Dans une lettre ouverte adressée au Président de la Transition, le capitaine Ibrahim Traoré, Mousbila Sankara, compagnon du capitaine Thomas Sankara, père de la révolution burkinabè, l’appelle à tirer les leçons des régimes politiques passés afin de ne pas commettre les mêmes erreurs. Emballé au départ par l’avènement du MPSR2, Mousbila Sankara dit avoir de « sérieuses inquiétudes ».

Pour Mousbila Sankara, la plupart des dirigeants qui se sont succédé à la tête du pays se sont trompés de cible et ont toujours pris les syndicats et leurs organes pour des adversaires.

« Ils ont également confondu les réalités des travailleurs aux lubies de leurs courtisans. Tous ou presque se sont acharnés sur les premiers responsables des organisations de masses ou de partis politiques à travers les tracasseries diverses (policières, judiciaires administratives). Leurs supporteurs zélés ont été à l’origine de leurs malheurs en commettant l’irréparable (destruction d’organes, assassinant de journaliste et détournement crapuleux de bien public, propos incendiaire et provoquant). Ils ont tous voulu affronter l’impérialisme et à mains nues », rappelle-t-il.

C’est une contribution « volontaire et payante » et Mousbila Sankara souhaite être rétribué en nature et en espèces.

L’ancien ambassadeur du Burkina Faso en Libye sous la révolution, invite donc le capitaine Ibrahim Traoré à donner la composition du MPSR2, définir pour le peuple les reformes administratives envisagées, éviter d’être complice de certains activistes dans la liquidation des droits fondamentaux des travailleurs acquis depuis longtemps.

Il appelle le président de la Transition à ouvrir l’espace public aux citoyens pour l’expression de leurs libertés.

Retrouvez l’intégralité de la lettre ouverte dans le document ci-après :

Lefaso.net

Objet : Contribution volontaire et payante

Je viens par ce courrier vous apporter ma contribution pour la veille citoyenne. Je choisis ce canal (presse) pour n’avoir pas eu une suite favorable à ma demande d’audience déposée courant avril 2024.

Monsieur le Président, l’auteur de la présente lettre est un ancien CDR (Comité de Défense de la Révolution) du 4 Août 1983 au 15 Octobre 1987 et également ancien syndicaliste.

Comme indiqué plus haut, j’ai été Ambassadeur en Lybie jusqu’à la rectification. N’ayant pas apprécié favorablement cette rectification, j’ai été emprisonné et torturé à la gendarmerie et au conseil. Libéré en avril 1991, j’ai repris mes activités à l’ONATEL SA jusqu’au 31 décembre 1999.

Monsieur le Président, le MPSR II que vous avez l’honneur de diriger m’a emballé au départ, mais actuellement j’ai de sérieuses inquiétudes dont je voudrais partager avec vous.

En effet, depuis quelques temps, je constate que vous vous appliquez à commettre les mêmes fautes graves que vos prédécesseurs et cela m’inquiète.

Monsieur le Président pourquoi suis-je inquiet ?

Parce que depuis 1960 j’ai vécu dans le sens plein du terme les évènements qui ont marqué sérieusement ce pays et naturellement j’ai aussi retenu quelques enseignements.

C’est pourquoi en vertu du devoir de tout aîné de guider les puinés (petit frère et sœur) je viens vous dire ceci :

La plupart de vos prédécesseurs se sont trompés de cible et ont toujours pris les syndicats et leurs organes pour des adversaires.

Ils ont également confondu les réalités des travailleurs aux lubies de leurs courtisans.

Tous ou presque se sont acharnés sur les premiers responsables des organisations de masses ou de parti politique à travers les tracasseries diverses (policières, judiciaires administratives).

Aucun ne s’est penché sur le problème du moment.

Leurs supporteurs zélés ont été à l’origine de leurs malheurs en commettant l’irréparable (destruction d’organe, assassinant de journaliste et détournement crapuleux du bien public propos incendiaire et provoquant).

Ils ont tous voulu affronter l’impérialisme et à mains nues.

Leur cabinet était rempli de tout sauf de cadres compétents.

Tous ont rusé avec le peuple en s’annonçant sauveur ou libérateur

Leurs programmes n’étaient jamais clairement définis

Le temps :

Monsieur le Président, veuillez marquer votre différence avec ce qui vient d’être dit en :

En définissant pour le peuple les reformes administratives envisagées.

Le degré de sécurisation de territoire.

Donner la composition du MPSR II.

Eviter d’être complice de certains activistes dans la liquidation des droits fondamentaux des travailleurs acquis depuis longtemps.

Ouvrir l’espace public aux citoyens pour l’expression de leur liberté.

Monsieur le Président, ayant constaté que généralement les gens n’accordent pas d’importance à ce qui leur est servi gratuitement, je demande à être rétribué à la hauteur de ma contribution afin que je puisse m’offrir pour la présente saison hivernale, un motoculteur, une motopompe et éventuellement mettre en état ma camionnette.

D’autre part j’ai soumis auprès de votre gouvernement dans le cadre de la réconciliation nationale, une demande d’indemnisation en rapport avec les violences en politique.

Pouvez-vous aussi de ce côté, activer le traitement ?

Merci Monsieur le Président.

EL HADJ SANKARA Mousbila

Source: LeFaso.net