Qui est celui qui s’adresse à vous au moyen de cet écrit ? Nous sommes un instituteur qui ne ploie pas sous le poids de diplômes et titres académiques. Cependant, notre profil professionnel comporte une singularité qui tient en ceci : lorsqu’il s’agira d’opiner à propos des cinq emplois respectifs d’IA, d’IAC, d’IC, d’IP de CPI et maintenant d’IEPD, nous dirons notre mot, ayant successivement exercé à un moment ou l’autre de notre carrière chacun d’eux.
Un proverbe africain dit en substance que seul celui qui dort dans une chambre est mieux placé pour indiquer l’endroit du toit par où suinte l’eau de pluie. C’est fort donc de notre petite expérience d’instituteur, de notre petite connaissance du terrain que nous nous estimons en droit de livrer notre mémoire d’enseignant, d’égrener le souvenir gardé de moult situations vécues à travers cet écrit qui se veut aussi bien un réquisitoire qu’un plaidoyer !
Difficile, difficile d’être un enseignant du primaire et de devoir se la boucler tout le temps ! Difficile de devoir se contenter de suivre moutonnement des décisions par trop confligènes à court, moyen et long terme sans gloser. En observant attentivement la marche des choses au MENA PLN, l’on a souvent l’impression qu’un bon nombre de ses décideurs ne sont pas au parfum de certaines réalités du terrain. En scrutant certains dires, faits et gestes dans l’enseignement primaire, l’on ne peut que convenir avec Hervé Lauwick que « trop de gens conduisent en quatrième, avec leur cerveau oublié en première ».
L’illustre Amadou Hampâté Bâ nous rapporte dans « L’Etrange Destin de Wangrin » que Dayemaatien a affirmé ceci : « La parole a horreur de trois choses : être avancée avant le moment propice, n’être pas dite à temps, ou être dite après coup ». Comme il y a donc un moment, un lieu et une manière de parler selon ce sage d’Afrique, nous pensons présentement être dans l’observance de ces règles et exigences de la prise de parole. Ce sera peut-être dans la manière que certains puristes trouveront à redire mais enfin…
Des questions nous taraudent toujours l’esprit et nous voudrions, monsieur le ministre que vous nous tiriez du doute : à quoi peuvent servir les lauriers universitaires dans un pays tel que le nôtre ? En quoi les élites d’un pays « …concentré de toutes les calamités de la terre » pour emprunter les propos de Thomas Sankara peuvent-elles par leurs décisions conduire leurs compatriotes vers un mieux-être durable ? Par quels apports constructifs, exempts d’a priori et de parti pris, les autorités, à quelque département ministériel qu’elles appartiennent, peuvent-elles et doivent-elles faire en vue de garantir à tous leurs administrés une véritable promotion sociale ?
Monsieur le ministre, voyez-vous là où nous voulons en venir avec les questions posées plus haut ? Il s’agit du sort réservé à l’enseignement primaire depuis un certain temps. Pourtant, nous fondions beaucoup d’espoir que ce sous-ordre d’enseignement sortirait de la léthargie dans laquelle il se trouvait plongé depuis belle lurette.
En effet, lorsque le Président Roch Marc Christian Kaboré abordait la 2ème partie de son programme politique à l’élection présidentielle de novembre 2015, il disait ceci : « Aucun processus de développement n’est viable si l’homme n’est pas placé au centre de toutes les initiatives et actions qui doivent être menées. C’est pourquoi je m’engage à consacrer beaucoup d’efforts et de ressources au système national de santé, à l’éducation, l’enseignement supérieur, la formation professionnelle, l’emploi des jeunes, la protection sociale des travailleurs et la promotion de la femme. »
Voilà qui est bien pensé, bien formulé et admirable pour notre pays. Mais êtes-vous sûr, monsieur le ministre, que le statut dont on parle tant ces temps-ci et concernant l’enseignement primaire reste totalement en adéquation avec l’esprit et la lettre de cet engagement du Président du Faso ?
Aujourd’hui, il est de plus en plus question d’une VALORISATION du métier d’enseignant et de faire en sorte qu’il soit attractif. Mais pourquoi donc valoriser ? Pourquoi conférer un caractère attrayant à un métier que d’éminents penseurs ont assimilé à un SACERDOCE ?
Pour le citoyen lambda, lorsqu’on n’a rien, on n’est rien et on ne peut rien non plus ! Mathématiquement, – attention, il s’agit ici des mathématiques de la grande université de la vie – cela donne la formule : X-A=O2 ! Il reste bien entendu que dans cette formule atypique, X représente l’individu ; A, l’argent bien sûr et le reste se passe de commentaires. Tandis que lorsque l’on dispose d’argent, l’on est tout, même si l’on est le pire invertébré moral que la terre ait jamais porté. Mathématiquement, cela donne la formule : X+A=X1000 !
Voici donc les nouveaux théorèmes et axiomes autour desquels gravitent les acceptions et conceptions des prétendus sachants du XXIe siècle ! Mais, pouvait-il en être autrement ? Lorsque de façon délibérée, l’homme divague dans la stupidité, peut-il avoir toujours pour celui-ci des bornes ? Les barrières elles-mêmes ne tombent-elles pas devant un tel personnage ? C’est aussi là clamer à qui veut l’entendre que nos prédécesseurs avaient tort d’énoncer que « l’être est essentiel et l’avoir est accidentel ». Sacrée époque !
Eu égard donc à ce qui vient d’être énoncé et face aux multiples atermoiements traduisant les hésitations à valoriser comme il se doit les enseignants du primaire, ceux-ci, de concert, vous disent ceci, comme l’affirmait si merveilleusement bien Zao dans sa chanson « Ancien combattant » : « …moi pas besoin galons, zoutez-moi du riz (sic) ». Le talentueux Smarty du célèbre groupe de Rap Yeleen ne semble pas trop s’écarter de cette boutade dans la chanson de Génération Partage, « Le riche, le pauvre » lorsqu’il déclame : « …la pauvreté est la clé de la fatalité, tentation, vice, Satan et tous les dangers. J’aimerais nourrir d’amour mes enfants, mais le cœur et l’estomac ont des pensées différentes. »
Dans le même registre de la nécessité de la VALORISATION DU PERSONNEL ENSEIGNANT DU PRIMAIRE, le doute serait toujours permis si le premier agrégé d’histoire d’Afrique noire, l’émérite Joseph Ki-Zerbo n’avait asserté sur la question. Dans son ouvrage « Eduquer ou Périr » pp. 52-53, il affirme : « La science ne nourrit pas son homme ; or la société africaine est telle que la visibilité et la crédibilité de quelqu’un se mesurent à sa surface sociale. L’impossibilité de s’affirmer socialement équivaut à un arrêt de mort. C’est pourquoi toute revalorisation de l’éducation devra tenir compte de la réanimation du corps des maîtres, non point en tant que caste de scribes ou de mandarins, mais en tant que noyau moteur d’un « new deal » éducatif, en tant que nouveaux manuscrits d’une nouvelle bibliothèque. »
VU ? Donc, en termes clairs, en lieu et place des titres ronflants professeur ceci ou inspecteur cela, donnez à profusion des ressources financières aux enseignants du primaire qui méritent eux aussi de vivre et de mieux vivre ici et maintenant, valorisez-les véritablement en un mot !
Le décor de ce qui nous préoccupe aujourd’hui a été si brillamment planté un certain jeudi 09 janvier 2014 par l’éminent professeur de droit de l’Université Joseph Ki-Zerbo Ouaga I, Laurent Kilachiu Bado. S’adressant ce jour aux étudiants dans son mot lors de la cérémonie d’hommage organisée lors de son admission à la retraite, il leur dit ceci : « […]Je demande aux étudiants vraiment de travailler et je reconnais ce n’est pas la faute aux étudiants, vous êtes bêtes actuellement, bêtes, bêtes (rires…) , le niveau n’y est pas, mais ce n’est pas vous, c’est l’école primaire d’abord qui est foutue, il faut dire la vérité. L’école primaire est foutue !… »
Repartons premièrement aux alentours des 20 et 21 mars 1984, lors de l’historique grève des enseignants voltaïques qui revendiquaient de meilleures conditions de vie et de travail ! A l’issue de ladite grève, le 09 avril 1984 précisément, 2.600 enseignants furent licenciés et remplacés manu militari par 2000 Enseignants Révolutionnaires.
Tout comme vous vous en doutez, les commanditaires de ce licenciement n’étaient point des citoyens lambda mais figuraient bel et bien parmi l’élite dirigeante de l’époque. Des survivants de cette « tragédie scolaire » furent réintégrés dans la Fonction Publique par la suite mais leur moral était déjà profondément entamé. Pendant combien de temps encore l’école burkinabé devra-t-elle souffrir des funestes conséquences de cette erreur monumentale ?
Deuxièmement, une décennie plus tard, en février 1994 précisément, nous entrions en fonction comme Instituteur adjoint. Nous fûmes pour ainsi dire « parachutés » sans aucune formation de base sur les têtes d’innocents enfants. Seul le « Guide pédagogique à l’usage des maîtres » Version Aide-Mémoire enrichie de Mars-Avril 1991 et comportant 92 pages nous fut remis à l’ex-MEBAM comme bagage pédagogique.
Pendant que nos collègues des autres régions du pays étaient déjà formés et que d’autres étaient sur le point d’être recyclés, nous, affectés dans les Hauts-Bassins n’eûmes seulement droit qu’à un communiqué radiodiffusé reportant sine die notre session de formation initiale de 21 jours. Cela se passait durant les années scolaires 1993-1994 et 1994-1995. Nous sommes pourtant en 2019 et toujours rien à propos de cette fameuse formation des 910 IA de décembre 1993 ! Ce rappel juste pour souligner que notre formation initiale, à l’époque, ne préoccupait nullement, contrairement aux chansons à tout rompre de la garantie d’une éducation de qualité à tous les fils et toutes les filles du Burkina Faso !
Ce fut un vrai choc pour nous dans la mesure où chacun de nous espérait cette « immersion professionnelle » pour se mettre au courant et profiter de la prise en charge financière, vu que nous avions été envoyés sur le terrain sans le sou, les APE devant se charger de notre gîte et de notre couvert. Cette assistance devait d’ailleurs durer près d’une dizaine de mois. Cette sorte de « survie » aux dépens de pauvres bureaux APE peut-elle sauvegarder la dignité d’un jeune instituteur ? Rien n’est moins sûr !
En dénombrant les apprenants tenus par des instituteurs sans formation initiale comme nous l’étions à cette époque, l’on pourrait facilement se faire une idée de l’étendue de la faute professionnelle commise par des décideurs de l’ex-MEBAM ! En dépit de cela, des directeurs d’école prirent à bras le corps le perfectionnement professionnel de leurs adjoints. Ils s’y employèrent tant et si bien qu’un bon nombre d’entre nous put postuler et réussir aux examens professionnels du CEAP et du CAP.
C’est le lieu ici pour nous de rendre un vibrant hommage à tous ces bienfaiteurs qui, discrètement et de façon désintéressée nous ont appris les fondamentaux du métier d’instituteur. A vie, nous leur resterons redevables pour tout ce que nous sommes professionnellement devenus !
Troisièmement, lorsque durant l’année scolaire 2004-2005 nous fûmes en mesure de postuler au concours professionnel des Instituteurs Principaux, un obstacle de taille se dressait en travers de notre route : les termes de la Réforme Générale de l’Administration Publique (RGAP), véritable appendice des P.A.S stipulaient qu’il fallait être détenteur au minimum du BAC pour ce faire.
S’ensuivit une grande grève à l’issue de laquelle l’on autorisa tous ceux ayant été recrutés sur la base du BEPC à postuler, la mesure devant s’appliquer dans toute sa rigueur à tous ceux qui intégreront ultérieurement la Fonction Publique. Ce fut une période de grand émoi dans le monde enseignant : la Fonction Publique nous exigeait désormais des diplômes universitaires pour accéder aux emplois d’encadreurs.
La leçon fut reçue 5/5 et des milliers d’enseignants prirent d’assaut, qui les lycées, qui, les universités à la recherche de ces fameux sésames devant leur ouvrir la caverne d’Ali Baba. C’est également le lieu pour nous de rendre un hommage bien mérité à tous ces braves instituteurs, ces fiers mutants du XXI ème siècle qui, au prix d’incalculables sacrifices sont allés à la conquête des parchemins universitaires.
Les grincheux nous rétorqueront ici qu’ils ont dû sacrifier des promotions en agissant de la sorte ; ce que nous récusons car, même s’il y a eu de tels cas, les torts ne sont-ils pas à partager entre l’Administration et ces agents ? Recrutés sur la base du BEPC, un mécanisme bien pensé, incluant leur expérience et compétence professionnelles devrait leur permettre de gravir les marches de leur profession jusqu’au sommet, puisque c’est ce vers quoi tend consciemment ou inconsciemment tout travailleur.
Si entre temps, d’autres diplômes leur sont exigés, il est de bon ton, s’ils n’en étaient pas détenteurs, qu’ils trouvent des voies et moyens pour s’en approprier, au risque de demeurer statiques dans leur métier. Signalons encore ici que ce remue-ménage administratif fut ourdi par ceux-là même qui avaient la cruciale mission d’orienter vers des lendemains meilleurs le système scolaire national. Mais, comme d’habitude, les enseignants du primaire avalèrent une fois de plus la couleuvre et sa digestion fut très bien faite !
A cet épisode douloureux devraient suivre quatrièmement les enseignants dits PPTE rémunérés à 30.000 francs et ceux dits contractuels. Peu de temps après l’arrivée des derniers, il se susurrait qu’ils avaient un traitement salarial de faveur. Des bénéficiaires commencèrent à s’en vanter au point d’amener certains adjoints à rire sous cape de leurs directeurs d’école, fonctionnaires, qu’ils estimaient moins rémunérés qu’eux. Dans le même temps, les enseignants fonctionnaires s’indignaient auprès des gouvernants.
Ils estimaient que les 30.000 francs versés aux enseignants PPTE ne feraient que clochardiser ces agents et déprécierait davantage l’image sociale de l’enseignant. La solde initiale de 30.000 francs sera doublée l’année scolaire 2000-2001. Il est à signaler que la contractualisation des agents concernait l’entièreté de la Fonction Publique. Cependant, ses effets pervers ont été ressentis avec acuité dans le milieu enseignant dans la mesure où numériquement, ils en imposaient…
Cinquièmement, Il y eut les vagues successives d’enseignants du primaire détenteurs de diplômes universitaires à reconvertir en enseignants de lycées et collèges. Jamais, l’on n’avait enregistré un tel taux de rejet et de stigmatisation d’enseignants. Des professeurs de lycées et collèges voyant peut-être d’un mauvais œil l’arrivée de ces instituteurs instrumentalisèrent contre eux leurs élèves. Mais, quelques années plus tard, ces mêmes instituteurs reconvertis devraient leur ravir la vedette dans plusieurs localités du pays et pour cause…
L’instituteur n’enseigne-t-il pas à la fois la langue, l’écriture, le calcul, l’histoire, la géographie, les sciences d’observation, le sport, les activités pratiques de production, la morale, le civisme…à ses apprenants ? N’assure-t-il pas aussi auprès de ces derniers des tâches d’éducateur ? En quoi démérite-t-il face à certains enseignants qualifiés de professeur de collège ou de lycée si, muni de ses diplômes universitaires, il se reconvertit pour cette fois-ci n’enseigner comme eux qu’une ou deux des disciplines ci-haut mentionnées bien-sûr à un niveau élevé ? N’est-ce pas à juste titre que l’on affirme que : « Celui qui peut le plus peut le moins » ? Et, en dépit de tout ce qui vient d’être dit, ne vaut-il pas mieux, comme l’a si bien fait remarquer un illustre penseur SAVOIR UN PEU DE TOUT QUE DE SAVOIR TOUT D’UNE SEULE CHOSE ? Et, que dire à propos du sixième point ?
Le calvaire des enseignants du primaire ne devrait pas s’arrêter en si bon chemin ! En effet, courant 2008-2009, des CPI constatant l’injustice flagrante dont étaient victimes leurs prédécesseurs décidèrent de donner de la voix. Dans les faits, un CPI à sa sortie de l’ENS cumule après la catégorie B1 deux, voire trois années de formation, ce qui équivaut au BAC+4 ou 5 ans, si l’on se réfère aux termes d’ouverture des concours professionnels dont il est question ici. A sa sortie, il se voit reclassé injustement en catégorie A2. Pourtant, les autres fonctionnaires de l’Etat régis par la Loi 081 sont reclassés en catégorie A2 pour seulement 2 années de formation après le BAC.
La question sera prise en charge en 2011 par des syndicats du primaire sans pouvoir lui trouver une réponse idoine ! Des ragots circulaient et donnaient pour responsables des inspecteurs, suspectés d’empêcher aux CPI l’accession à la catégorie A1 où ils se trouvaient déjà. Cela est en passe de devenir une réalité avec une nouvelle variable. En effet, le statut décrié escompte reverser et les IP, et les CPI après concours en catégorie A1 pour n’avoir, selon les desiderata des actuels autorités du MENA PLN, en intelligence avec la CNSE qu’un seul corps d’encadrement.
A ceux qui se trouvaient déjà dans l’emploi d’IEPD échoit une bonification d’échelon et l’on pense avoir réglé équitablement et durablement la question. ll convient néanmoins de s’interroger et savoir ce que vaut une telle bonification en termes de compensation financière. L’IEPD, en plus des dépenses liées aux problèmes existentiels auxquels il fait face durant sa formation se retrouve aussi, une fois celle-ci achevée, avec les divers trop-perçus de toutes ses indemnités sauf celle de résidence.
Notons que ces trop-perçus varient de 18 à 60 mois de formation pour l’IEPD et qu’il les rembourse dans la plupart des cas jusqu’à son admission à la retraite. Faute de reconnaître les mérites des lauréats à ce concours terminal si sélectif de l’enseignement primaire, leur admission ne devrait aucunement signifier pour eux un « suicide professionnel » comme le laisse présager le contenu du statut en cause ici !
Septièmement, il y eut le reversement des agents de la Fonction Publique dans la nouvelle grille salariale intervenu en 2014. Ce reversement surnommé « renversement » par certains enseignants aura effectivement suscité des espoirs qui ne verront pas leur réalisation. Des formules de calcul venues d’on ne sait où circulaient et d’aucuns s’étaient si bien exercés qu’au bout du compte, ils s’estimaient en droit d’engranger tel montant. Pure présomption !
La réalité, tel un éclair ne tarda pas à dissiper les illusions à dessein entretenues. La « manne » servie était en deçà des attentes et seuls ceux qui totalisaient une ancienneté conséquente dans leur emploi obtinrent en définitive des montants enviables. Ce fut l’occasion pour certains d’ironiser et de remercier le ciel de leur avoir fait échouer à tel concours, pour finalement leur permettre d’empocher telle masse d’argent. Une réussite aux concours qui, par « malchance » minore le revenu et un échec aux mêmes concours qui, par une « chance phénoménale » le majore.
Paradoxal tout de même ! Un bon nombre d’enseignants espérait pourtant voir résoudre dare-dare et sans condition cette criarde injustice dès l’entame des négociations devant aboutir aux accords du 27 janvier 2018. Mais, la question ayant déjà été éludée par la partie gouvernementale, elle resta ainsi en suspens depuis lors jusqu’à nos jours.
Huitièmement, les enseignants du primaire n’étaient pas au bout de leur peine car, leur marche rocailleuse devrait peu après connaître une envolée avec le tout premier ministre de l’éducation de l’après Transition. De mémoire d’enseignant burkinabé, l’on n’avait jamais assisté à tant de soubresauts professionnels, à tant de bizarreries dans un secteur aussi sensible et délicat que l’Education nationale !
Certes, il y eut des acquits notables mais, la fréquence des travers finit par nous convaincre d’une évidence : la cohésion tant attendue dans le monde enseignant en général verra jour avec ce ministre. Cela ne tarda point à arriver et ainsi naquit la Coordination Nationale des Syndicats de l’Education (CNSE), même si peu de temps après, elle devait désormais vous avoir comme interlocuteur au niveau MENA PLN.
Un fait digne d’intérêt est à signaler concernant l’enseignement primaire : il y eut des vagues successives d’affectations et de mutations de complaisance ; des directeurs régionaux et provinciaux de l’éducation nationale furent évincés de leurs postes au profit d’autres cadres du post-primaire.
Des enseignants du post-primaire refusèrent aussi dans certaines localités d’être « commandés » par des DR ou des DP relevant de l’enseignement primaire. Il y eut des zones de fortes turbulences qui persuadèrent les décideurs à surseoir à telle ou telle nomination jugée provocatrice pour tel ou tel camp.
Or, Aussi loin que l’on remonte dans le temps, l’on se rendra compte que l’appropriation de l’homme par l’homme n’a laissé que de tristes souvenirs dans les annales de l’histoire. Qu’en sera-t-il désormais de l’appropriation du personnel de l’enseignement primaire par les ordres d’enseignement qui lui ont été curieusement superposés ?
Si avec la fusion des ministères, c’est toujours aux enseignants du primaire qu’il est toujours demandé de serrer la ceinture pour que d’autres puissent porter leurs bretelles, il y a lieu de revoir sans délai cette fameuse fusion qui devrait logiquement supposer l’équité et la justice dans le traitement de chaque ordre d’enseignement pris séparément, et oeuvrant tous pour la cause de l’enfant burkinabé.
C’est dans ce capharnaüm de pratiques professionnelles d’un autre âge, qu’intervint la conférence pédagogique annuelle des enseignants de l’année scolaire 2015-2016 !
Des syndicats de l’enseignement primaire qui, jusque-là avaient engrangé des acquits notables se brouillèrent.
D’une part le SNEP, en mouvement de boycott des activités administratives et pédagogiques pour exiger la satisfaction de sa plate-forme revendicative exhortait ses militants à se démarquer de la conférence pédagogique annuelle des enseignants, tandis que d’autre part, le SYNATEB, avec l’aval tacite de certaines autorités du ministère exhortait ses responsables des différentes structures et des autres structures syndicales à tenir la fameuse conférence au profit des enseignants, malgré la réserve des encadreurs attitrés.
C’est de cette façon que des syndicalistes se découvrirent subitement l’étoffe d’encadreurs chevronnés, se firent communicateurs et formateurs de « leurs enseignants » puisqu’après tout, « c’était leur conférence à eux », selon les termes de certains d’entre eux. L’on joua ainsi subtilement sur l’inconséquence notoire de ces syndicalistes que l’on instrumentalisa contre leurs encadreurs. C’est ainsi que sans gêne ni honte, des gens plongèrent leur main dans la poche du boubou qu’ils ne portaient pas à cette époque ! Mais si nos sages d’Afrique conseillent d’avoir du respect et de la considération envers les vieillards, n’est-ce pas parce que l’on suppose que l’on deviendra soi-même un jour un vieillard et que… ?
A tous ceux qui arguaient que cette situation était la résultante d’une méconnaissance de l’enseignement primaire par les ordonnateurs de cette forfaiture, nous répétions et réaffirmons encore ceci : cette démarche participait à une véritable entreprise de sabotage et de déconstruction de l’image de l’encadreur du primaire. Et l’objectif fut presque atteint !
Par la suite, et comme il fallait s’y attendre, l’aile dure du SNEP devait faire face à des revers professionnels. Effectivement, nombre de CCEB furent de manière blessante relevés de leurs fonctions, tout comme un bon nombre aussi de syndicalistes sortirent affaiblis de cet affront sans précédent.
Hier donc, c’était des syndicalistes et par ricochet des enseignants qui furent instrumentalisés contre leurs encadreurs. Aujourd’hui, ce sont les encadreurs eux-mêmes que l’on tente d’instrumentaliser les uns contre les autres avec cette réduction drastique et à la va-vite des types d’encadreurs au seul et unique emploi d’IEP ! Comme pour insinuer que de l’enseignant du primaire à son encadreur, l’on n’a affaire qu’à des inconséquents !
Cela n’est peut-être pas entièrement faux, au regard de certains propos déjà tenus, certains actes posés, et prenant tous l’ombre pour la proie. Mais pour notre part, nous osons croire qu’en définitive, le bon sens prévaudra car, lorsque survient un naufrage, quel membre de l’équipage peut-il se targuer d’être à l’abri ?
L’amer constat que nous faisons aujourd’hui, c’est que c’est un cafouillis dans la nomenclature des emplois qui est servi au monde de l’enseignement primaire, en lieu et place de la valorisation pourtant réclamée à cor et à cri, initialement par cet ordre d’enseignement.
De tout ce qui précède, il convient de noter que toutes les situations regrettables et décriées plus haut sont arrivées par la faute ou la négligence de certains décideurs du ministère de l’éducation nationale.
Arrivés à ce point de notre développement, nous vous reposons, monsieur le Ministre notre question à savoir si le statut dit valorisant reste en adéquation avec l’esprit et la lettre de l’engagement précité du Président du Faso ? Pour notre part, nous restons dubitatifs et le motif demeure l’injustice faite en bien des points aux enseignants du primaire.
Revenant justement aux dispositions du statut concocté par la CNSE en intelligence avec la partie gouvernementale, nous reconnaissons qu’il est de bon ton de raccourcir le trajet de l’ascension professionnelle dans l’enseignement primaire, tout comme il est aussi bon d’y restreindre le nombre de types d’encadreurs. Seulement, nous pensons que cela devrait se faire en tenant compte des principes élémentaires d’un vivre-ensemble professionnel harmonieux.
De par le passé, il s’agissait de l’emploi de CPI qui était voué aux gémonies ; aujourd’hui, la balle change de camp pour cette fois-ci se retrouver dans celui des IEPD, IEP où se trouveront cantonnés des IP et des CPI. Nul besoin d’être un illuminé pour deviner ce qui résultera d’une telle combinaison hétéroclite, dans le contexte qui prévaut actuellement.
Nous le réaffirmons, l’éducation est un domaine si délicat et si spécifique que ce qui a par exemple réussi comme reclassement d’agents dans certains emplois à la police ou à la douane peut s’y avérer une poudrière, prête à flamber à la moindre étincelle. L’école burkinabé a-t-elle besoin d’en arriver là pour prouver son efficience ?
Sur un autre registre, en examinant la célérité avec laquelle a été concédée la réduction des types d’encadreurs au primaire au seul et unique emploi d’IEP, en scrutant comment la CNSE (à l’exception bien entendu de quelques perspicaces de ses membres) a estimé son minima satisfait, l’on se rend vite compte que le souci d’équité qui devait prévaloir entre tous les sous-cycles semble être perdu de vue.
A l’analyse, l’on se rend à l’évidence aussi que la vision holistique du système éducatif qui, en principe devrait être la chose du monde la mieux partagée entre tous les membres de cette CNSE et les autorités du MENA PLN a été remplacée par une vision atomiste qui, en contexte d’éducation, dessert plus qu’elle ne sert.
Au lieu de juxtaposer les ordres d’enseignement en raison de la spécificité de chacun d’eux, ceux-ci se sont vus purement et simplement superposés. Et dire que certains défenseurs dudit statut évoquent la nécessité de sa lecture diachronique afin de le mieux comprendre !
Cela laisse sous-tendre que pour la CNSE et les autorités du MENA PLN, un titulaire de classe du préscolaire est assujetti par exemple aux injonctions ou aux instructions techniques d’un IES, ou comme si c’est le maître de conférences qui est chargé des visites de classe chez un titulaire d’une école primaire !
Ceux qui s’estimaient satisfaits ont donc conseillé dédaigneusement aux insatisfaits du primaire de mener des « luttes sectorielles » pour…Que l’unique doigt ramasse seul la farine épandue que les dix doigts, de concert, se devraient dans un sursaut d’orgueil au niveau CNSE de ramasser, semble être le message tacitement adressé aux enseignants du primaire.
Pourquoi donc faire compliqué lorsqu’il est aisé de faire simple ? Pourquoi mélanger les ordres d’enseignement en fondant d’autres dans la masse au point d’en faire une mixture indigeste ? L’on devine déjà aisément que lors des grandes rencontres, ce sera l’occasion pour des participants qui méconnaissent l’enseignement primaire, de décider de son sort.
En tout état de cause, les enseignants du primaire ont pris acte. Ils se souviendront pendant longtemps que dans toute alliance en vue d’une lutte syndicale d’envergure, il ne faut jamais perdre de vue la réaction des éternels diviseurs. D’ailleurs, l’auteur du « …Prince » n’avançait-il pas que : « Les hommes nuisent par peur ou par intérêt » ?
Dans notre cas, la situation est d’autant plus gravissime que non seulement les pourfendeurs des enseignants du primaire nuisent et par peur, et par intérêt. Par intérêt si l’on se réfère à tout ce qui a déjà été dit plus haut ; par peur parce que les enseignants du primaire arrivent toujours à s’adapter et à bien accomplir les tâches intellectuelles à eux confiées.
A quoi bon ouvrir simultanément plusieurs champs de combats au moyen d’un statut dit valorisant dans sa forme mais qui, dans son fond recèle bien de points de dissensions ? Que gagnent les autorités en charge du MENA PLN en hâtant le pas vers l’adoption d’un tel statut controversé ? Qu’escompte-t-on comme dividendes avec cette superposition suspecte des ordres d’enseignement ?
Si malgré tout, ce statut controversé devrait être imposé in-extenso aux enseignants du primaire, se rend-on compte que cela augure des lendemains incertains pour le système éducatif ? Des dispositions sont-elles prises au niveau enseignement primaire pour panser les plaies déjà béantes des enseignants, des encadreurs, entre enseignants, entre encadreurs et entre enseignants encadreurs ? Nous le réitérons, il n’y a qu’à entendre et analyser les propos des uns et des autres pour s’en convaincre !
Si rien n’est fait et que malgré les récriminations l’on veuille l’appliquer de force, ce statut, dans sa mouture actuelle portera le coup de grâce au monde de l’enseignement primaire qui, comme nous l’avons vu précédemment était déjà mal en point.
Il y a donc urgence que les décideurs du MENA PLN revoient leur copie ! Même s’ils ne sont pas les coupables de cette chienlit que vivent les enseignants du primaire, ils n’en sont pas moins les responsables car, « Les termites n’auraient pas pu ronger le cadavre si la mort ne l’avait pas précipité dans la tombe » énonce à juste titre un proverbe africain !
Par ailleurs, avec les arguments à l’emporte-pièce avancés par les uns et les autres aux encadreurs du primaire pour leur refuser l’accès à la catégorie P, l’on feint même d’ignorer le capital d’expérience et la compétence dont ils sont détenteurs, de même qu’un bon nombre d’instituteurs.
Mais, est-ce un hasard si par exemple les pays francophones d’Afrique en général demeurent à la traîne des pays anglophones ? N’est-ce pas justement parce que les premiers mettent l’accent uniquement sur le diplôme et que les seconds font exactement le contraire en n’occultant pas le diplôme mais en valorisant surtout l’expérience et la compétence de leurs agents ?
Revenant au cas précis de l’instituteur burkinabé, avez-vous idée monsieur le ministre, du nombre d’IC , d’IP, de CPI et d’IEPD meurtris et résignés du fait que leur expérience et compétence professionnelles soient méconnues, méprisées et même royalement piétinées ? Savez-vous, monsieur le Ministre que ce mépris leur vient surtout de la part de ceux-là qui auraient dû les leur reconnaître et en faire le motif de leur REVALORISATION EFFECTIVE ?
Nous ne voudrions pas, monsieur le Ministre donner dans le pessimisme mais nous pensons que si toutefois des mesures vigoureuses et appropriées ne sont pas prises, ici et maintenant pour résorber ce « cancer » ayant déjà gangrené tant d’organes de notre système éducatif, c’est l’avenir même de la nation qui se trouvera ainsi mis entre parenthèses. Et là, nous pesons bien nos mots !
En tout état de cause, nous ne voyons pas comment notre système éducatif tiendra toutes ses promesses s’il a mal à l’un de ses sous-ordres, comme la morbidité que vit présentement l’enseignement primaire. Comment dans les faits, une chaîne pourrait-elle fonctionner correctement si l’un de ses maillons est défectueux, ou si l’un de ses chaînons venait à manquer ?
Monsieur le ministre, il ne serait pas honnête de notre part de critiquer pour assouvir notre seule envie de critiquer. Il est de bon aloi aussi, lorsque l’on entreprend de déconstruire une théorie ou doctrine, d’en proposer d’autres qui seraient salutaires pour le plus grand nombre. C’est dans cette lancée que nous formulons ce qui suit, qui est ici aussi non exhaustif, et toujours dans la perspective d’une valorisation effective des enseignants du primaire. Ainsi, nous estimons pertinent et urgent de :
Convoquer des Assises nationales afin que la grande famille enseignante du primaire s’entretienne et se réconcilie. Cela aura l’avantage d’étouffer dans l’œuf la colère sourde et autres ressentiments qui gagnent présentement bien de cœurs ;
Trouver un mécanisme pour absorber tous les I.A déjà détenteurs d’une autorisation d’enseigner des écoles primaires privées et obtenir des fondateurs le ferme engagement de ne plus en embaucher à partir de la rentrée 2019-2020. Ne délivrer l’autorisation d’enseigner qu’aux titulaires du BAC à partir de cette date.
Recruter pour le compte des 7 ENEP les plus jeunes IAC à la recherche du concours d’intégration et qui se chiffrent à plus de 30.000 candidats, en vue de les recycler 2 années durant pour le niveau CAP, avant de les envoyer sur le terrain ;
Recruter toujours parmi ceux-ci les plus âgés aspirants au concours d’intégration à envoyer directement sur le terrain. Procéder ainsi jusqu’à épuisement de leur nombre à l’orée 2025, fin du moratoire consistant à recruter les parallèles avec le niveau BEPC. Cela sera justice rendue aux milliers de parents ou conjoints ayant assuré les frais de formation d’enseignants dans les ENEP, ou les EPFEP. Après quoi, pourra commencer le recrutement d’enseignants du primaire ayant le niveau BAC et pas avant ;
Sensibiliser les fondateurs d’écoles primaires privées et obtenir d’eux le ferme engagement de ne plus recruter que des enseignants déjà titulaires du CEAP ou, à défaut, ceux déjà titulaires de l’autorisation d’enseigner et ce, dès la rentrée scolaire 2019-2020 ;
Reclasser pour compter de leur date de déroulement d’épreuves pratiques et orales tous les lauréats aux examens professionnels du CEAP et du CAP ;
Permettre exceptionnellement aux actuels IC totalisant moins de 12 ans d’ancienneté d’accéder à la catégorie A3 par un stage de mise à niveau d’une année, et jusqu’à l’âge de 55 ans pour les bénéficiaires.
Cette mise à niveau se fera au moyen de cours extra-muros afin que les bénéficiaires y participent, tout en continuant leurs tâches d’enseignement. De cette façon, les jeunes instituteurs auront le temps de profiter de l’expérience de leurs devanciers ainsi puissamment motivés avant leur admission à la retraite. (Cette mesure prendra fin avec le dernier concerné à être « enrôlé ») ;
Valoriser l’expérience et la compétence de bon nombre d’IC totalisant au moins 12 ans et plus dans cet emploi par la création à titre exceptionnel de l’emploi d’Administrateurs des Ecoles Primaires (AEP). Ce, au moyen d’un stage de mise à niveau d’une durée de dix-huit mois et jusqu’à l’âge de 55 ans pour les bénéficiaires. Cette mise à niveau se fera au moyen de cours extra-muros afin que les bénéficiaires y participent tout en continuant leurs tâches d’enseignement.
Les bénéficiaires seront reclassés en catégorie A2 pour renforcer l’encadrement de proximité dans les écoles primaires. De cette façon également, les jeunes instituteurs auront le temps de profiter de l’expérience de leurs doyens ainsi puissamment motivés, avant leur admission à la retraite (cette mesure prendra également fin avec le dernier concerné à être « enrôlé ») ;
Prévoir pour le trousseau pédagogique des enseignants 75.000 francs aussi bien pour ceux exerçant dans les classes que ceux au bureau et une « prime de craie » de 25.000 francs exclusivement pour les titulaires de classe. Ces sommes forfaitaires sont à servir par mois et par enseignant durant les neuf mois que dure l’année scolaire ;
Garder les I.P à la tête des écoles en tant qu’Administrateurs Principaux des Ecoles Primaires (APEP) et envisager de les reclasser sans conditions en catégorie A1, au vu de leur parcours professionnel.
Soustraire les IP des écoles revient à décapiter ces dernières de l’unique et crédible source d’encadrement de proximité dont elles disposaient. En sus, l’éviction de ces encadreurs des écoles présente plus d’inconvénients que d’avantages aussi bien pour eux que pour l’Etat burkinabé, sans oublier qu’ils sont les mieux écoutés des enseignants que ne le sont bon nombre de CPI et d’IEPD dans plusieurs localités.
Dans les CEB où le statut prévoit de les caser, par quel miracle trouvera-t-on le mobilier, l’immobilier, les moyens roulant pour eux si l’on sait comment triment déjà des CPI et des CCEB pour le fonctionnement des inspections ? Qu’adviendra-t-il d’eux avec la fusion des CEB qui est en perspective, avec ses multiples équations à plusieurs inconnues qui en découlent naturellement ? En gardant donc ces encadreurs de proximité dans les écoles, l’on évite du même coup de plonger l’enseignement primaire dans un précipice.
Permettre à tous les encadreurs de l’enseignement primaire disposant de diplômes universitaires de postuler par le biais de passerelles aux concours du post-primaire, du secondaire et du supérieur sans tenir compte des 20% imposés par la parcimonie de » ceux qui reçoivent » !
Cette mesure aura l’avantage de désengorger le nombre d’encadreurs dans l’enseignement primaire, de ramener l’entrain et la motivation chez les titulaires de ces diplômes chèrement acquis comme nous l’avons déjà dit plus haut, et d’autoriser de ponctuels recrutement d’encadreurs, le rêve de bon nombre de jeunes enseignants diplômés ;
Reclasser les CPI et les IEPD dans la catégorie Pc de la Fonction Publique sans conditions pour les seconds et après avoir soumis les premiers à douze mois de stage, également en extra-muros, assorti de production d’un mémoire de fin de stage. Ainsi, les CPI pourront continuer leurs tâches dans leurs CEB respectives tout en complétant leur perfectionnement professionnel ;
Prévoir pour tous les encadreurs pédagogiques en service dans les écoles et dans les inspections une prime d’encadrement à hauteur de 100.000 francs par encadreur et par mois. Ces primes sont à servir également pour les neufs mois que dure l’année scolaire ;
Mettre à la disposition de tous les enseignants et leurs encadreurs en activité une dotation unique d’ordinateurs de qualité dont les frais de maintenance et de réparation restent à leur entière charge ;
Assurer une sérieuse visite médicale annuelle pour tous les enseignants et encadreurs en activité et assurer la prise en charge totale des frais d’hospitalisation et d’ordonnance lors de maladies, d’accidents, des visites occasionnelles et celles de routine. Prévoir les différentes prises en charge ci-haut citées à hauteur de la moitié pour les enseignants déjà admis à la retraite ;
Etendre à tous les enseignants et agents relevant de l’enseignement primaire l’indemnité spécifique de logement. Tous ces agents triment nuit et jour pour la cause des enfants et adolescents d’âge scolaire de la nation et il n’y a rien de plus injuste que de servir cette indemnité à certains agents en excluant d’autres.
Augmenter de 20 à 100 francs au kilomètre et ce, dès la rentrée scolaire et académique 2019-2020, les frais de transport servis aux agents en mission, et relevant de l’enseignement.
Le reste des acquis déjà inclus dans le statut sont prenables pour le moment. Ils sont à mettre à l’actif de l’esprit de sacrifice et l’abnégation des différentes parties.
Avec l’opérationnalisation de ce qui précède, nous nous retrouverons avec cinq emplois à savoir ceux de Professeur des Ecoles (PE), de Professeur Certifié des Ecoles (PCE), d’Administrateur des Ecoles (AEP), d’Administrateur Principal des Ecoles Primaires (APEP) et ceux d’Inspecteur des Ecoles Primaires (IEP).
Sur une période allant de cinq à dix ans voire plus pour les plus jeunes, ce sera ces cinq emplois qui verront une diminution progressive pour se stabiliser à terme à quatre emplois, soit trois emplois pour les agents en service dans les écoles, et un emploi pour les encadreurs au bureau. Cette période précitée autorisera une sorte « d’incubation » très profitable aux plus jeunes dans le métier.
Monsieur le Ministre, la longueur de la présente lettre ouverte témoigne suffisamment de l’ampleur du problème que vit l’enseignement primaire et du désarroi de ses acteurs. Il était aussi de notre devoir de nous adresser à vous grâce à elle et partant, au peuple burkinabé que nous prenons à témoin, à cause des risques possibles d’implosion ou d’explosion qu’encourt l’enseignement primaire avec l’application, dans son format actuel, du statut dit valorisant !
Votre nomination à la tête du MENA PLN n’étant pas le fruit du hasard, il vous appartient d’y marquer d’une pierre blanche votre passage par des actions qui, même confrontées à l’épreuve du temps, résisteront par leur originalité et leur pertinence. Le statut valorisant tant décrié pour l’enseignement primaire, une fois débarrassé de ses scories et de ses relents de dépréciation de certains emplois s’inscrira sans coup férir dans l’histoire, comme l’une de ces brillantes actions.
En sus, monsieur le ministre, faites au moins une fois, et cette fois-ci mentir l’opinion qu’avait la Grande Royale de l’école du blanc et de ses produits. Dans « L’aventure ambiguë » de Cheick Hamidou Kane, n’avait-elle pas conseillé aux gens du Diallobé d’aller dans ladite école « …pour apprendre à vaincre sans avoir raison. » ?
Voyez-vous, monsieur le Ministre, c’est sous cette férule qu’ont vécu les enseignants du primaire depuis longtemps, jusqu’au moment où nous vous écrivons ces lignes. Agissez donc de sorte que désormais, chaque enseignant, chaque encadreur de l’enseignement primaire dise et retienne plutôt ceci de vous et de votre équipe de décideurs du MENA PLN : « Ces gens-là sont allés à l’école du blanc pour apprendre et à vaincre, et à avoir raison. Ils nous ont finalement restitué la place qui aurait dû être nôtre depuis bien longtemps…Enfin ! »
Evitons aussi d’être oublieux ! Que l’on soit président, magistrat, député, ministre, gouverneur, commissaire, préfet, maire, professeur, docteur…toute cette grandeur et splendeur dont on peut être fier aujourd’hui a commencé avec le dire, le faire et les gestes d’un modeste instituteur qui, patiemment et résolument nous a appris à lire, à écrire et à compter. Où que se trouve présentement ce modeste instituteur, c’est à vie que nous lui resterons redevables pour la « lumière » qu’il nous a ainsi apportée. Honorons donc sa mémoire, en valorisant l’enseignant du primaire d’aujourd’hui ! En effet, en nous ayant appris à lire, à écrire et à compter, il a de ce fait semé en nous la graine imputrescible du savoir qui a déjà germé pour faire de nous ce que nous sommes aujourd’hui devenus.
Elle germera encore pour un plus grand épanouissement de notre personne que celui que nous connaissons aujourd’hui et dont Seul, Le Créateur détient le secret. Cela, ne l’oublions pas ! Cela, ne l’oubliez jamais, monsieur le Ministre !
Plaise à Dieu que cette lettre ouverte vous parvienne et obtienne de vous la faveur d’être lue !
Alain POUYA,
IEPD en attente d’être affecté,
Adresse postale : 01 BP 5141 Ouagadougou 01
Courriel : al8a8in8@yahoo.fr / WhatsApp : (00226) 70 12 88 76.
Source: LeFaso.net
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