Le Réseau des parlementaires pour l’eau, l’hygiène et l’assainissement (REPHA-BF), en collaboration avec le Secrétariat permanent des organisations non-gouvernementales (SPONG), a effectué une visite terrain, les 18 et 19 septembre 2019 à Ouagadougou. Il s’est agi de s’enquérir du mode de gestion des stations de traitement des boues de vidange et constater l’ampleur des dépotages sauvages de Ouagadougou.

« Au terme des deux jours de sortie terrain, on peut affirmer que la situation de la gestion des boues de vidange est préoccupante dans la ville de Ouagadougou, et mérite une attention particulière aussi bien de la part des autorités que des populations elles-mêmes ». Ce sont en ces termes que le coordonnateur du Réseau des parlementaires pour l’eau, l’hygiène et l’assainissement (REPHA-BF), Halidou Sanfo, s’est confié aux hommes de média.

Le coordonnateur du REPHA-BF, Halidou Sanfo

Les acteurs se sont rendus dans un premier temps à la station de boue de vidange (communément appelée « caca ») et à l’unité de production de biogaz de Kossodo, dans la zone industrielle. Fonctionnelle depuis septembre 2014, cette station est la plus grande des trois que compte la ville de Ouagadougou. Elle a une capacité d’absorption et de traitement de 400 m3 par jour. Au lieu des 30 camions de vidange par jour qui sont prévus par une étude en 2014, la station reçoit plus de 200 camions quotidiennement.

A chaque étape, les visiteurs s’entretiennent avec les gestionnaires des lieux

L’unité de production de biogaz, quant à elle, fournit 7 mégawatts/heure par jour (MWH/j) à la Société nationale d’électricité du Burkina (SONABEL).

La station de traitement de boue de vidange de Zagtouli a été l’étape du deuxième jour de tournée. Dans cette station ouverte officiellement en 2014, le constat est similaire : l’offre dépasse la demande.


Au lieu de 152 m3 par jour prévus, ce sont 250 m3 de boue de vidange que la station réceptionne chaque jour. Les 48 lits de boue dont dispose la station sont remplis, peut-on constater. Quelquefois, les gestionnaires des lieux sont contraints d’utiliser des motopompes. « On est obligé de jongler comme ça, en attendant de trouver une solution », a indiqué Soumaïla Sodré, chef du service Projet assainissement collectif.

Le président de l’AVIF, Alassane Kaboré (à gauche) et son SGA, Soumaïla Sedogo

Selon Soumaïla Sedogo, secrétaire général adjoint de l’Association des vidangeurs du Faso (AVIF), les stations de traitement ne reçoivent que 15% des boues de vidanges de la ville de Ouagadougou, et seulement 5% sont traités par les bassins. Les 85% sont déversés dans la nature. C’est ce qui est qualifié de « dépotage sauvage ».


Des dépotages sauvages à ciel ouvert

De Kossodo à Zagtouli en passant par Ouaga 2000, les élus du peuple et le personnel du Secrétariat permanent des organisations non-gouvernementales (SPONG) ont constaté des dépotages sauvages à ciel ouvert. Il y a deux types de dépotages sauvages : les boues de vidange tirées par des camions (donc mécanique) et celles qui sont extraites manuellement.


De l’avis des responsables des associations des vidangeurs présents au cours de cette visite terrain, le dépotage sauvage s’explique par le fait que les sites de traitement sont éloignés. Ils sont souvent fermés et cela coûte cher pour certains. Il faut noter que les sites perçoivent 300 francs CFA pour chaque m3 de boue de vidange.


Tout en pointant du doigt premièrement le manque de sensibilisation, le président de l’AVIF, Alassane Kaboré, dénonce également la faible capacité des sites de traitement que compte la ville. « Si les stations arrivaient à nous gérer, il n’y aurait plus besoin de venir déposer les boues de vidange dans la nature », se justifie-t-il.

Chose qui est curieuse, ceux qui s’adonnent à cette pratique sont conscients de l’infraction. « Quelle autorisation ? On se cache pour faire », confesse Alidou Bandé, le président des vidangeurs à main.


Objectifs atteints, des recommandations pour améliorer

La visite terrain s’est achevée ce jeudi 19 septembre par une conférence de presse animée au sein de l’Assemblée nationale.

A en croire le député Halidou Sanfo, l’objectif poursuivi par cette visite terrain est de faire l’état des lieux de la gestion des boues de vidange au niveau des stations de Kossodo et de Zagtouli. Il retient que la prolifération de sites de dépotage sauvage sans précautions est l’œuvre des vidangeurs manuels et de certains vidangeurs mécaniques. « Elle est essentiellement due au manque de stations pour recevoir les boues de vidange. Une situation qui peut être source de pollutions diverses et de nombreuses maladies », a-t-il déclaré.

Vue d’un dépotage sauvage de Ouaga 2000, aux alentours du ministère de la Défense

Ainsi, des recommandations ont été prises. En attendant de développer d’autres initiatives, le REPHA-BF pense qu’il est devenu nécessaire que le ministère de l’Eau et de l’Assainissement, à travers l’Office national de l’eau et de l’assainissement (ONEA), songe à mettre aussi l’accent sur le volet assainissement qui est absorbé par le volet eau potable. Les députés invitent ce même ministère à nettoyer et à mettre fin aux sites de dépotage sauvage. Le REPHA-BF exhorte le ministère de l’Eau et de l’Assainissement à adopter et mettre en œuvre urgemment la stratégie nationale d’assainissement.

Les lits de la station de Zagtouli sont remplis

Aux termes de ces deux jours de tournée, c’est une satisfaction pour la mission Fas’eau qui a inscrit cette activité dans ses objectifs. Son coordonnateur, Arnaud Adjagodo, s’est réjoui des engagements pris par les députés et par les vidangeurs qui, eux-mêmes, ont demandé la professionnalisation de leur métier.

Cryspin Masneang Laoundiki

Lefaso.net

Source: LeFaso.net