Le foncier divise et les exemples sont légion au Burkina Faso. À Garghin, quartier situé dans l’arrondissement n°12 de Ouagadougou, les résidents de la zone à habitats spontanés et les autorités n’ont apparemment pas trouvé la solution à leur crise qui date de 2009. En tout cas, c’est ce qui ressort des explications sur la situation.
L’on se rappelle encore cette « chaude matinée » du samedi 13 avril 2019 à Garghin, quartier situé dans l’arrondissement n°12 de Ouagadougou. Ce jour-là, dès 5h du matin, les résidents de la zone à habitats spontanés (communément appelée non-lotie) étaient sur la voie pour empêcher l’accès dudit quartier aux gendarmes qui venaient pour les déloger. Ainsi, la Route nationale n°6 était bloquée. Suite à l’intervention des autorités compétentes, notamment le maire de l’arrondissement 12 et les ministres de la Sécurité et de l’Habitat, la situation a été calmée.
- Albert Soubeiga
Genèse de la situation
Il faut noter que l’installation des premiers habitants de la zone non-lotie de Garghin remonte à 2004. À leur installation, à en croire l’un des résidents, Albert Soubeiga, ils ont trouvé cinq maisonnettes avec des gardiens délimitant la zone de la société Bâtiments travaux publics et maintenance (BTM). Ils étaient hors de cette zone, nous confie-t-il. À l’époque, ils ont été rassurés par ceux qui leur ont vendu les terrains (propriétaires terriens) que la limite de BTM s’arrête au niveau des maisonnettes.
À partir de 2009, l’entreprise BTM et ses voisins ne parlaient plus le même langage. Des maisons inhabitées ont été détruites par la société immobilière. Des pourparlers ont commencé, impliquant les autorités administratives et les deux protagonistes.
Selon Albert Soubeiga, la situation s’est compliquée pour les résidents à partir de février 2016, date à laquelle la société BTM leur a présenté des papiers légalisés de la zone litigieuse. Et c’est à partir de ce moment qu’ils ont commencé à recevoir de multiples sommations de déguerpir.
Au cours des tentatives de résolution définitive de la crise, les résidents ont été recensés du 10 au 14 avril 2017, afin de bénéficier d’un autre site de logement. Les chiffres ont fait un état de 1 550 résidents et 375 non-résidents, soit un total de 1 925 recensés. Le conseiller de la mairie de l’arrondissement 12, Tanga Joachin Yerbanga, insiste qu’il s’agit de 1 550 familles.
- Conseiller de la mairie de l’arrondissement 12, Tanga Joachin Yerbanga
Situation actuelle
Le samedi 29 juin 2019, le maire de l’arrondissement 12, Rasmata Nadembega, de passage à Garghin, a annoncé l’octroi de 500 parcelles comme solution à cette crise. « 500 parcelles en 2019 pour 1 550 résidents dénombrés en 2017 ! C’est très insuffisant (32,25%) pour notre nombre », s’indigne le conseiller Tanga Joachin Yerbanga. Et de préciser que la municipalité n’a pas associé les populations dans cette prise de décision.
Pour Albert Soubeiga, la déception se lisait sur tous les visages. « Ainsi, l’espoir d’environ 2 000 chefs de famille d’avoir un chez-soi vient de s’envoler avec cette information », lâche-t-il amèrement, avant de qualifier cette solution de « suicidaire ».
- Travaux de voirie sur le site de relogement de la population de Garghin
Pendant ce temps, faut-il le rappeler, la société BTM dispose de papiers légaux : deux titres fonciers n°2574 et n°2575, l’ordonnance n°47-3 et la signification commandement de libérer les lieux. En tant qu’entreprise immobilière, BTM est appelée à exploiter son site puisqu’elle est dans la légalité. Chose que Albert Soubeiga et Tanga Joachin Yerbanga disent comprendre « parfaitement ».
De l’autre côté, l’équation n’est toujours pas résolue. Qu’ont-ils commis comme crime pour mériter un tel traitement ? Y a-t-il deux sortes de citoyens au Burkina Faso en 2019 ? Les résidents s’interrogent.
Des litiges autour du foncier ne sont pas une première au Burkina Faso. Le récent cas des villages Djongolo et Sitiéna, dans la région des Cascades, nous rappelle la nécessité de résoudre cette situation pendant qu’il est encore temps.
Cryspin Masneang Laoundiki
(lcryspin@yahoo.fr)
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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