L’organisation de la société civile, Balai Citoyen, a porté plainte, dans la matinée de ce mardi 29 juin 2021, devant le tribunal de grande instance de Ouaga I. Une plainte contre le gouvernement pour « non-assistance à personnes à danger » dans le massacre de Solhan et formulé une dénonciation de faits pouvant constituer des infractions pénales au sujet d’une implication supposée de l’homme d’affaires burkinabè, Apollinaire Compaoré, dans le financement de terroristes.

A la sortie du palais de justice, la délégation du mouvement, Balai Citoyen, a livré une déclaration à la presse, dont nous vous proposons l’intégralité (lue par le porte-parole, Serge Bambara alias Smockey).

Mesdames/messieurs de la Presse nationale et internationale,

Le mouvement le Balai Citoyen porte à votre connaissance qu’en lien avec la situation sécuritaire préoccupante dans notre pays, il vient d’accomplir deux actes juridiques ce matin, dont la nature et les motivations vous seront livrées.

Ces actions ont consisté d’une part, au dépôt d’une plainte auprès du Procureur du Faso près le tribunal de grande instance de Ouaga I dirigée contre le Gouvernement du Burkina Faso formé par décret n°2021-002/PRES/PM du 10 janvier 2021 pour non-assistance à personnes en danger. D’autre part, une dénonciation de faits pouvant constituer des infractions pénales auprès du Procureur du Faso près le tribunal de grande instance de Ouaga I afin qu’une enquête diligente soit ouverte pour faire toute la lumière sur les faits graves de financements des groupes terroristes.

Sur la constitution de la plainte contre le Gouvernement, faut-il encore le rappeler, depuis la première attaque terroriste en 2015, la lutte contre le terrorisme constitue un défi majeur du Burkina Faso. Force est cependant de constater que la situation se dégrade d’année en année, malgré l’accroissement du budget de la défense. Le nombre d’attaques avec pour conséquence l’accroissement du nombre de morts, de blessés, de personnes déplacées internes et de territoire occupé par l’ennemi en est la preuve. Il est clair que l’ennemi déploie sa stratégie sans trop de difficultés. A la question légitime sur la stratégie nationale de lutte contre le terrorisme posée au Premier ministre lors du discours sur la situation de la nation, l’opinion nationale a été choquée d’entendre qu’il n’existait pas de stratégie.

Le massacre de 132 personnes abandonnées à leur triste sort dans la nuit du 4 au 5 juin 2021 dans la commune de Solhan dans la province du Yagha constitue le symbole de cette incapacité notoire, voire de l’insouciance du Gouvernement à protéger les populations contre le péril terroriste. En particulier, la non-intervention du détachement militaire basé à Sebba et la durée de l’attaque qui a été d’environ 4 heures de temps ont poussé le Balai Citoyen à formuler cette plainte contre le Gouvernement pour non-assistance à personnes en danger.

Ce drame n’est malheureusement pas le seul élément de fait qui démontre l’incapacité notoire des hautes autorités de ce pays à assumer une tâche minimale de leurs fonctions.

L’agenda gouvernemental est guidé par des préoccupations politiciennes et partisanes aux antipodes de l’urgence sécuritaire et au mépris de la souffrance du peuple. En effet, la priorité du Gouvernement est de déployer son agenda de « réconciliation nationale » pour gaspiller les maigres ressources financières et promouvoir l’impunité.

Il n’échappe à personne que cet agenda aventurier n’apporterait ni l’arrêt des attaques avec leur cortège de morts, ni l’occupation du territoire, encore moins le retour des déplacés dans leurs localités car, les causes sous-jacentes des attaques terroristes demeureront : l’inconséquence du gouvernement, l’injustice, les inégalités sociales, l’absence de stratégie de lutte, etc. Cela démontre à souhait que le Gouvernement a consciemment fait le choix d’abandonner les populations à leur triste sort face au péril terroriste.


Face à cette trahison d’un gouvernement insouciant, face aux appels au secours de populations en détresse qu’il a l’obligation de protéger en tout temps et en tous lieux, le mouvement Balai Citoyen demande à la justice d’en tirer toutes les conséquences de droit prononcé.

Quant à la dénonciation de faits pouvant constituer des infractions pénales, elle est fondée sur l’article de presse paru dans le n°441 du 10 mars 2021 du journal L’Evénement. Cet article qui fait suite à une investigation menée à l’échelle internationale révèle des informations troublantes liées au financement du terrorisme dans le sahel.

Le Balai Citoyen est surpris que face à des accusations aussi graves et précises révélées depuis plus de 3 mois, les autorités judiciaires de notre pays restent de marbre. Ce silence est inadmissible dans un État de droit au regard de la gravité des faits qui sont allégués et du comportement de l’intéressé qui n’a pas daigné poser plainte contre les auteurs de ces révélations, mais s’emploie plutôt à coups de renfort médiatique à divertir l’opinion.

A défaut d’une auto-saisine, le Balai Citoyen a jugé nécessaire de formuler une dénonciation pour attirer l’attention du Procureur du Faso près le tribunal de grande instance de Ouaga I sur l’urgence d’ouvrir une enquête sur les faits allégués afin de faire toute la lumière sur ces accusations gravissimes.

Cette action du Balai Citoyen s’inscrit en droite ligne de ses aspirations légitimes à la justice et à l’édification d’un État de droit où nul ne doit être au-dessus des lois.

C’est pourquoi, le Balai Citoyen rappelle opportunément le droit à la présomption d’innocence des personnes mises en cause qui doit bénéficier pleinement, comme tout autre justiciable, de la protection de ses droits dans le cadre d’une éventuelle procédure.

En définitive, par ces deux actions, nous attendons de la Justice, à cette période critique de notre pays, une réaction allant dans le sens de sa responsabilité et de son rôle dans la préservation de la mère patrie contre ce péril sans précédent qui menace ses fondements. Elle doit montrer à la face du monde entier que seuls les intérêts du Burkina Faso prime sur toute autre considération.

Vive le Burkina Faso ! Vive l’unité nationale ! Vive la Justice !

Notre nombre est notre force !

Ensemble, on n’est jamais seul !

Pour le Balai Citoyen, la Coordination nationale

Source: LeFaso.net