Membre de l’équipe de volley-ball sous la révolution burkinabè, Inoussa Congo, aujourd’hui âgé de 67 ans, a comparu devant le juge d’instruction en tant que témoin dans l’assassinat de Thomas Sankara et douze de ses compagnons. Sa déposition a été lue, jeudi 23 décembre 2021, à la Chambre de jugement du tribunal militaire de Ouagadougou.
Adjudant chef major à la retraite, Inoussa Congo était membre de l’équipe de volley-ball en 1987. Absent du procès sur l’assassinat de Thomas Sankara et ses compagnons, son témoignage a été lu par le greffier en chef.
Il ressort de sa déposition qu’il se trouvait au conseil de l’Entente pour une séance d’entraînement dans la soirée du 15 octobre 1987. C’est étant à ce lieu, qu’il dit avoir vu le cortège du président Thomas Sankara arriver pour la réunion. Il dit avoir vu plus tard le lieutenant Gilbert Diendéré lever la main pour appeler. « Le caporal Traoré Lamine qui était près de moi a couru vers lui. Il est allé et revenir me dire que ce n’est pas lui qu’on appelait mais que c’était moi. Le lieutenant Diendéré a appelé un autre soldat, le regretté Sawadogo Charles. Nous étions maintenant deux à côté de lui et nous marchions. Le lieutenant Diendéré nous a dit que la situation est gâtée et qu’il a été donné l’ordre de nous attaquer. J’ai rétorqué : qui va nous attaquer ? Ce n’est pas le président qui vient de rentrer ? J’ai dit d’aller voir le président. »
Le témoin se souvient que les tirs ont commencé lorsqu’ils ont commencé à aborder les premières marches. C’est alors que lieutenant Diendéré et le regretté Charles auraient continué à monter les marches du bâtiment. Pendant ce temps, le témoin prend la poudre d’escampette en tentant à trois reprises d’escalader un mur. La quatrième tentative sera la bonne. Il se retrouvera par la suite dans le canal qui longe l’axe principal qui passe devant le conseil de l’Entente. Il fera la rencontre d’une femme paniquée qui essayait vainement de démarrer sa moto, alors que le contact de l’engin était au point mort. Après l’avoir aidé à démarrer la moto, il conduira ladite dame au quartier Dapoya avant de décliner son offre de rentrer chez lui avec sa monture pour la lui ramener le lendemain.
Le 16 octobre 1987, Inoussa Congo ira au mess des sous officiers où il logeait. Là, un militaire lui dit que « le lieutenant Diendéré a envoyé quelqu’un trois fois venir me chercher », se souvient le témoin. Il demandera alors à son cousin de le conduire au conseil de l’Entente. Par peur, ce dernier refuse mais le dépose au rond-point des Nations unies. De là, Inoussa Congo fait le chemin à pied jusqu’au conseil de l’Entente. Arrivé, il trouve le lieutenant Diendéré avec d’autres collègues avant d’aller se changer. Et ce n’est que deux ou trois jours après les événements, qu’il fera partie d’une mission d’information conduite par l’actuel général de brigade Pingrenooma Zagré (ambassadeur du Burkina au Ghana) dans la ville de Pô. Mais, au retour de la mission à Ouagadougou, Inoussa Congo préféra rester à Pô.
Devant le juge d’instruction, il y a eu une confrontation entre le témoin et le général Diendéré sur la présence ou non de ce dernier au conseil de l’Entente, au moment des tirs. Gilbert Diendéré a toujours soutenu qu’il se trouvait à l’extérieur du conseil de l’Entente, près du terrain de l’Ecole nationale d’administration et de la magistrature (ENAM) lorsqu’il a entendu les tirs. Il aurait alors décidé de revenir au conseil. Prudent, il se serait rendu à la permanence au niveau de la villa Togo avant d’avancer vers le bâtiment d’où provenaient les coups de feu « tout en prenant le soin d’éviter les balles ».
Le général Diendéré a donc balayé d’un revers de main le témoignage d’Inoussa Congo. « Le 15 octobre 1987, je n’ai pas eu affaire à lui. Peut-être après mais pas le 15. Il a lui même dit qu’il était venu au sport ce jour-là. Moi-même, j’ai été surpris pas les événements », avait-il déclaré lors de la confrontation.
A la question du juge d’instruction de savoir s’il avait déposé sous la contrainte, le témoin a répondu par la négative. Mais, il dira « L’homme a une mémoire courte. J’ai cru que ce que j’ai dit était le film de ce qui s’était passé ». Inoussa Congo s’est confondu en excuses si ses déclarations ont « grillé » le général car cela n’était pas intentionnel.
HFB
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Source: LeFaso.net
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