Deux époux ont comparu devant la barre du Tribunal correctionnel ce lundi 25 novembre 2024. La victime, l’épouse, reproche à son conjoint de lui avoir volé des bijoux d’une valeur de 140 millions francs CFA. Le Tribunal, après avoir écouté les parties, a condamné le prévenu à une peine d’emprisonnement de 48 mois, et une amende de 1 millions francs CFA, le tout ferme.
Les faits de cette affaire remontent à 2021. De l’explication donnée par la victime, elle disposait de bijoux de grande valeur qu’elle avait gardés dans sa chambre. Se rendant compte quelques temps après qu’ils n’étaient plus où elle les avait placés, elle questionna son mari sur l’emplacement de ces biens. « J’ai estimé qu’ils n’étaient pas en lieu sûr. Donc je les ai pris et mis quelque part. Mais j’ai pris le soin de lui dire où ils étaient » a relaté le prévenu.
Devant par la suite effectuer un voyage au Sénégal, la victime dit avoir constaté que le sac qui contenait les objets étaient de moins en moins lourd. Et plus le temps passait, plus les objets diminuaient. Elle comprend alors que son conjoint lui joue des tours. En lui demandant où étaient passés les bijoux, celui-ci feindra dans un premier temps de ne rien savoir. Convoquée à la gendarmerie, il finira par avouer avoir pris et vendus les bijoux à un dénommé Moussa (nom d’emprunt).
« Pourquoi avez-vous pris les bijoux de madame » a questionné la présidente du Tribunal. « J’ai pris déposer dans un lieu sûr parce qu’elle l’avait déposé à un endroit où ils étaient exposés » a répondu le prévenu. « C’est elle qui vous a demandé de le faire ? » a poursuivi le juge. « Non » a renvoyé le prévenu. « Et vous pensez qu’elle est un enfant pour que vous ayez à garder ces objets pour elle sans qu’elle ne vous le demande ? » a questionné le Tribunal. A cela, le prévenu insistera sur le fait que les objets étaient exposés.
Au tour du procureur, celui-ci lui demandera à combien était estimée la valeur des bijoux. En réponse, le prévenu répond ne pas avoir une idée exacte du montant, car il les donnait au dénommé Moussa en plusieurs temps, et récupérait l’argent en plusieurs tranches. « Ce n’était pas la valeur exacte des bijoux que je récupérais. Je pouvais prendre 100.0000 aujourd’hui, après 200.000 francs CFA. Il n’y avait pas de valeur fixe » a-t-il laissé entendre.
Invitée à se prononcer sur la question, son épouse estime que ces propos sont faux car, au moment de son interrogatoire à la gendarmerie, il a avoué que les bijoux avaient une valeur de 80 millions francs CFA. « S’il ne savait pas la valeur des bijoux, il ne pouvait pas dire ça là-bas » a-t-elle conclu. Pour elle, ce dernier ne les a pas vendus car aucun changement n’a été observé dans son comportement.
Prenant la parole par la suite pour sa plaidoirie, son avocat souhaitera du Tribunal qu’il n’ait aucune compassion vis-à-vis du prévenu car, étant certes un délinquant primaire, mais ayant planifié d’une main de maître son coup avant de l’opérer. « Ma cliente avait l’habitude de déposer ces bien en banque. C’est lui qui l’a convaincue de les déposer à la maison. Et là, il a pris le soin de les déplacer, et de les soustraire petit-à-petit, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien » a-t-il retracé.
Pour ce qui est de la valeur exacte des bijoux, il souligne qu’elle excède le montant sus-cité. « Ma cliente avait pris le soin de peser la marchandise. Elle faisait 2,225 kg. Actuellement, le gramme d’or coûte 40.000 francs CFA. Et faisant un calcul rapide, nous en sommes à 140 millions francs CFA » a rectifié le conseil de la victime, réclamant par la même occasion que ce montant soit restitué. En plus de cela, que le prévenu paie la somme de 1 million francs CFA, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Pour le procureur, la situation pour laquelle le Tribunal est réuni est déplorable car, d’ordinaire, l’époux est censé défendre sa femme des circonstances pareilles. Au lieu de cela, c’est lui-même qui s’avère être le ravisseur, le bourreau de la personne au secours de qui il devait voler en cas de danger. « C’est un acte qui est très grave » a-t-il estimé.
Notons qu’au cours de l’audience, le prévenu interrompait constamment les acteurs judiciaires dans leurs propos. Ces derniers lui ont, à maintes reprises, rappelé qu’il ne devait pas leur couper la parole au moment où ils s’exprimaient. Aussi, il lui arrivait souvent de sourire face à certaines questions que lui posait le Tribunal. Pour le Procureur, cette attitude du prévenu montre qu’il n’a aucun remord et n’a aucune idée de la gravité de ces actes.
« On voit qu’il est à l’aise. Il rit comme il veut. Il coupe la parole à qui il veut… Et cela me conforte dans l’idée selon laquelle, il n’a pas vendu les bijoux. C’est comme ça pour les délinquants de ce genre. Ils placent l’argent quelque part tout en sachant qu’ils vont purger leur peine, et après cela, ils sortent jouir du fruit de leur vol. Mais je crois qu’il faut en faire un exemple pour les autres et j’espère que le Tribunal me suivra dans mes réquisitions » a-t-il lâché, requérant ainsi une peine d’emprisonnement de 60 mois et une amende de 1 million francs CFA, le tout ferme.
En prenant la parole pour son dernier mot, le prévenu souhaitera qu’on lui donne une chance de travailler pour restituer à sa femme ce qu’il lui a volé. Selon ces dires, en trois ans, il pourra le faire. « Si on me donne une autre chance, je vais travailler pour lui rembourser ce que je lui dois. Je viendrai verser ici 350.000 francs CFA par mois. Et en plus de ça, je ferai des activités qui me permettront de déposer beaucoup plus en fonction de ma rentabilité » a-t-il promis.
Après avoir écouté les parties, le Tribunal donnera le verdict après quelques minutes de concertation, condamnant le prévenu à une peine d’emprisonnement de 48 mois et une amende de 1 million francs CFA, le tout ferme. Il ordonnera par la suite le paiement de la somme de 140 millions francs CFA, en restitution du bien volé. Pour ce qui est des frais exposés et non compris dans les dépens, il fixera le montant à 700 000 francs CFA, ordonnant en outre l’exécution provisoire, et fixant la contrainte judiciaire au maximum.
NDLR : Le terme « Epoux » a été utilisé dans cet article pour faciliter la compréhension des lecteurs. Sinon, les parties au litige vivent en concubinage, car n’ayant pas été mariées légalement.
Erwan Compaoré
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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