L’Association pour la promotion de la démocratie et la participation citoyenne (APDC) a organisé le dimanche 6 mars 2022, un panel sur la paix à Ouagadougou. De concert avec le Cadre de concertation nationale des organisations de la société civile (CCNOSC), ledit panel s’est tenu sous le thème : « Rôle des leaders politiques, religieux et coutumiers dans la préservation de la paix sociale en Afrique : Cas du Burkina Faso ».

« Je saisis l’opportunité qui m’est offerte pour solliciter des autorités coutumières et religieuses de plaider auprès des nouvelles autorités pour la libération du président Roch Marc Christian Kaboré et favoriser le retour de tous les exilés politiques ». C’est le vœu émis par Safiatou Lopez à l’occasion de l’ouverture du panel sur la paix. À l’entendre, c’est seulement ensemble qu’ils constitueront une force capable de construire le Burkina.

C’est un hommage à la mémoire des victimes du terrorisme en Afrique et au Burkina Faso en particulier qui aura planté le décor du panel sur la paix. À cet effet, un temps de silence a été observé pour les forces de défense et de sécurité, les volontaires pour la défense de la patrie et toutes les vies fauchées par ce phénomène.

Rappelant la citation : « la paix n’est pas un vain mot mais un comportement » du président ivoirien, feu Félix Houphouët Boigny, la présidente d’honneur, Safiatou Lopez a indiqué que la paix est une quête permanente. C’est ainsi qu’elle s’est interrogée sur les conditions à réunir pour instaurer et conforter un climat de paix entre Burkinabè à tous les niveaux et dans tous les domaines.


C’est dans ce sens que Safiatou Lopez estime que la tenue d’un dialogue national inclusif s’avère indispensable pour revisiter tous les sujets sensibles qui minent la démocratie, l’État de droit et la vie sociale. « Le dialogue national aurait pour objectif de définir des règles fondamentales que tous les acteurs politiques et sociaux auraient l’obligation de respecter, aujourd’hui et pour toujours. Du reste, ce panel s’inscrit dans cette optique », a-t-elle insisté.

Pour Mme Lopez si « nos différences sont un problème », elles sont aussi un atout et une richesse lorsque « nous les laissons s’exprimer en bonne intelligence ». Elle explique en effet qu’au moment où l’arène politique met à rude épreuve les valeurs en compromettant la paix, les regards se tournent vers les gardiens de la paix sociale que sont les leaders religieux et coutumiers. Ils sont selon elle, les maillons forts des mécanismes traditionnels de prévention des conflits.

Un aperçu des participants au panel avec pour thème : « Rôle des leaders politiques, religieux et coutumiers dans la préservation de la paix sociale en Afrique : Cas du Burkina Faso ».

Au regard du thème évoqué, la présente rencontre a connu la participation de panelistes comme Newton Ahmed Barry, le Balkuy Naaba et bien d’autres autorités coutumières et religieuses.

L’ex président de la CENI et journaliste Newton Ahmed Barry a lui, communiqué sur le thème « Terrorisme et instabilité politique en Afrique : Cas du Burkina Faso ». A l’entame de son propos, le paneliste a partagé avec le public la formule d’un grand stratège militaire chinois qui a fait la théorie de la guerre. « A l’occasion d’une guerre, si vous connaissez votre ennemi et si vous vous connaissez bien, toutes les batailles que vous allez engager, vous allez les gagner… », reprend-il. Ramenant cette affirmation au contexte de la crise sécuritaire que traverse le Burkina Faso, Newton Barry s’est posé les questions suivantes. « Est-ce que nous connaissons l’ennemi ? Est-ce que nous nous connaissons ? «

« Lorsque l’on regarde l’évolution depuis 2015, on a l’impression de façon nette que les terroristes savent où exactement ils veulent nous emmener », Newton Ahmed Barry, journaliste, ex président de la CENI

L’orateur répondra lui-même à cette interrogation. « Quand on regarde la configuration dans laquelle nous sommes aujourd’hui, depuis 2015 que notre pays a mis le pied dans la spirale terroriste, la réponse qui paraît la plus évidente mais qui n’est pas bonne à entendre, c’est que non seulement on ne connaît pas l’ennemi mais nous-mêmes, on ne se connaît pas », souligne-t-il.

De son analyse, tant que ce problème crucial de la bonne connaissance de l’ennemi et de soi-même ne sera pas résolu, les actions entreprises contre l’hydre terroriste seront semblables à de la “navigation à vue” avec très peu de résultats sur le terrain.

« Lorsque l’on regarde l’évolution depuis 2015, on a l’impression de façon nette que les terroristes savent où exactement ils veulent nous emmener. Donc ils savent quels sont les moyens et les méthodes à mettre en place pour déstabiliser progressivement mais méthodiquement notre société », indique Newton Barry.

Il laisse entendre également que le terroriste est un individu qui n’a pas de père, ni d’ethnie ni même de village encore moins de pays. Avant d’étayer ses propos par la suite. « Les premières apparitions réelles du phénomène djihadiste et terroriste dans la province du Soum, dans un processus de détricotage et de déstabilisation du pays, ont pris naissance dans les familles », soutient-il.

À l’en croire, certains terroristes sont venus tuer leur propre père qu’ils ne considéraient pas comme suffisamment musulmans à leurs yeux. « Quand on tue le chef de la famille, cela veut dire qu’on a disloqué la famille. Donc ils se sont attaqués d’abord à la première cellule de base de toute société », a expliqué M. Barry.

Les autorités coutumières au panel de la paix

Il poursuivra en précisant que les terroristes sont allés au-delà des familles. « Au niveau du village, ils ont tué le chef, les imams et toutes les personnes ressources notamment des conseillers municipaux. Ce qui a progressivement déstructuré également les villages », fait-il ainsi l’historique de ce phénomène assez complexe.

Pour ce qui est des communautés, Newton Ahmed Barry a rappelé les attaques orchestrées par les groupes armés à Yirgou et à Arbinda. Il rendra cependant grâce à Dieu du fait qu’ils n’aient pas réussi à opposer jusqu’à présent les religions entre elles.

De ce fait, Newton Barry a lancé un appel à l’ensemble des chefs coutumiers et religieux face à la menace imminente pour qu’ensemble ils puissent se donner la main pour parler un même langage afin d’éviter le chaos.

Le Balkuy Naaba a dans cette dynamique interpelé ses homologues à être exemplaires et irréprochables sur tous les plans en vue de mériter la confiance des populations. Il les a également exhortés à revenir aux valeurs traditionnelles du pays gage d’une paix véritable.

Hamed NANEMA

Lefaso.net

Source: LeFaso.net