Après avoir demandé la démission de l’ex-président, Roch Kaboré, plusieurs organisations et mouvements de la société civile battent le rappel des troupes ce samedi 19 février 2022 à Ouagadougou à partir de 14 h pour un « giga-meeting » de « soutien » au Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) et de « sensibilisation » aux enjeux de la transition. A 24 heures de ce rendez-vous, le responsable à la communication digitale, Lucien Zié, par ailleurs secrétaire général du Mouvement le Faso, ma patrie (MFP), en dit davantage.

Lefaso.net : Vous êtes de ces mouvements qui ont appelé à la démission de Roch Kaboré et qui se sont mobilisés à cet effet. Comment avez-vous accueilli donc l’arrivée de nouvelles autorités, le MPSR ?

Lucien Zié : Nous avons engagé le combat pour la démission de Roch Kaboré pour les raisons qui ont sous-tendu cette exigence. C’est tout naturellement donc que nous avons accueilli avec allégresse, l’arrivée de l’armée, qui a décidé de prendre ses responsabilités pour éviter le naufrage du pays. Nous avons vu en cela un sursaut patriotique.

Raison pour laquelle nous nous sommes réorganisés avec d’autres mouvements au plan national pour pouvoir encore affirmer et soutenir le MPSR dans son élan de lutte contre l’insécurité et de restauration des valeurs que le pays a perdues. Ce sont les militaires qui étaient envoyés à la boucherie. Si eux-mêmes (militaires, ndlr) décident de refuser cette boucherie qui leur était imposée, nous disons que c’est un acte salutaire.

C’est salutaire parce que ce sont les militaires le noyau opérationnel qui peut apporter des réponses à l’hydre terroriste. Donc, nous pensons qu’étant devant maintenant, on ne sera plus dans des discours sans action. Ils vont certainement trouver des stratégies pour se défendre, défendre les populations et faire en sorte que les déplacés internes regagnent leurs localités.

Le président du MPSR, président du Faso, a déroulé sa vision, notamment la restauration de l’intégrité du territoire, le retour des déplacés internes, la moralisation de la vie publique… La partagez-vous ?

Nous la partageons totalement, d’autant plus que l’une des causes majeures qui ont poussé à des manifestations sur l’ensemble du territoire national, c’est l’insécurité. Les lignes ne bougeaient pas à ce niveau. Il a fallu que nous annoncions la marche du 27 novembre 2021 pour que le président du Faso d’alors sorte de son sommeil pour constater qu’il y avait des dysfonctionnements au niveau de l’armée.

Or nous pensons que diriger un pays, c’est savoir identifier les problèmes qui minent les structures opérationnelles qui offrent les services aux populations. C’est pourquoi nous adhérons à la feuille de route déclinée par les nouvelles autorités. Elle indique clairement la détermination à s’attaquer au phénomène d’insécurité ; il va de soi que nous partageons donc cette vision.

Outre ce point sur l’insécurité, les nouvelles autorités ont parlé de questions de probité, la dépolitisation de l’administration. Ce sont des aspects qui répondent à la demande des populations. Si vous avez des hommes de qualité, les populations auront un service de qualité. Nous partageons donc totalement et soutenons cette vision du MPSR.

Depuis leur arrivée, certains observent, d’autres appellent tout de suite à des actions. Vous vous placez à quel niveau ?

Ceux qui appellent à aller tout de suite à l’action sont, en général, ceux-là qui ne l’ont pas fait sous le pouvoir Roch Kaboré. Ils ont fait semblant de ne pas voir l’urgence. D’autres se sont mêmes comportés en super-conseillers sur les réseaux sociaux. S’ils avaient été lucides sous Roch Kaboré pour apporter ces conseils, le pays n’en serait certainement pas là.

S’ils avaient mis la même fougue de communication sous Roch Kaboré, nous ne nous serions pas enfoncés durant ces sept ans de pouvoir. Donc actuellement nous ne sommes pas des observateurs, nous soutenons toujours l’action du MPSR, de même que nous l’encourageons également à l’action. Mais, il faut d’abord qu’il (le MPSR) soit bien assis et organisé avant de prendre son envol, d’aller à l’action. Il ne peut pas prendre des contingents envoyer au front sans un dispositif minimum.

Le Burkina Faso est attaqué depuis avril 2015. Donc, si le président Paul-Henri Damiba estime qu’il faut mettre en place un centre national de coordination des opérations et bien d’autres dispositifs, si ça va dans le sens de combattre le terrorisme, nous accompagnons. Nous demandons que les actions soient bien préparées afin de nous permettre d’atteindre les objectifs.


Vous êtes allés en rangs serrés avec un certain nombre d’organisations pour exiger la démission de Roch Kaboré. Aujourd’hui, c’est une nouvelle ère qui s’est ouverte pour le Burkina. Quelle est la priorité à votre niveau ?

La priorité, c’est de mener un combat de sensibilisation. Faire comprendre aux populations la nécessité d’être alertes et de ne pas se laisser entraîner par ces hommes politiques qui ont usé de leurs moyens pour nous prendre en otages. Il s’agit de faire comprendre aux populations que nous avons toujours des hommes de qualité et parmi lesquels ces nouvelles autorités qui ont posé un acte de sursaut patriotique. De ce fait, nous devons les accompagner dans leur volonté de sauvegarder notre pays.

Donc la sensibilisation est vraiment notre priorité et nous espérons qu’il en est de même pour d’autres organisations. Une autre priorité, c’est d’observer les actions autour des dirigeants ; ce qui ne va pas, il faut le dire. Il ne faut pas applaudir quand ça ne va pas. De même, il faut savoir encourager quand c’est bon. C’est d’ailleurs dans cet esprit d’encourager les nouvelles autorités à aller dans le sens de leur vision, que l’ensemble des Burkinabè partagent et de sensibiliser que nous avons décidé d’animer un meeting ce samedi 19 février à la Place de la nation.

Justement, pouvez-vous en dire davantage sur ce meeting annoncé pour ce samedi 19 février ?

Nous avons estimé qu’après le combat pour la démission de Roch Kaboré, il était bon de se réorganiser. C’est ainsi que nous avons fait une large ouverture pour prendre en compte d’autres associations et mouvements de la société civile qui étaient à l’écart ou qui observaient le silence.

Si fait qu’aujourd’hui, nous constituons un grand groupe et nous nous sommes dits qu’il est bon de se retrouver le samedi 19 février 2022 à partir de 14h à la Place de la Nation de Ouagadougou pour un giga-meeting. Au cours de ce rassemblement populaire, nous allons tenir un discours de mobilisation pour dire au peuple burkinabè, aux fils et aux filles de ce pays, de s’unir pour accompagner le MPSR pour que nous ayons un Burkina nouveau, un Burkina conquérant, un Burkina prospère.

Qui sont les organisateurs et combien de mouvements et associations soutiennent l’activité ?

Les organisateurs sont nombreux. Nous avons mis en place d’abord un comité d’organisation composé d’environ 18 commissions et dont je suis le responsable de la commission web-com (communication sur les réseaux sociaux). Les commissions sont composées des responsables des différents mouvements et associations qui constituent la coalition.

On ne peut pas dénombrer les mouvements et associations. Vous remarquerez que rien que pour aller rencontrer le président Paul Henri Damiba, il y en avait plus de 100. Mais à ce jour, sur la base des listes que nous avons à notre niveau, il y a plus de 300 associations et mouvements (il y a des mouvements qui regroupent plusieurs associations). Mais s’il y a une liste exhaustive, c’est largement au-delà de ce nombre (300). C’est l’ensemble de ces organisations, qui regroupent toutes les couches socio-professionnelles, qui appellent à la mobilisation ce samedi 19 février à partir de 14 heures à la Place de la nation.

La mobilisation se fait déjà sur le terrain à travers les bases des mouvements et associations qui composent la coalition. Ce meeting est vraiment un moment de sensibilisation, d’encouragement et de soutien aux nouvelles autorités afin qu’elles répondent aux attentes du peuple, comme elles se sont courageusement et patriotiquement engagées. En plus des messages, nous aurons la prestation d’artistes qui ont décidé d’apporter leur voix à l’évènement.


Le meeting se tient uniquement à Ouagadougou ou dans d’autres villes également ?

Il y a d’autres localités, telle que Tenkodogo (région du Centre-est) où il y aura également un meeting de soutien. Il y en aura aussi à Pô (Centre-sud) et dans bien d’autres villes. Des responsables en charge de ce volet pourraient donner davantage d’informations sur cette question, il y a une commission dédiée à cet aspect. Il faut dire qu’à Bobo-Dioulasso déjà la semaine passée, il y a eu une marche de soutien au MPSR, une marche organisée par plusieurs mouvements et associations. Le « Mouvement Le Faso, Ma Patrie », par exemple, a une représentation à Bobo-Dioulasso qui abat un travail colossal.

Quel va être le principal message de ce meeting, sa particularité ?

C’est pour donner le ton d’un nouveau combat que nous allons mener. Vous voyez, le peuple malien est aujourd’hui frappé par une sanction. Mais, si les autorités maliennes tiennent jusque-là, c’est parce que le peuple s’est dressé comme un seul homme derrière elles. C’est ce qui fait leur force. Aujourd’hui, le peuple burkinabè se retrouve approximativement dans la même situation que le peuple frère du Mali. Donc, il faut que nous puissions unir nos forces.

Il faut s’apprêter à faire face à d’éventuelles sanctions. Cela passe par une information et une sensibilisation du peuple. C’est donc un combat d’ensemble et le peuple doit s’engager et soutenir le MPSR pour qu’il puisse nous sortir de l’ornière et aider le pays à recouvrer les valeurs que nous avons perdues et que nous appelons de tous nos vœux. On va donc se parler pour qu’au niveau de la société civile également, on puisse jouer notre rôle.

Justement, la société civile, et même les partis politiques, n’ont pas bonne presse auprès de l’opinion publique. Quel commentaire en faites-vous ?

Exprimer cela sans distinction, ça pose problème. C’est vrai, les partis politiques ont atteint leurs limites objectives, parce que les schémas politiques qu’ils ont dans leur programme de société et autres ne sont plus aptes à apporter des réponses à nos préoccupations. Du coup, il est clair que les gens puissent dire ainsi. Au niveau des organisations de la société civile, il y en a également qui ont des comportements indécents.

Le rôle d’une OSC (Organisation de la société civile), c’est de veiller au grain, être actrice de sensibilisation et porter la voix des populations aux dirigeants. Si en tant qu’OSC, vous n‘êtes pas dans ce schéma et que vous vous comportez à amadouer même ce peuple, ça pose un souci. L’environnement n’est donc pas sain et il appartient au MPSR de donner la directive. Lors de notre rencontre avec le président, Paul Henri Damiba a lui-même dit que si nous en sommes à là, c’est parce qu’il y a eu des dysfonctionnements au niveau des partis politiques et de la société civile. Chacun doit donc se remettre en cause pour que le pays puisse repartir sur de bonnes bases.

Nous, en tant que mouvement avant-gardiste, nous allons poursuivre la réflexion, sans faux-fuyants. Il faut se dire la vérité, parce que notre avenir dépend de notre rapport avec la vérité aujourd’hui. Si nous échappons à ce principe, nous allons payer demain le prix. Voilà pourquoi, c’est essentiel pour chacun, pour chaque entité, de faire son auto-crique. Mais, il ne faut pas aussi jeter l’anathème sur tout le monde. Même au niveau politique, il y a des gens qui sont à prendre. Par exemple, au niveau du MPP, il y a des gens qui sont-là, très corrects, patriotes, qui peuvent même apporter le meilleur d’eux-mêmes pour arranger tout le peuple.

Malheureusement, ces personnes étaient englouties dans un système vicieux, elles ne pouvaient pas faire autrement. C’est pourquoi, je pense que l’avènement du MPSR est une opportunité pour tout le monde maintenant de pouvoir apporter un plus dans ce que le MPSR a entrepris et entend entreprendre pour le pays.

Quel message par rapport à votre activité de demain ?

Nous appelons toutes les filles, tous les fils du Burkina Faso et les organisations de la société civile qui ne sont pas sur le front, à se lever et à saisir cette occasion pour pouvoir transformer notre pays. Qu’on se mobilise pour apporter notre soutien aux nouvelles autorités afin de leur permettre de prendre confortablement des décisions qui arrangeraient la majorité. Nous invitons donc tous les Burkinabè à sortir massivement à la Place de la nation pour un gigantesque-meeting de soutien au MPSR.

Propos recueillis par O.L

Lefaso.net

Source: LeFaso.net