Après le chaudron de la veille, le Général Djibrill Bassolé a eu une matinée presque paisible ce 9 janvier 2019. Ses avocats avaient la parole. Pendant des heures, les conseils de l’accusé ont tenté de battre en brèche les arguments développés par le parquet et la partie civile. Pour eux, leur client est blanc comme neige dans cette affaire de coup d’Etat. « Nous sommes dans une procédure pénale asymétrique », s’est offusqué Me Dieudonné Bonkoungou. La ligne d’attaque de la défense, la procédure, et bien sur la principale pièce qui accable l’ancien chef de la diplomatie : les écoutes téléphoniques.

La journée a débuté avec Me Mireille Barry qui a continué avec ses observations et questions de la veille. Elle a dénoncé la stratégie sélective du parquet qui ne profite pas forcément à son client, alors qu’il devrait instruire à charge et à décharge. Pour l’avocate, il y a bel et bien des pièces dans le dossier qui pourraient innocenter son client. « On a perquisitionné ses domiciles à Koudougou, Ouagadougou et Nouna. On n’a rien retrouvé mais on ne dit pas », s’est-elle offusquée.

L’accusé lui-même avait reconnu lors de sa déposition avoir parlé avec Guillaume Soro, président de l’Assemblée nationale, au téléphone. Mais il avait vite fait de préciser qu’il s’était agi de DDR (désarment, démobilisation, réinsertion). Son avocate, Mireille Barry l’a alors relancé sur cette question. « Je n’ai jamais dit d’appliquer au RSP le DDR. Ce que j’ai voulu dire, c’est qu’on s’inspire du DDR et qu’on puisse le faire dans un climat de paix », un concept utilisé par les Nations unies dans le cadre de la résolution des conflits, s’est défendu Djibrill Bassolé.

Foi de l’ancien ministre, le désarment du RSP n’a pas été bien pensé et bien mené, d’où les frustrations qui s’en sont suivies. « Si j’étais responsable de cette armée, je n’aurais pas réglé le problème de cette façon. Le procès pénal a un effet dévastateur sur notre armée », a avancé l’accusé avant de préciser que sur la base d’un accord, il allait éviter la confrontation entre les éléments de l’armée.

Les avocats du Gal veulent Hermann Künzel à la barre

Me Dieudonné Bonkoungou, autre avocat du premier Général de gendarmerie a aussi poursuivi dans le sens des vices de la procédure, selon lui. Pour lui, le parquet militaire reçoit et accepte les pièces qui vont dans son sens. Dans le cas contraire, elles sont simplement rejetées ou occultées à dessein. Par exemple, il se demande pourquoi les dates et les lieux des enregistrements sonores ne sont pas communiqués.

« Nous sommes dans une procédure pénale asymétrique », lâche Me Dieudonné Bonkoungou.

Plus loin, l’auxiliaire de justice, ira jusqu’à demander au président du tribunal Seidou Ouédraogo de faire passer l’expert allemand Hermann Künzel à la barre. Selon lui, il doit des explications à toutes les parties, parce que son travail d’expertise était justement d’éclairer et non susciter d’autres polémiques.

Comme il fallait s’y attendre, ces observations ne sont pas partagées par le ministère public. Le parquet précise que la source et les conditions d’obtention des éléments sonores, sont autant d’éléments qui figurent dans le dossier. En effet, révèle, le parquet, les enregistrements ont été fournis par les officiers de police judiciaires de la gendarmerie nationale dans le cadre d’une commission rogatoire.

« Ne melez pas pas les OPJ dans vos affaires. On est venu leur donner des enregistrements, on leur a dit de mettre ça dans le dossier et ils ont mis », a répliqué l’accusé.

Dans tous les cas, maintenant que ces enregistrements font partie intégrante du dossier, il faut bien en discuter, a noté pour sa part le parquet.

Tiga Cheick Sawadogo

Lefaso.net

Source: LeFaso.net