Dans son Discours sur la situation de la nation (DSN), le mardi, 30 juin 2023, devant l’Assemblée législative de transition (ALT), le Premier ministre Me Apollinaire Kyelèm de Tambèla a répondu à une question sur la tenue des prochaines élections au Burkina Faso (selon l’agenda initial, la transition prend fin en juillet 2024). Sans détour, le chef du gouvernement a fait taire tout suspens.
Dans un style dont lui seul a le secret, le Premier ministre a déclaré : « On ne peut pas faire des élections sans la sécurité. Ceux qui veulent des élections rapides, même demain, nous pouvons l’organiser s’ils assurent la sécurité du Burkina Faso. Nous sommes prêts (…) sinon, ce sera des élections aussitôt contestées aussitôt organisées »
Ainsi, Me Apollinaire Kyelèm a tranché. Il n’y aura pas d’élections au Burkina Faso, tant que la reconquête du territoire ne sera pas effective. Un argument qui vient, en réalité, soutenir celui du président de la transition Ibrahim Traoré au cours de son interview du 5 mai 2023. Le chef de l’Etat avait pris l’exemple de la négociation en novembre 2020 avec des groupes armés terroristes pour tenir les élections. Un acte qui a eu pour conséquences la recrudescence des attaques à partir de 2021.
Les nouvelles autorités ont affiché publiquement leur intention : pas de négociations avec les groupes armés. Ce message, le chef du gouvernement l’a réaffirmé au cours de son DSN. Ceux qui prétendent occuper certaines fonctions par le biais des élections doivent donc patienter. « Pour que les élections soient acceptées, il faut qu’au moins l’essentiel du pays puisse participer », a affirmé le chef du gouvernement.
Dans sa série de réponses aux questions, le Premier ministre a annoncé des chiffres pour faire l’état des lieux de cette reconquête. « 65% » du Burkina Faso est sous contrôle de l’armée et « 20% » où les Forces de défense et de sécurité (FDS) ont un accès limité.
Si l’on doit comprendre la logique de Me Kyelèm de Tambèla et de son gouvernement, lorsque la reconquête sera effective sur l’ensemble du territoire national, on pourra parler d’élections au Burkina Faso.
C’est dire donc que la classe politique, qui a vu ses activités suspendues depuis septembre 2022 (deuxième coup d’Etat), verra sa pause se prolonger. Tout compte fait, les acteurs de la politique étaient déjà préparés psychologiquement. L’on se rappelle de sa dernière rencontre avec le président Ibrahim Traoré, où les quatre composantes de cette classe politique burkinabè ayant pris part à l’élaboration de la charte de la transition ont apporté leur soutien aux autorités actuelles.
Il s’est agi de l’ex-Alliance des partis politiques de la majorité présidentielle (APMP), l’ex-Chef de file de l’opposition politique (CFOP), l’ex-Opposition non affiliée (ONA) et les « Autres partis ». Ce jour, le porte-parole, Eddie Komboïgo, a indiqué que le souhait des partis politiques reste la récupération de l’ensemble du territoire, la réinstallation des populations dans leur localité avec le fonctionnement des services administratifs et sociaux minimum et un approvisionnement des produits de première nécessité dans « des conditions dignes ».
Ainsi, avec ces propos du Premier ministre, l’on est en droit de se demander si les arguments ne concourent pas à une prolongation des congés de la classe politique burkinabè.
Il faut rappeler que selon le calendrier de la CEDEAO soumis à la transition burkinabè, les élections doivent se tenir en juillet 2024.
Cryspin Laoundiki
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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