Ce vendredi 20 avril 2018, le secrétaire général du Syndicat national des travailleurs de l’agriculture, Richard Der Somé, a déclaré que dans les jours à venir, toute dégradation du climat social sera imputable aux autorités du ministère. C’était à l’occasion de leur premier « face à face » avec les journalistes.

« Nous avons toujours priorisé le dialogue. Mais à un moment donné on s’est rendu compte que ce dialogue ne mène à rien parce que les autorités passent le temps à faire du dilatoire. Aujourd’hui, nous pensons que c’est le moment pour que nous puissions prendre à témoin l’opinion nationale et internationale sur la situation qui prévaut au sein de notre ministère », a déclaré le secrétaire général (SG) du Syndicat national des travailleurs de l’agriculture (SYNATRAG), Richard Der Somé, lors d’une conférence de presse organisée ce 20 avril 2018 à Ouagadougou. Il était entouré de ses proches collaborateurs.

De la gouvernance au sein du ministère de l’agriculture, le conférencier soutient que pendant que la grande partie des activités (98%) est menée sur le terrain, 90 à 95% du budget alloué pour la réalisation de ces activités sont détenus au niveau central. Au même moment, l’organigramme qui est la référence est bafoué ; les services centraux s’approprient des activités des services déconcentrés.


Outre cela, il révèle avec amertume que le clientélisme et le favoritisme sont devenus la règle d’or de la gouvernance au sein de leur ministère. « On peut trouver dans certains postes techniques et stratégiques, des personnes n’ayant pas les qualifications suffisamment prouvées ; et cela depuis le secrétariat général en passant par les directions centrales et régionales », a-t-il justifié. Avant de dénoncer avec la dernière énergie les nombreuses sorties « aux longs cortèges et budgétivores des autorités, les recrutements népotistes, les missions de consommation de budget et la priorisation des objectifs personnels au détriment des objectifs du ministère ».

La bonne gouvernance commence par le bon choix et la bonne gestion des ressources humaines (GRH) déjà bien formées, mais à en croire le SG, la GRH au ministère de l’agriculture est « pathétique et inquiétante ». L’une des preuves avancées est la récente proposition de nomination dite « pour convenance personnelle » de chefs de services à la direction provinciale du Kadiogo par la directrice Gisèle Nongana/Yaméogo. Cet acte survenu au moment où les militants du SYNATRAG observaient un mot d’ordre de boycott, est une remise en cause des libertés syndicales au sein du ministère, de l’avis de M. Somé.


Relativement aux conditions de travail du personnel, la situation est aussi déplorable, a-t-il fait remarquer. Pour motiver davantage son argumentaire, il évoque la réalité à travers des interrogations qui interpellent. « Quel résultat attend-on d’un agent de vulgarisation agricole dont la mission première est d’effectuer des sorties terrain d’appui conseil des producteurs lorsque ce dernier qui doit parcourir en moyenne 25 Km par jour n’a pas de moto de service ? Comment peut-on comprendre que dans un ministère comme le nôtre ; les premiers responsables chantent devant les agents que les moyens sont insuffisants alors que de 2007 à 2017, ce ministère n’a jamais pu absorber la totalité de son budget, et reverse annuellement en moyenne 69 milliards au trésor public ? », se questionne-t-il. « Comment le ministre Jacob Ouédraogo peut demander aux agents de faire des sacrifices pendant que lui et son entourage débordant de frais de missions, n’ont jamais sorti un peso de leur poche pour le service public ? (…) », ajoute-il.

La politique agricole du Burkina Faso était également au menu de cette rencontre. « Nous réagissons, pas dans un esprit belliqueux, mais pour un véritable dialogue constructif permettant de résoudre les problèmes les plus élémentaires du secteur agricole », précise le SG du SYNATRAG.

Interpellé sur la création en cours de la Banque agricole, il a salué l’initiative avant d’exprimer son inquiétude quant à sa gestion : « Est-ce que les petits producteurs auront vraiment accès aux crédits pour financer leurs activités ? ». « Dans cette Banque, il y a des opérateurs économiques qui ont des actions. De même que certaines organisations paysannes, sans oublier l’Etat. Nous nous pensons que la sécurité alimentaire est avant tout une question de souveraineté nationale. Il revient à l’Etat de jouer son rôle et de supporter entièrement la création de cette banque. En ce moment, les petits producteurs peuvent espérer avoir accès aux crédits », a, pour sa part, déclaré Tiatité Noufé, SG adjoint à la formation syndicale. « C’est pour essayer d’équilibrer la balance commerciale sinon ce n’est pas pour sauver le petit producteur (…) », conclut-il, faisant allusion aux 14 milliards de F CFA que l’Etat a injectés pour soutenir le secteur du coton.

Aïssata Laure G. Sidibé

Lefaso.net

Source: LeFaso.net