L’une des actualités médiatiques qui fait rage en ces débuts d’année 2025 est la condamnation à mort des Kuluna, en République démocratique du Congo. Sur la toile comme dans plusieurs sphères de discussion, le sujet fait l’objet de controverse. Certains estimant que les jeunes concernés méritent ce qui leur arrive. D’autres, que peu importe la cruauté des massacres dont ils se sont rendus coupables, rien ne peut justifier qu’on leur ôte la vie en retour. Réagissant à ce sujet à travers un sondage, les internautes de Lefaso.net ont bien voulu donné leurs avis.
« En RDC, la condamnation à mort d’une centaine de jeunes appelés « kuluna » suscite une controverse dans le pays et même au-delà des frontières. Ces « bandits urbains » jugés et condamnés à mort par des tribunaux, ont été transférés dans des prisons de haute sécurité, en attendant l’exécution de la peine conformément aux lois congolaises. Le garde des Sceaux de la RDC, Constant Mutamba, assure que le pays est déterminé à faire appliquer les peines prononcées. Que pensez-vous de cette mesure pour juguler le grand banditisme urbain ? », tel était le sujet du sondage qui a obtenu plus de 300 réponses.
En RDC en effet, les Kuluna ont endeuillé beaucoup de familles. La condamnation à mort de ces centaines de jeunes arrêtés et transférés dans les prisons sécurisées n’émeut visiblement pas certains, qui crient victoire et acclament cette décision judiciaire. A des milliers de kilomètres de ce pays d’Afrique centrale, certains Burkinabè, sûrement au parfum de l’actualité de ce pays, approuvent eux aussi cette décision qui, disent-ils, montre que l’Etat est toujours présent.
« Une très bonne chose ! Félicitations au ministre congolais de la justice. Comme il l’a dit : « il n’y a pas de place pour eux dans la société congolaise encore. Vous verrez que le phénomène va disparaître sap sap (rapidement). Ils n’ont pas peur de la prison », lit-on de l’intervention de Papy Kouyaté. Autres réactions à ce propos : « Il n’y’a pas mieux comme sanction contre le grand banditisme. C’est la situation qui l’exige. Respect aux autorités », salue Bellamy. « Je cautionne à 1 000 %. La loi est dure mais c’est la loi ! » écrit Harouna Ganemtoré. « Très bien ! Si la famille refuse de prendre ses responsabilités, l’Etat doit s’assumer pleinement », commente Mohamed Coulibaly.
« La peine de mort, une régression de la pensée humaine »
Pour d’autres internautes par contre, cette décision ne fait qu’enfoncer le pays plus bas que terre, lui qui est déjà menacé depuis belles lurettes par l’insécurité. « C’est du n’importe quoi cette décision ! Que voulez-vous ? Un pays en guerre pendant des années, la société se radicalise surtout en sa jeunesse, et vous trouvez qu’en rependant la mort toujours vous y parviendrez ? », s’interroge l’internaute Marcelin Noungou. Pour lui, malgré l’existence de ce type de sanction depuis des lustres, le monde, dit-il : « n’a cessé de continuer de vivre des atrocités jamais égalées. » « Repensons la société », propose-t-il.
A côté de ce commentaire, un autre, juge que cette décision est la preuve que l’homme perd le contrôle et n’est plus capable de trouver de réelles solutions aux problèmes qui l’environnent. « C’est une régression de la pensée humaine », écrit Azizou Gouem. « Une civilisation qui prononce encore des peines de mort est une civilisation non-évolutive. Leur mort ne profitera aucunement au pays, bien au contraire », regrette pour sa part Sylvian Dakio, tout en relativisant ses propos par la suite : « Je dois dire que si c’est ce que veut le peuple congolais à travers sa loi fondamentale, qui suis-je pour penser autrement ? »
Pour Hyacinthe Tioyé, la société ne récolte que ce qu’elle a semé. A le lire, elle se serait rendue coupable de certains manquements. Inutile donc de s’en prendre aussi radicalement à ces jeunes. « La société doit instruire, éclairer et rendre meilleure. La société est coupable de ne pas donner l’instruction gratuite ; elle est coupable de ne pas éclairer les intelligences ; elle est coupable de ne pas élever l’âme des enfants vers la vertu et le travail. Elle est coupable, trois fois coupable, de tous ces abandons. Et quand, par suite de ses propres négligences, elle produit un criminel, elle le frappe ! Elle frappe le coupable dans sa propre œuvre ! C’est monstrueux ! Je dis que la peine de mort est un signe évident de barbarie. Tant que la peine de mort subsistera, il n’y aura pas dans la société de respect véritable pour la vie humaine », crache-t-il, reprenant ainsi les propos de Victor Hugo.
« La peine de mort, ce qu’il faut au Burkina »
Au Burkina Faso, la peine de mort a été abolie en 2018. Le vendredi 8 novembre 2024, le ministre de la justice, Edasso Rodrigue Bayala, était face aux députés de l’Assemblée législative de transition, pour défendre le projet de loi portant administration du travail d’intérêt général au Burkina Faso. Interrogé sur la question, l’homme de droit n’a pas écarté la possibilité que la peine de mort soit rétablie dans les jours à venir. En appréciant cette sanction appliquée au Congo, certains internautes n’ont pas caché leur désir de voir la même peine appliquée au Burkina.
« C’est ce qui manque au Burkina Faso à tous les niveaux. Quand la violence est légale et légitime, elle permet d’asseoir la discipline et la paix sociale », laisse ainsi entendre Souleymane Kaboré. « Félicitations aux autorités congolaises et c’est une très bonne idée que ça soit appliqué dans ma très chère patrie, le Burkina Faso », lance Timo Timo. « C’est une très bonne chose. Il faut ça et maintenant dans notre Faso », appelle de ses vœux Narcisse Kaboré. « Cette décision est salutaire et je souhaite la même chose au Burkina Faso », exprime Ali Kabré. « C’est exactement ça qui manque au Burkina », regrette Hassane Ouédraogo.
Quelques propositions pour une société meilleure
Du flot de réactions enregistrées sous cette publication, il n’y a pas que ceux qui se satisfassent ou non de cette décision. Il y a aussi ceux-là qui proposent des solutions pour une société meilleure. « Je pense que cette action s’attaque aux conséquences du problème. Je proposerai qu’une étude soit faite sur les causes internes qui ont emmené ces jeunes à cette vie et ainsi traiter la cause, pour un réel changement dans ce pays. Cette situation devrait interpeller le Burkina Faso à développer des politiques pour sauver les enfants dans les rues. Proposons des centres de formation rapides en élevage et agriculture, puis, on les place dans les plantations ou champs étatiques », écrit Wendkuni David Gouba.
Tout comme lui, Kisito Yoni pense que les causes du problème devraient être réellement posées et débattues, puis accompagnées de politiques qui permettront de retirer cette épine du pied. « En envoyant un message clair d’intolérance envers de tels actes criminels, cette démarche pourrait contribuer à freiner l’insécurité urbaine. De plus, elle illustre l’engagement des institutions congolaises à répondre fermement aux attentes de la population, souvent désabusée face à l’impunité. Si cette rigueur s’accompagne d’un travail en profondeur sur les causes du banditisme, notamment par des programmes d’éducation, de réinsertion et de lutte contre la pauvreté, elle pourrait marquer une étape significative dans la pacification des espaces urbains », suggère-t-il.
Erwan Compaoré
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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