L’Initiative pour la transparence des industries extractives/Burkina Faso (ITIE/BF) a repris son bâton de pèlerin dans le cadre de la dissémination de son rapport 2016. Ce 17 septembre 2018, une mission est allée à la rencontre des populations de la commune de Mogtédo, dans la province du Ganzourgou. À cette occasion, ces populations se sont outillées de « grosses loupes » pour mieux analyser l’activité minière qui se mène sous leurs yeux.

« Il y a beaucoup de zones d’ombre quand on parle de mines. Les gens voient des milliards. On se dit qu’il y en a qui bouffent et les autres n’ont rien ». Cette confidence de Juste Nagalo, proviseur du lycée départemental de Mogtédo, est partagée par une bonne partie de la population, surtout celle des zones qui abritent les sites d’exploitation de minerais.
Une perception qui découle surtout du manque d’information qui entoure l’activité minière. En adhérant à l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) en 2008, le Burkina Faso a voulu lever toute équivoque, en donnant des loupes à chaque citoyen pour voir clair dans l’activité minière sans cesse croissante. Le pays se classe d’ailleurs 5e producteur d’or en Afrique.


Le huitième rapport ITIE/ BF, qui couvre la période du 1er janvier au 31 décembre 2016, rend compte des contributions du secteur extractif au développement économique et social du Burkina Faso. Il tend aussi à améliorer la transparence et la bonne gouvernance dans tous les éléments allant de la recherche à l’exploitation.

Le Dr Sidiki Guiré du secrétariat permanent de l’ITIE/BF a expliqué que le rapport annuel et la tournée de dissémination qui s’en suit, ont pour objectif de permettre aux populations de connaître ce que les sociétés minières font, ce qu’elles dépensent comme argent, ce qui est engrangé par l’État et ce que l’État fait de cet argent. « Une fois que cela est su, cela peut calmer les tensions sous-jacentes », a-t-il ajouté.


Quant au préfet de la commune de Mogtédo, par ailleurs président du comité local de pilotage de l’ITIE/BF, cette démarche permet aux populations d’avoir plus de discernement sur les activités de la société minière OreZone implantée dans la localité. Pour Adolphe Athanase Thiombiano, cette rencontre intervient au bon moment parce que la mine est en phase d’indemnisation des populations affectées. Les fruits du dialogue sont perceptibles, selon les dires du préfet. « Les débats d’aujourd’hui était moins houleux qu’avant. Cela est dû aux informations reçues qui leur permettent de relativiser leurs positions », a-t-il constaté.


Pendant des heures, le comité local de l’ITIE de Mogtédo s’est imprégné du contenu du rapport 2016 qui a pris en compte seize sociétés minières. Le consultant indépendant, qui s’est chargé de l’élaboration du document, a surtout comparé les montants que ces seize sociétés minières ont payés à ceux que les services de l’État ont reçus.

En 2016, le Burkina Faso a atteint 38,53 tonnes d’or (dont 204 kg provenant de l’exploitation artisanale). La valeur d’exportation de cette quantité est de 929,74 milliards de francs CFA. Les terres du Burkina sont également riches en zinc. Pour ce minerai, ce sont exactement 155 700 tonnes qui ont été extraites en 2016, selon le rapport de la Chambre des mines du Burkina. La valeur de ce zinc exporté est de 53,715 milliards de francs CFA.


Déclaré « pays conforme » le 27 février 2013, le Burkina Faso continue sa longue marche vers la transparence dans les industries extractives. Mais des difficultés, il en existe. La preuve, en 2016, sur les seize sociétés minières qui devraient déclarer ce qu’elles ont payé à l’État, seulement onze se sont pliées à l’exercice. 128,134 milliards, c’est la somme que ces sociétés déclarent avoir payé à l’État.

Dans le rapport simplifié, qui a servi de base d’échanges avec la population de Mogtédo, l’on apprend que les services de l’État ont pourtant déclaré qu’ils ont reçu de ces seize sociétés minières la somme de 159, 116 milliards de francs CFA. L’écart, même réduit après ajustement, est énorme et s’explique par plusieurs raisons. « Quand les écarts sont négatifs, cela met en doute la crédibilité de notre rapport. Malheureusement, des sociétés ont été défaillantes et n’ont pas pu remplir le formulaire de déclarations », a déploré Dr Guiré du secrétariat permanent de l’ITIE.

Ainsi, il explique que trois sociétés minières ont communiqué des déclarations non-attestées par une personne habilitée. Ce sont les sociétés Houndé Gold Operation SA, Birimian Resources, GEP Mines. Aussi, deux sociétés, qui devraient soumettre des déclarations certifiées, n’ont rien donné. Il s’agit de Burkina Mining Company (BMC) toujours en activité, et la Société des Mines de Bélahouro (SMB) en suspension d’exploitation.


Forte des insuffisances, et pour que toutes les sociétés remplissent le formulaire, l’ITIE/Burkina doit mettre en place un calendrier d’élaboration de son rapport, et cela doit être communiqué à tous ceux qui entrent dans le processus en début d’année. C’est la recommandation du consultant indépendant. « C’est déjà fait, nous attendons une session de pilotage de l’ITIE pour le valider », répond l’un des deux communicateurs, Dr Guiré.

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Tiga Cheick Sawadogo

Lefaso.net

Source: LeFaso.net