Le 24 avril 2022, la France va de nouveau décider qui d’entre Emmanuel Macron et Marine le Pen sera le président de la République. C’est entre les mêmes personnes que les Français avaient dû choisir en 2017. Le fait que le pays soit confronté au même choix montre la faillite de la classe politique française et du système de représentation politique, sinon de la démocratie française qui offre de nombreuses candidatures au premier tour et pas d’alternative au second.

Quel est le tableau politique de l’ancienne Gaule, après cette bataille du premier tour qui a fait beaucoup de victimes ? Le président candidat Emmanuel Macron a-t-il les mêmes chances qu’en 2017 ? L’Afrique était absente du débat du premier tour, et les Africains aussi ne se sont pas intéressés à cette étape, mais de Macron et de Le Pen qui est dans le cœur des Africains ?

Le premier tour des présidentielles en France a montré l’échec de la gauche qui, par deux fois consécutivement, n’est pas représenté au second tour. Les autres candidats des partis de gauche divisés et éparpillés s’approchent ensemble avec peine des 10% des voix. Mais Jean Luc Mélenchon le vainqueur à gauche du Parti de la France insoumise et troisième du scrutin récolte 21,95% des voix, son meilleur score pour une troisième participation à l’élection présidentielle.

Cet échec est celui de la division et des égos surdimensionnés, chacun voulant montrer la beauté de sa chapelle avant de se retrouver pour le second tour, mais voilà personne n’est représentée au second tour. Cette défaite est plus cuisante pour les partis dits de gouvernement : Les Républicains et le Parti socialiste qui ont subi le vote sanction pour leurs façons de diriger le pays par le passé avec des scores du premier tour, historiquement bas de 4,78% pour Valérie Pécresse et de 1,74% pour Anne Hidalgo.

Il n’y a rien à redire, la France est un pays où la gauche est totalement laminée, toutes tendances confondues. Les idées en vogue sont les plus extrêmes populistes, racistes, tribales avec les candidats comme Zemmour et Marine Le Pen. Emmanuel Macron, le président des riches, doit trouver des voix à gauche pour rester à l’Élysée. Le désistement républicain a de fortes chances d’être du bout des lèvres s’il ne propose pas autres choses aux classes populaires en butte à la vie chère et à la flambée des prix aggravée par la guerre en Ukraine.

L’issue de cette élection est incertaine car les Français qui ont écarté la candidate d’extrême droite la dernière fois et n’ont pas vu une empathie du président Macron pour leurs problèmes peuvent décider soit de profiter du beau temps, soit de voter Marine pour voir ce que cela va donner, depuis le temps où on agite l’épouvantail du vote lepéniste.

De plus, Emmanuel Macron n’a plus de réserves de voix à droite, alors que le Rassemblement national, le parti de Marine le Pen a les 7% de voix qui sont allés à Zemmour et peut en prendre en plus dans les votes des partis de gauche comme la France insoumise. Beaucoup de français ne se sentent pas représentés dans ce second tour où les propositions écologistes, communistes, social démocrates en un mot à gauche ne se bousculent pas sur les lèvres d’Emmanuel Macron encore moins sur celles de la fille de Jean Marie le Pen.

Les étudiants ont commencé à occuper des facultés comme la Sorbonne à Paris ou Sciences Po à Nancy pour dénoncer les candidats du deuxième tour qui mettent en danger leur avenir. « Emmanuel Macron et Marine Le Pen négligent nos préoccupations sociales, écologistes, féministes et antiracistes. Nous ne pouvons et nous ne voulons pas subir cinq nouvelles années de libéralisme débridé ou de nationalisme autoritaire », dit le communiqué des manifestants. Le vainqueur de ces élections peut s’attendre à un troisième tour social dans la rue du type gilets jaunes ou insurrection populaire car la bourgeoisie française oublie souvent que le peuple français est coutumier de ses luttes.

Bien que la France soit très présente symboliquement en Afrique, celle-ci ne se reconnaît pas dans l’un ou l’autre de ses candidats. Emmanuel Macron a perdu le charme de sa jeunesse en Afrique en se révélant comme tous les présidents de la Ve République française, un adepte de la Françafrique, soutien de la succession dynastique au Tchad, et comptable de l’échec de l’intervention militaire française au Sahel. Cette défaite militaire face aux groupes terroristes qu’il ne veut pas assumer et qu’il veut mettre sur le dos de ses alliés a contribué à la dégradation poussée de l’image de la France en Afrique.

Marine Le Pen la candidate de l’extrême droite est vue par certains comme une alternative à la fin de la Françafrique, puisqu’elle lutte contre le grand remplacement par les musulmans et les immigrés, elle couperait les ponts avec les anciennes colonies pour bien se barricader et fermer ses frontières. Mais ceci est une vision naïve, car elle peut fermer la France à l’Afrique et vouloir tous les avantages que la France a avec ses anciennes colonies notamment le franc CFA et les entreprises françaises en Afrique.

L’élection présidentielle en France concerne les Français et les deux candidats au second tour ne vont pas faire de cadeaux aux Africains s’ils sont incapables de se défendre contre le terrorisme, d’assumer leur souveraineté monétaire, économique et politique.

Sana Guy

Lefaso.net

Source: LeFaso.net