Le vendredi 26 janvier 2018, lors de la cérémonie de la première journée de la zone sylvo-pastorale de TapoaBoopo (commune de Matiacoali), le président du comité de gestion de la forêt Tapoa Boopo, Koulabiga Tani a été pris à partie par une fronde sociale. Rencontré à Fada N’Gourma le samedi 27 janvier dernier alors qu’il y était pour des soins, il nous explique sa mésaventure d’une journée.

Le Programme d’investissement forestier (PIF) a initié, le vendredi 26 janvier 2018, la première journée de la zone sylvo-pastorale de TapoaBoopo à l’Est du Burkina. Alors que la cérémonie était en cours, une partie de la population a manifesté son mécontentement contre sa tenue. Ladite fronde a dû mettre fin à l’organisation de la journée. Les autorités régionales présentes à la cérémonie ont été obligées de se retirer sous escorte sécuritaire. « Après la rencontre, je me suis levé pour calmer la foule qui manifestait. Entre temps, j’ai entendu les manifestants qui scandaient : tuez-le ! Tuez-le », a relaté Koulabiga Tani, le président du comité de gestion de la forêt TapoaBoopo. Et de poursuivre : « c’est en cela que j’ai regagné mon domicile. Du domicile, je suis revenu en ville et c’est de la ville qu’ils m’ont poursuivi, certains avec des gourdins, des couteaux … Dans ma poursuite, nous sommes rentrés en lutte et ils m’ont bastonné ». C’est finalement « une bonne volonté » qui l’a sauvé en l’amenant en ville, foi de M. Tani.


« Je ne sais pas pourquoi j’ai été frappé, car je n’ai rien à me reprocher. C’est parce que je suis le président du comité d’organisation seulement », a-t-il confié. Koulabiga Tani dit reconnaitre certains de ceux qui l’ont frappé, la plupart étant des agriculteurs qui exploitent la forêt. « Sinon plusieurs rencontres ont été tenues par rapport à cette forêt mais aucun n’a jamais manifesté son désaccord par rapport à sa vocation. Pour lui, la forêt créée en 2000 appartient à l’Etat et sa personne a été choisie par trois communes pour diriger ce comité qui est chargé de la coordination. « Je n’ai rien fait et j’ai été bastonné. Je pense que je vais porter plainte contre mes agresseurs qui sont même allés chez moi saccager tout et fouiller toute ma maison. Comme je ne suis pas à la maison, je ne sais pas ce qu’ils ont emporté », a-t-il déploré. Il a d’ailleurs précisé que ceux qui l’ont frappé sont issus d’un seul quartier de Matiacoali et non de toute la commune. M. Tani demande aux autorités d’user de leur pouvoir pour la résolution du problème avant de conclure que selon certaines sources, ces mêmes manifestants se sont rendus à la mairie de Matiacoali et ont saccagé des panneaux et bornes qui étaient confectionnés pour l’indication et la délimitation de la zone sylvo-pastorale de TapoaBoopo.


En rappel, la zone sylvo-pastorale de TapoaBoopo a été identifiée dans les années 80 sous l’inspiration consensuelle des populations, des services déconcentrés de proximité de l’époque et de l’administration. Ce fut un long processus dont la cheville ouvrière était le Réseau de communication sur le pastoralisme (RECOPA) qui a organisé des fora dans tous les villages avec l’appui de l’administration et des services techniques. Des rencontres villageoises auraient permis d’avoir le consentement des populations et abouti à la délimitation de la zone. Le dossier fut ensuite transmis à la commission provinciale d’aménagement du territoire (CPAT) pour adoption. Le processus a connu son terme en 2003 par la création officielle de la zone par un arrêté conjoint (n° 2003/59/MRA/MAHRH/MEECV/MFBMATD/MED/MITH/MCE/SECU) qui définit les différentes parties de l’espace comprenant une sous-zone d’habitation et une sous-zone de pâture, mais aussi les modalités de gestion de l’espace contenues dans les termes de référence de la première journée de la zone sylvo-pastorale de TapoaBoopo.

Il est ressorti que l’arrêté conjoint a été accompagné d’un cahier des charges spécifiques signé le 12 juin 2003 et un plan de gestion de l’espace à vocation pastorale fut élaboré en Aout 2003 avec l’appui financier du PNGT2. En 2006, des plans de gestion des terroirs ont été élaborés dans 04 villages environnants par le PROGEREF. Une délibération du conseil municipal (délibération n°2008-04/MATD/REST/PGRM/CMT du 20 février 2008) porte sur la zone à vocation sylvo-pastorale qui a bénéficié d’un plan d’aménagement et de gestion de la zone pastorale en 2010 conduit sous l’égide du PROGEREF. Ainsi, elle avait une superficie officielle de 95 000 ha mais des négociations ont été menées et ont abouti à l’agrandissement de la zone à 105 000 ha.

Soumaila SANA

Lefaso.net

Source: LeFaso.net