Le Balai Citoyen n’est pas du tout satisfait de la situation sécuritaire, et des scandales à répétition que connait le Burkina Faso ces dernières années. Il l’a fait savoir ce 11 juin 2020 à l’occasion d’une conférence de presse tenue à son siège à Ouagadougou.

Pour la première conférence de presse de l’année 2020, le Balai Citoyen a ratissé large. Les sujets d’actualité sont à la pelle et l’Organisation de la société civile (OSC) les a passées en revue. Les attaques terroristes ne faiblissent pas et continuent de faire davantage de victimes, aussi bien au sein des populations civiles que des Forces de défense et de sécurité. Mais le Balai constate qu’en face, la réponse du régime au pouvoir est largement en deçà des attentes.

Les conférenciers ont pointé du doigt les capacités opérationnelles de l’armée nationale qui demeurent insuffisantes, selon eux, pour garantir la sécurité sur l’ensemble du territoire. Ils en viennent à se demander pourquoi cette lenteur à fournir à l’Armée une puissance de feu suffisamment dissuasive pour neutraliser les terroristes.

« De notre conviction, le problème n’est ni le courage des hommes de rang, ni la compétence de nos officiers à dérouler une stratégie de sécurité et de défense adaptée à la situation. Le problème se situe au niveau des moyens (équipement, prime), de l’organisation (déploiement/localisation, nomination/responsabilisation, centre de décision, procédures) et des décisions politiques du régime actuel », a clamé Eric Ismaël Kinda, porte-parole du mouvement qui a introduit les échanges avec les journalistes.

Lui et ses camarades ont ainsi, « dénoncé avec la plus grande énergie » les tergiversations concernant notamment la dotation en armement adéquat des FDS, pendant ce temps, « ce sont des civils appelés « Volontaire pour la Défense de la Patrie (VDP) » qui sont armées ».


Des volontaires à encadrer

Le Balai Citoyen n’est pas contre l’institution des Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP) mis en place pour aider à la lutte contre le terrorisme. Par contre, il émet des réserves sur les modalités actuelles de leur opérationnalisation et de leur encadrement « qui comportent à bien des égards des indices dangereux pour l’avenir et doivent impérativement être revues ».

Pour étayer sa position, l’OSC indexe la durée de formation de ces volontaires qui est de 14 jours. Selon les conférenciers, ce délai est largement insuffisant pour assimiler le maniement des armes, le civisme et le respect des droits humains. « Cela ne garantit en rien que ces volontaires puissent se départir de l’esprit de vendetta », préviennent-ils.

Les conséquences de ces insuffisances dans le recrutement et l’encadrement sont déjà visibles, moins d’une année après l’opérationnalisation de ces civils en armes. « De nombreuses bavures dans les régions du Sahel, du Centre-Nord et de l’Est par exemple leurs sont attribuées par des organisations de lutte et de défense des droits humains », ont ajouté les conférenciers.

Eric Ismaël Kinda, porte-parole du mouvement poursuit en expliquant que l’encadrement n’est pas seulement matériel, militaire et technique, mais doit intégrer des données comme le respect strict des droits de l’homme dans un contexte de démocratie.

« Dans cette crise sécuritaire, il y a ce qu’on appelle la stigmatisation des communautés. Ce sont des donnes qu’il faut absolument intégrer dans la formation des volontaires pour la défense de la patrie. Sans demander que la durée de leur formation soit la même que celle des militaire de façon classique, nous pensons qu’il y a des efforts à faire », a défendu le porte-parole du mouvement.

La mauvaise gouvernance l’autre mal à combattre

La presse ne cesse de révéler des scandales dans la gestion des affaires publiques. Pour le Balai Citoyen, c’est « véritablement affligeant, qu’un régime post-insurrectionnel puisse s’offrir le luxe d’un tel record de dossiers sales et d’impopularité en très peu de temps ». Alors que le dossier dit de « charbon fin » n’est pas encore élucidé, voilà désormais celle des « folles dépenses du Maire de Ouagadougou Armand Pierre Beouindé » et bien d’autres affaires qui impliquent des bonzes du régime.

Comment peut-on demander au peuple de se serrer la ceinture alors que les princes du jour ne montrent pas l’exemple ?, se demande l’OSC. Une occasion pour exhorter les Institutions de contrôle et de répression, notamment l’ASCE-LC, ainsi que la Justice à avoir un regard particulier sur le dossier qui accable le maire de la capitale.

Dans la même veine de la mauvaise gouvernance, le mouvement a félicité le REN-LAC pour sa plainte qui a abouti à l’incarcération de l’ancien ministre en charge de la défense, Jean-Claude Bouda pour faux et usage de faux en écriture privée, délit d’apparence et blanchiment de capitaux. Sans triomphalisme, alors que le dossier est en cours, les conférenciers ont dit leur détermination à rester en veille pour l’aboutissement de la procédure.


Des élections à bonne date

En novembre 2020, le peuple Burkinabè sera appelé aux urnes pour choisir le président du Faso et les députés. Les voyants ne sont pas au vert pour l’instant, et certains groupes sociaux n’hésitent pas à suggérer le report de ces consultations électorales. Mais pour le Balai Citoyen, il faut éviter toute crise institutionnelle qui viendra se greffer aux multiples crises que vit déjà le pays. Autrement dit, il faut tenir les élections à bonne date.

« Malgré la situation sécuritaire difficile dans de nombreuses localités du pays, nous estimons que par principe, en tant que démocrates, le calendrier électoral doit être respecté (…) Ne pas tenir les élections à bonne date, reviendrait, d’une part, à capituler face au terrorisme et d’autre part, à ajouter un problème ; créer les conditions d’une crise institutionnelle et un désordre politique », ont clamé les animateurs.

Mais, se sont-ils repris, si un dialogue national est organisé avec toutes les composantes de la nation et dégage une position claire qu’il faut reporter les élections, tous les Burkinabè devront y adhérer. En attendant, le Balai Citoyen insiste pour dire qu’il ne faut pas laisser seulement les politicien « de profession », décider de la tenue ou non des élections.

Tiga Cheick Sawadogo

Lefaso.net

Source: LeFaso.net