Les votes pour la désignation du nouveau Secrétaire exécutif, qui furent sans conteste l’un des temps forts de la 55ème session de la Commission préparatoire de l’Organisation du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (OTICE), n’ont pas été concluants. En effet, après des sondages et six tours de vote organisés en deux jours, aucun des deux candidats en lice n’a obtenu la majorité des 2/3 des voix requise pour décrocher le précieux sésame.

Il faudra donc encore patienter quelques mois pour connaitre le nom du prochain Secrétaire exécutif de l’OTICE. Le Dr Lassina Zerbo, candidat du Burkina Faso et de l’Union africaine qui rebelottait pour un mandat de quatre ans, était en compétition avec le Dr Robert Bruce Floyd, candidat de l’Australie.

Initialement prévue pour se dérouler du 25 au 27 novembre 2020, la session s’est finalement tenue, du 14 au 18 décembre 2020, en visioconférence et en présentielle, compte tenu des nouvelles mesures édictées par les autorités autrichiennes dans le cadre de la lutte contre la propagation de la pandémie à corona virus.

Le processus de désignation du nouveau Secrétaire exécutif de l’Organisation du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (OTICE), conduit depuis juillet 2020 de main de maître par la Présidente de la Commission préparatoire, SE Madame Faouzia Mebarki, par ailleurs Ambassadeur d’Algérie en Autriche, devait connaitre son épilogue, le mercredi 16 décembre 2020, au Centre international de conférences de Vienne. Mais, il n’aura pas tenu toutes ses promesses en permettant de départager les deux candidats. Les consultations informelles et les sondages (straw polls) effectués, le mardi 15 décembre 2020, en vue de parvenir à un consensus sur un candidat, n’ayant pas permis d’aboutir à un désistement, le processus s’est poursuivi le mercredi 16 et le jeudi 17 décembre 2020 avec les votes in situ. Ce sont finalement 141 Etats des 144 disposant du droit de vote sur les 184 Etats signataires du Traité qui ont voté.

Le règlement adopté de commun accord a prévu six tours de vote. A l’issue du 3ème tour de vote si aucun candidat n’obtenait la majorité requise des 2/3 des voix, l’on devra procéder au classement des candidats au 4ème tour de vote.

Le premier classé est alors soumis à un 5ème vote avec un bulletin unique où les Etats sont appelés à voter oui ou non. S’il n’obtient toujours pas la majorité requise, le candidat arrivé en seconde position est à son tour soumis à un dernier round, c’est-à-dire au 6ème vote, dans les mêmes conditions. Et s’il ne recueille pas non plus le suffrage nécessaire, le processus est déclaré infructueux et devra être relancé.

Les deux candidats étaient déjà au coude à coude lors des deux tours de sondage. Ce qui présageait déjà de l’âpreté des votes à venir. En effet, l’on a abouti au sixième round sans que les votants ne soient parvenus à accorder les voix requises à l’un ou l’autre des deux candidats. Et comme l’a si bien indiqué la Présidente de la Commission, ainsi va la démocratie et il faut s’en tenir à ce mode choisi et adopté de manière consensuelle.

La candidature du Dr Lassina Zerbo, endossée par l’Union africaine, a fait l’objet d’un engagement fort et d’un lobbying des autorités burkinabè auprès de la communauté internationale. L’Ambassadeur Dieudonné Kéré et le Dr Lassina Zerbo ont également organisé de nombreuses rencontres bilatérales et régionales dans le cadre de la promotion de cette candidature. En outre, la Mission permanente du Burkina Faso à Vienne a, au nom du gouvernement burkinabè, initié diverses actions en direction de l’ensemble des Missions permanentes des Etats signataires pour solliciter leur soutien. Il convient aussi de saluer le travail de l’Ambassadeur/Représentant permanent de Tunisie, en sa qualité de Président du Groupe Africain des Ambassadeurs à Vienne, en direction des Présidents des Groupes africains des Ambassadeurs basés à New York, Paris, Genève, Bruxelles, Berlin et Addis-Abeba. Ce travail de synergie qui s’est déroulé avec la grande implication des Ambassadeurs burkinabè dans ces régions ont permis une plus grande mobilisation des voix des Etats membres en faveur du candidat Zerbo.

Il faut donc se féliciter de ce que le Groupe africain et ses alliés ont fait montre d’abnégation et de solidarité jusqu’au bout du processus. Ils ont respecté et observé du début à la fin la stratégie et les consignes qu’ils ont arrêté de commun accord. L’un des enseignements de ce qui vient de se passer est que l’union sacrée de l’Afrique et de ses soutiens autour de la candidature d’Africains compétents aura permis de tutoyer les candidats des autres continents du globe.

Le Dr Lassina Zerbo qui fut Directeur du Centre international des données au sein de l’OTICE avant d’occuper depuis 2013 le poste de Secrétaire exécutif connait bien l’institution. Tous les Etats membres sont unanimes sur sa compétence et le travail remarquable qu’il a réalisé à la tête de l’Organisation durant ces sept dernières années dans le cadre de la recherche de la paix et de la sécurité dans le monde.

De nombreux Etats membres attendent du prochain Secrétaire exécutif qu’il emploie ses compétences techniques, managériales et diplomatiques, pour amener les Etats encore « réticents » à faire le saut ultime, en vue de s’inscrire résolument dans la dynamique de la non-prolifération et du désarmement nucléaires.

Le candidat burkinabè apparaît comme l’homme de la situation. Mais son challenger australien et ses soutiens, avec en tête les Etats-Unis, l’Allemagne, le Royaume Uni, le Canada, la France, le Japon et la Belgique, confessent en coulisses être réticents à lui concéder un autre bail, quand bien même les textes de l’OTICE ne limiteraient pas le nombre de mandats du Secrétaire exécutif.

A l’issue de la proclamation des résultats, les représentants des deux candidats n’ont pas fait de déclaration. Maintenant que tout a été remis à plat, il faut espérer que le prochain Secrétaire exécutif puisse être désigné selon une nouvelle procédure avant fin juillet 2021, date de l’achèvement du mandat du Dr Zerbo. On comprend dès lors l’amertume de Madame l’Ambassadeur Faouzia Mebarki, Présidente de la Commission préparatoire, qui après avoir félicité les uns et les autres pour la transparence et le fair-play durant tout le processus, a toutefois regretté que cette 55ème session ne soit pas parvenue à désigner le successeur du Dr Lassina Zerbo.

En rappel, l’Organisation du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires dont le siège est à Vienne, en Autriche, a été créée le 19 novembre 1997 sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies. Son premier Secrétaire exécutif fut le Dr Wolfgang Hoffmann d’Allemagne (1997-2005). L’Ambassadeur Tibor Toth de la Hongrie lui succédera de 2005 à 2013 et le Dr Lassina Zerbo en est le troisième.

Simon YAMEOGO

Source: LeFaso.net