Le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) a animé, ce jeudi 28 juin 2018 à Ouagadougou, une conférence de presse sur des sujets relatifs à la situation nationale. Pour l’occasion, le président par intérim du parti, Simon Compaoré (assisté par le secrétaire exécutif, Lassané Savadogo, et du secrétaire à l’information et à la communication, Patrice Diessongo), est sorti de ses gonds sur certaines préoccupations qui lui ont été adressées, parfois, avec une dose d’humour…
Ainsi, sur une question relative à l’annonce de la candidature du président du Faso en 2020, le premier responsable du parti au pouvoir, Simon Compaoré, fait d’abord observer que ces sorties médiatiques de Roch Kaboré n’avaient pas pour objectif d’annoncer sa candidature ; elles visaient à faire le point de la mise en œuvre de son programme. Néanmoins, Simon Compaoré roule en fair-play par rapport aux commentaires « hostiles » suscités par cette déclaration du président Roch Kaboré. « C’est de bonne guerre que de soulever un élément de son contexte pour le placarder : Roch annonce sa candidature. Vous voyez que c’est vraiment de manière très intentionnelle ! », a poussé Simon Compaoré.
Réagissant donc à la déclaration du Chef de file de l’opposition politique au Burkina Faso (CFOP-BF) sur le sujet, le parti au pouvoir pense que le président du Faso a un devoir de redevabilité en 2020, contrairement aux adversaires politiques. « Assurément, il ne prendra pas le micro en 2020 pour dire : j’ai fait tant de discours, j’ai répondu à l’opposition N fois. Non, ce n’est pas sur cela qu’il est attendu en 2020 ; c’est sur du concret… Ce n’est pas le nombre d’écoles construites, de kilomètres de routes bitumées…qui intéressent les adversaires politiques, mais le fait qu’il ait dit que si son bilan est probant, cela va être sanctionné positivement », a-t-il relevé.
D’ailleurs, au sein du parti, l’on n’en fait pas un mystère. « Le MPP s’est toujours battu et se battra aux côtés de son candidat pour continuer l’œuvre qu’il est en train d’entreprendre aujourd’hui. Qui ne sait pas qu’on travaille pour cela ? A moins d’être de mauvaise foi. Vraiment, on cherche des poux sur un crâne bien rasé comme le mien », a ironisé Simon Compaoré avant d’inviter « tous ceux qui n’ont pas d’éléments pour meubler leurs conférences de presse de mardi de se raviser… » en ne soustrayant pas un élément de son contexte.
Le secrétaire exécutif du MPP, Lassané Savadogo, lui, soutient que le président du Faso n’est pas un adepte de la langue de bois. De son avis, Roch Kaboré a répondu aux questions sans arrière-pensée. « Il y en a qui considèrent que cela est un crime. Ce qui veut dire que, pour eux, l’honnêteté est un crime. Pour nous, l’honnêteté n’est pas un crime, c’est une valeur. A notre niveau, les choses sont claires, le président du Faso doit être là pour dix ans et le parti travaille à cela », a appuyé M. Savadogo.
Le secrétaire exécutif confie dans ce sens que nombre de responsables du parti avaient même annoncé cette candidatureavant le président du Faso lui-même. Mieux, se rappelle-t-il, même au niveau de l’opposition, certains avaientdéjà déclaré leur intention par la parabole « des trois baobabs » (intervention de Zéphirin Diabré au Congrès du CDP en mai dernier, ndlr).
Crise alimentaire : distribution de vivres par affinités politiques ?
La distribution des vivres aux populations vulnérables soulève des critiques à charges contre le pouvoir ; certaines personnes affirmant qu’elle se fait par « accointances politiques ». Sur ce point, et tout en précisant que les deux « camarades » ministres en charge de la question (Action sociale et Agriculture) ne sont pas là pour donner des « éléments précis de ce qui a été déjà fait » sur le terrain, Simon Compaoré dément ces affirmations.
« Nous aussi, au niveau du parti, nous sortons. Personnellement, je viens de faire neuf communes la semaine dernière et j’ai vu des gens qui remercient le gouvernement pour les efforts qui sont faits et quelque part, en demandent plus », a confié Simon Compaoré, pour qui les vivres ne sont pas distribués nuitamment ; c’est en plein jour. « Et Dieu merci, il y a des camarades qui,en dehors de ce que fait l’Etat central, font des efforts en achetant des vivres pour donner aux populations », informe-t-il également.
À l’en croire,une distribution par « accointances politiques » est d’ailleurs contre-productive. « Si vous voulez que votre cercle s’élargisse, ce n’est pas en allant seulement vers vos militants ; c’est en allant vers ceux-là qui ne sont pas avec vous », convainc-t-il avant de rassurer que si de telles pratiques se révélaient, des preuves à l’appui, les « camarades » à la base seront interpellés.
Le dossier Naïm Touré
Le cas Naïm Touré n’a pas échappé à la conférence et sur le sujet, Simon Compaoré fait d’abord constater que si l’avènement des technologies de l’information et de la communication, avec en sus les réseaux sociaux, implique une facilité dans la communication instantanée, il sied de faire usage de ces instruments avec beaucoup d’attention. « Nous avons vu beaucoup de dérapages sur le Net, les réseaux sociaux [sont] en passe de devenir un espace de libertinage », souligne-t-il, précisant que les réseaux sociaux sont un outil qui peut arranger comme détruire.
« C’est pourquoi il faut manipuler ces instruments avec dextérité, avec beaucoup de sagesse. Le monsieur dont vous parlez, il n’est pas à son premier forfait ! C’est combien de fois ? Je crois que ceux qui se lèvent aujourd’hui pour faire le tintamarre ne rendent pas service à ce jeune-là. Ils ne rendent pas service à la démocratie. Ils ne rendent pas service à la liberté de presse ; parce que la liberté de la presse se nourrit de discipline, discipline pour soi-même et discipline collective », développe Simon Compaoré.
L’ancien ministre de la Sécurité pense qu’on ne doit pas être léger dans les propos, surtout sur les questions sensibles. « Il y en a qui ne savent pas que quand quelqu’un est blessé, on n’appelle pas seulement un avion, on le met dedans et on fait décoller l’avion… Non, c’est plus compliqué que cela.(…). Il y a toute une préparation. Il y en a qui ne peuvent pas être évacués tout de suite ; sinon c’est la mort. L’avion a décollé, mais il va redescendre. Quand les médecins doivent évacuer quelqu’un, il y a des procédures… », explique M. Compaoré.
« Je parie que si ce jeune homme était parti voir le chef d’Etat-major de la gendarmerie, il aurait eu des informations justes. (…). Ce n’est pas parce qu’il a posté le message que le gendarme a été évacué. Non, on ne travaille pas ainsi. C’est parce que les conditions étaient enfin réunies pour qu’il parte. (…). Nous-mêmes, nous avons des gens qui font ce travail-là (cybernautes), mais de temps en temps, on les rencontre pour les remettre sur les rails. C’est pourquoi faut-il réglementer le domaine pour éviter les abus qui peuvent conduire à des mesures draconiennes qui n’arrangeront personne », expose le premier responsable du MPP.
C’est pourquoi pense-t-il que certaines associations devraient plutôt inviter les jeunes à être pondérés. « Il y a eu combien de personnes qu’on a évacuées ? A-t-on eu besoin qu’on fasse un post avant ? Donc, Naïm [Touré] n’a été pour rien dans l’évacuation de ce gendarme. Ça au moins, je peux vous le dire. Et si vous hésitez, cherchez à voir le chef d’Etat-major de la gendarmerie nationale », a-t-il insisté. Mais, en conclusion, le parti au pouvoir dit s’en tenir aux décisions de justice.
Le MPP en ordre de bataille !
À ceux qui voient le parti au pouvoir déjà sur le terrain de campagnes électorales, Simon Compaoré ne va pas du dos de la cuillère pour leur dire :« Les gens se flattent, nous, nous sommes en ordre de bataille. Bien qu’étant en train de revisiter nos structures, s’il y a une mobilisation à faire, demain, même aujourd’hui, on peut sonner le rassemblement. Il ne faut pas penser qu’on dort, et qu’on peut venir nous surprendre et nous piquer.
On dort, tout en ayant les yeux ouverts ; parce que nous avons à exécuter ce devoir de rédevabilité. Il n’est pas question de trouver des subterfuges en 2020 (parce qu’il y a eu trop de grèves ou de ceci ou cela…, les gens s’en foutent de cela, ils vont demander qu’est-ce qu’on a fait). Donc, vous allez nous trouver sur le chemin ; dans les marchés, les yaars, les boutiques, les champs, en campagne comme en ville, en train d’arpenter…. Il y en a qui disent de ne pas sortir, mais même le gouvernement va sortir, dans son format de conseil des ministres, pour se rendre compte d’un certain nombre de choses, parce que c’est nécessaire.
En la matière, on ne peut pas dire que c’est trop pour aller sur le terrain ; ça encourage les populations, ça permet de regarder comment les choses s’exécutent sur le terrain. Ça montre que la ville et la campagne sont toutes le Burkina. D’aucuns vont dire que c’est la campagne déjà…, mais ce sont ceux qui n’ont rien à montrer en 2020, qui peuvent s’amuser à rester en ville… Nous, nous sommes obligés, parce qu’on a un programme et on doit être comptable de nos propres turpitudes demain », a affiché Simon Compaoré qui refuse de se contenter des comptes-rendus.« We want to see before believing » (nous voulons voir avant de croire), a-t-il conclu.
Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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