Les réseaux sociaux en Afrique font parfois preuve de cruauté, lors de certains drames et il faut avoir le cœur bien accroché pour lire certaines publications. La mort de l’ancien Premier ministre d’Ibrahim Boubacar Keita, Soumeylou Boubeye Maïga le lundi 21 mars à la clinique Pasteur de Bamako a relancé un débat qui a cours au Sahel, sur l’évacuation sanitaire des dignitaires emprisonnés.
Certains internautes pensent que ce n’est que justice que de laisser les anciens dignitaires se soigner enfin en Afrique, quand ils sont en prison, parce qu’ils n’ont rien fait du temps de leur passage aux affaires du pays pour améliorer le plateau technique des formations sanitaires. Soit, mais si les formations sanitaires du pays déclarent qu’elles ne peuvent pas offrir les soins nécessaires au malade, ne doit-on pas laisser le détenu malade aller se soigner, s’il en a les moyens ? Voilà la question à laquelle le régime de transition du Mali n’a pas su répondre avant le drame.
La radicalité de certains discours et le manque de compassion face à la souffrance des dirigeants qui sont tombés en disgrâce et connaissent les affres de la prison et de la maladie est parfois le signe de la veulerie de certaines personnes qui, quand les mêmes étaient au fait de leur gloire, ont fait preuve du plus grand aplatissement et de flagornerie envers ces hommes.
Est-ce pour effacer tant de bassesses que cette engeance ne veut point de quartier pour les « en haut d’en haut » tombés plus bas, que bas ? Pourquoi les dirigeants du moment prêtent ils une oreille attentive à ces militants de la haine qui refusent l’humanité à ceux qui sont à terre ?
La mort du détenu Soumeylou Boubèye Maïga relance le débat, puisque sa famille avait demandé son évacuation sanitaire au vu de la forte dégradation de son état de santé pour qu’il puisse bénéficier des soins à l’étranger que les hôpitaux du Mali ne pouvaient pas lui offrir.
La faute des colonels au pouvoir à Bamako
Le détenu, Soumeylou Boubeye Maïga qui s’est éteint, faute de soins adéquats, est inculpé pour l’affaire de l’avion présidentiel et est accusé de corruption et de détournements de fonds publics. Il a été incarcéré depuis août 2021. Il n’a pas été jugé et condamné et est présumé innocent. Sa santé s’est dégradée en prison où il a perdu plus de 20 kg. Malgré les demandes répétées de sa famille avec à l’appui des attestations de sommités médicales maliennes qui demandent son évacuation, le régime est resté sourd aux supplications et n’a montré aucune empathie, aucune compassion, sauf son transfert de la prison à la clinique Pasteur de Bamako, où il est décédé.
Que s’est-il passé pour que les responsables de la junte, le Premier ministre Choguel Kokala Maïga, n’aient pas senti que cet homme quand bien même colosse pourrait claquer entre leurs mains ? Nous sommes tous des hommes, donc vulnérables, c’est notre lot commun, et nous devons être sensibles à la souffrance des autres.
Défendre l’Etat et le pays, être intraitable face aux intérêts du peuple, n’exige pas de tuer en nous la part d’ange et de divinité. C’est cette part qui nous fait reconnaître en tout être humain, notre frère, qui a droit à la vie et qui ne doit pas souffrir sans assistance de notre part. Cela exige de nous de le soulager de ses douleurs et ses peines. Voilà où git la faute du régime de Bamako.
L’ex président burkinabè Roch Marc Christian Kaboré a été confronté au même problème que les jeunes colonels avec la maladie du général Djibril Bassolet condamné dans le cadre du putsch manqué de 2015 à 10 ans de prison au Burkina, après quelques temps d’hésitations, il a laissé le général Bassolet aller se soigner en France en 2020 contre une caution de 30 millions de francs cfa selon wikipédia https://fr.wikipedia.org/wiki/Djibrill_Bassol%C3%A9.
Grand bien lui en a pris et il peut se réjouir de cela, car il est aujourd’hui lui-même en résidence surveillée suite au coup d’Etat du 24 janvier 2022.
Si le régime malien craignait que l’ancien Premier ministre d’IBK ne rentre pas au Mali après les soins, comment va-t-il le juger maintenant qu’il est mort ? La mort de SBM est une faute politique, car elle ne profite à personne, c’est une perte pour le Mali et pour l’Afrique.
Pour Asimi Goïta qui veut mettre ses pas dans ceux du géant panafricaniste, Modibo Keita, le premier président du Mali indépendant, son ami et frère du Niger, Mohamed Bazoum lui rappelle qu’en cette circonstance, c’est plutôt le chemin de ses assassins qu’il a emprunté.
Sana Guy
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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