastructures, et une rénovation immédiate en cas de panne ou de détérioration.
Malheureusement, après le départ de l’équipe taïwanaise, l’hôpital sous une gestion civile est resté confronté à plusieurs difficultés avec une infrastructures en dégradation accélérée faute d’entretien, une lenteur administrative et un climat général de mécontentement qui nuit à l’efficacité des soins à tel point que certains patients refusent souvent d’être référés vers cet établissement.
Cette détérioration s’est aggravée avec l’« universitarisation » du CHU-T, où l’arrivée des étudiants et internes a complexifié le fonctionnement sans précédent. Aujourd’hui Cet hôpital autrefois hôpital de référence en matière de soins de santé au Burkina Faso n’est plus ce qu’il était au moment de son ouverture, sa notoriété est en chute. Pourquoi au lieu de capaciter et d’attirer plus de patientèle on constate plutôt un effet contraire ?
Quant aux autres CHU, le CHU de Bogodogo (CHU-B), inauguré en 2017 et la mère des CHU en l’occurrence CHU-YO, longtemps gérés par une administration civile restent en déca des standards souhaités. Résultats ? problèmes structurels, organisationnels, fonctionel soulignant les limites de la gestion hospitalière exclusivement civile.
Un constat évident : la gestion civile de nos hôpitaux est-elle en échec ?
Depuis l’arrivée des autorités militaires au pouvoir, on observe une de redynamisation des CHU quoi que pour le moment insuffisant. Mais pourquoi donc attendre ce tournant politique pour redresser la situation ? La gestion civile seule est-elle réellement adaptée à nos hôpitaux ? Cette question mérite d’être posée avec lucidité, car il en va de la survie du système hospitalier burkinabè.
Un modèle de gestion militaire ou mixte : une solution viable
Afin d’éviter que le nouvel hôpital de Bobo ne suive le même chemin que ses prédécesseurs, nous préconisons une gestion militaire ou mixte (militaire et civile), qui présenterait de nombreux avantages :
D’abord la discipline militaire et la rigueur accrues imposera le respect strict des horaires de travail et des responsabilités, une gestion efficace des ressources humaines, financières et matérielles, une meilleure répartition des tâches et une réduction des conflits internes et d’éventuelle grèves.
Aussi une gestion militarisée procure un meilleur suivi des équipements et des approvisionnements avec une maintenance rigoureuse du matériel médical, un approvisionnement régulier en médicaments et réactifs, une mise en place d’un contrôle strict des stocks pour éviter les ruptures, une sécurisation des locaux et donc une organisation fluide.
Enfin avec les militaires, on peut espérer une optimisation du parcours de soins du patient, un accueil plus organisé et un délai d’attente certainement plus court contribuant à une amélioration de la qualité des soins.
Une alternative à explorer pour un système de santé performant
En aucun cas la gestion de cet hôpital de Bobo par les militaires exclurait les civils.
Il s’agit ici d’instaurer un modèle hybride où les professionnels de santé travailleraient sous une administration militaire, garantissant ainsi une meilleure organisation et un fonctionnement optimal.
Cet hôpital doit bénéficier d’un mode de gestion adapté à ses ambitions, où la discipline, la transparence et la rigueur seront des amis.
L’objectif ultime est de voir désormais au Burkina Faso un hôpital de référence, où la qualité des soins, la discipline et l’efficacité seraient au cœur du système hospitalier. Il est donc temps de sortir des sentiers battus et d’oser une nouvelle approche pour offrir aux populations des services de santé dignes de ce nom et adaptés à leurs besoins.
Cette transition du Président capitaine Ibrahim Traoré est donc une opportunité unique à saisir par notre beau pays le Burkina Faso, de bâtir un système hospitalier performant. Saurons-nous prendre la bonne décision avant qu’il ne soit trop tard ?
Dr SAVADOGO Salam (médecin anesthésiste réanimateur)
& Dr DAGANON Kalilou (médecin Généraliste)
Source: LeFaso.net
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