Invité de l’émission « Sur la brèche » de la télévision nationale, diffusée, ce dimanche 18 juin 2023, le défenseur des traditions africaines, Konomba Traoré, est resté égal à lui-même. « La bible et le coran n’ont rien appris à l’Afrique. Rien. Tout était déjà dans nos traditions. Les dix commandements étaient déjà dans nos traditions », a-t-il soutenu face à la journaliste Nathalie Kaoré.
Peu de Burkinabè le savent, mais dernière l’accoutrement de l’homme paré d’amulettes, se cache un administrateur civil de renom qui a servi comme sous-préfet-maire de Kaya, préfet à Kokologho sous la révolution. Konomba Traoré a même été secrétaire général de la mairie de Ouagadougou, et maire intérimaire entre décembre 1983 et avril 1984.
Trésor humain vivant, il est aussi un artiste musicien, chanteur, peintre, conteur. Il joue de plusieurs instruments traditionnels tels que le balafon, la kora, le donzongoni et le djembé. Konomba Traoré est lauréat du premier prix de conte et deuxième prix de peinture et de dessin organisé par le Cercle d’Activités littéraires et artistiques de Haute-Volta (CALAHV), créé par de grands noms comme Augustin Sondé Coulibaly, Nazi Boni, Sotigui Kouyaté, etc. Konomba Traoré a également remporté le deuxième prix de musique traditionnelle instrumentale à la Semaine nationale de la Culture (SNC) en 1986.
Invité à l’émission « Sur la brèche » de la télévision, l’homme de culture a confié que c’est grâce au capitaine Thomas Sankara qu’il est devenu ce qu’il est sur le plan artistique.
« J’étais préfet de Kokologho de 1984 à 1986. Un jour, le président Sankara m’envoie le recteur de l’académie des arts Benjamin Raya pour me dire de venir à Ouagadougou. Je viens et c’était pour me signifier que je serai détaché au ministère de la culture. Parce que je suis plus utile, disait-il, à la culture que dans le commandement. Pourquoi disait-il cela ? Il a dit qu’on peut sortir autant de préfets qu’on veut de l’ENAM pour remplacer Konomba, mais les artistes comme Konomba, disait-il, c’est une chance de les avoir. Sankara était un homme de culture, qui a aimé la culture et qui a mis l’accent sur la culture. Il m’a nommé directeur du centre national d’artisanat et d’arts. C’est juste sur instruction verbale qu’il l’a fait. Il n’y a eu aucun papier pour mon détachement au ministère de la culture », a raconté l’artiste, âgé de 76 ans.
Konomba Traoré tient son prénom du Konon, le fétiche de son père dont il serait la réincarnation. « Le Konon, c’est un fétiche redoutable du milieu sénoufo et bambara. Ce fétiche est partagé avec les populations bobo et d’autres cultures de l’Ouest. A ma naissance, personne ne m’a baptisé. On m’a directement appelé Konomba. Ma date de naissance, l’heure, mon avenir ont été prédits », a-t-il laissé entendre.
Fervent défendeur des pratiques religieuses traditionnelles, Konomba Traoré confie avoir eu à son adolescence le premier prix du catéchisme quand il était au lycée Ouézzin Coulibaly. « Il s’agissait d’aller nous faire baptiser à Nasso, un dimanche. J’ai demandé : “ Le baptême là, c’est pour faire quoi ? “. On m’a répondu que c’est pour changer de nom. On m’a dit de choisir un prénom et qu’on allait me baptiser. J’ai répondu qu’il n’y a pas de meilleur nom que Konomba. Depuis ce temps, je me suis révolté contre les cultures étrangères, contre les religions importées », s’exclame-t-il.
Selon Konomba Traoré, les Noirs sont actuellement dans l’erreur en embrassant les religions révélées qui ne leur auraient rien apporté de nouveau. « Avant l’arrivée de ces religions, comment vivaient les autres peuples de l’humanité ? Les grecs avaient leurs dieux, les phéniciens avaient aussi leurs dieux. Ces religions sont venues trouver l’Afrique avec une organisation merveilleuse. La bible et le coran n’ont rien appris à l’Afrique. Rien. Tout était déjà dans nos traditions. Les dix commandements étaient déjà dans nos traditions. Le noir n’est pas athée. Le noir croit en Dieu, mais c’est sa façon de l’atteindre qui est différente de celle des autres religions. Ces religions nous ont fait la force afin de nous faire croire que seuls leur mode d’accession à Dieu était le meilleur. Non ».
Konomba Traoré ne passe pas par quatre chemins pour qualifier le noir de « complexé et bête ». « Le noir a honte de sa culture. Personne ne veut s’afficher. C’est cela le problème. Les rares personnes qui n’ont pas honte comme nous, parlons. Les gens se cachent. Quand ça chauffe à Ouaga et qu’ils ne peuvent pas trouver de solutions dans les prières à l’église et à la mosquée, ils rejoignent le culte des ancêtres dans l’obscurité au village », révèle le chef Dozo. Et de prédire « Le jour où l’Afrique va se raviser et avoir sa propre religion, elle va dominer le monde ».
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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