Ingénieure des travaux en réseaux et systèmes informatiques, Balkiss Ouédraogo s’est spécialisée en « cybersecurity awareness ». Nommée par son entourage « Adja digitale », elle est une figure montante de la sensibilisation à la sécurité numérique au Burkina Faso. Dans l’entretien qui suit, elle indique que la lutte contre les menaces numériques est une responsabilité collective.

Lefaso.net : Quel est votre rôle actuel dans le domaine de la cybersécurité, et quelles sont les initiatives que vous avez lancées ou auxquelles vous avez participé dans ce domaine ?

Balkiss Ouédraogo : Actuellement, je porte la casquette de sensibilisatrice/ambassadrice dans la promotion de la sécurité en ligne et la culture numérique éthique. J’ai participé à plusieurs initiatives, telles que l’animation des webinaires de sensibilisation avec le Cyber 221 section Burkina, dont je suis la coordinatrice adjointe, je crée des contenus textes et vidéos pour sensibiliser les jeunes sur les réseaux sociaux, j’ai mené une recherche et produit un document de plaidoyers sur le thème « L’utilisation des réseaux sociaux par les jeunes au Burkina Faso : cas de la ville de Ouagadougou et de la ville de Gourcy » suite à ma formation en Recherche-action participative par Gorée Institute en partenariat avec Save The Children au Sénégal. Comme petite anecdote, mes camarades jeunes chercheurs m’appellent « madame webinaire » à cause de notre fort engagement dans la sensibilisation via les webinaires.

Selon vous, quels sont les principaux défis en matière de cybersécurité auxquels les jeunes Africains sont confrontés aujourd’hui ?

Nous les jeunes, nous faisons face à beaucoup de difficultés, notamment le manque de culture numérique éthique, le manque de formation. La faible sensibilisation sur les notions de base en protection numérique et le faible accès à l’information sur la cybersécurité sont des causes de l’exposition de nombreux jeunes sur les réseaux sociaux. Alors que la cybercriminalité, la cyberescroquerie, la cyberviolence, les discours de haine, le piratage prennent de l’ampleur malheureusement.

« Il faut s’abstenir de partager des contenus malsains »

Comment abordez-vous la sensibilisation à la cybersécurité avec les jeunes ?

J’utilise beaucoup les plateformes numériques telles que Facebook, LinkedIn et TikTok. Je crée du contenu qui sensibilise afin de susciter un changement d’habitude et de comportement. Parfois, quand j’ai l’occasion, je donne des formations à des membres d’associations. C’est une occasion pour moi de partager mon expérience afin de faire connaître le domaine de la cybersécurité.

Que pensez-vous de l’impact des réseaux sociaux sur la sécurité numérique des jeunes, et quelles sont les bonnes pratiques que vous encouragez ?

Les réseaux sociaux forment un couteau à double tranchant avec leurs bons et mauvais côtés. Leur impact étant donc à la fois positif et négatif, il faut donc définir des objectifs clairs quand nous y sommes. Les bonnes pratiques peuvent être, par exemple, de s’éloigner des débats et polémiques inutiles, d’éviter les discours de haine ou les injures. Il faut s’abstenir de partager du contenu malsain, éviter de cliquer et de partager sur les liens malveillants et prendre le soin de bien lire avant de répondre à un message. Il faut également protéger son compte avec un mot de passe unique composé de plusieurs caractères d’un minimum de 12 caractères et définir l’authentification à double facteur. Il y a plusieurs techniques et astuces qui permettent d’être en sécurité.

Dans un contexte où les menaces en ligne évoluent constamment, comment voyez-vous l’avenir de la cybersécurité au Burkina Faso et quel rôle les jeunes peuvent-ils jouer pour améliorer la situation ?

Avec l’évolution rapide de la technologie et la transformation numérique des sociétés, les menaces liées à la cybersécurité se multiplient, rendant ce domaine plus crucial que jamais. La cybersécurité ne peut plus être la responsabilité exclusive des experts ou des institutions spécialisées. Elle doit devenir un enjeu collectif, où chacun, à son niveau, joue un rôle dans la protection des données et des infrastructures numériques. Les jeunes, en particulier, ont un rôle clé à jouer dans cette lutte contre les cybermenaces. Grâce à leur aisance naturelle avec les nouvelles technologies, ils disposent d’un avantage pour s’approprier les outils et concepts nécessaires à la cybersécurité. Cependant, pour être de véritables acteurs de changement, ils doivent se former de manière rigoureuse et approfondie.

L’implication des jeunes dans la cybersécurité va au-delà des compétences techniques. Ils peuvent également sensibiliser leurs pairs et leurs communautés aux bonnes pratiques. Chaque action, même simple, contribue à construire un écosystème numérique plus sûr.

En raison de son engagement pour un espace numérique sain, Balkiss Ouédraogo a été surnommé « Adja Digitale » par ses proches

Avez-vous des projets à venir en lien avec la cybersécurité ?

J’ambitionne de créer un cadre dédié à la promotion, à la formation et à la sensibilisation à la cybersécurité, adapté aux besoins des organisations, des entreprises et des individus. Ce projet s’inscrit dans une vision de démocratisation des connaissances en cybersécurité où la présence des femmes reste faible. Mon initiative va non seulement combler ce fossé, mais également ouvrir la voie à une nouvelle génération de femmes expertes en cybersécurité, capables de contribuer de manière significative à la sécurisation des systèmes numériques.

L’inclusion des femmes dans la cybersécurité est non seulement une question d’équité, mais aussi de performance. Il est donc impératif de construire des espaces qui leur permettent d’accéder aux formations et aux ressources nécessaires pour s’imposer dans ce domaine. [ Cliquez ici pour lire l’intégralité ]

Farida Thiombiano

Lefaso.net

Source: LeFaso.net