Après le passage des bâtons et gourdins au Temple du savoir la veille, l’Association nationale des étudiants du Burkina (ANEB) section de Ouagadougou a rencontré les journalistes, ce jeudi 7 décembre 2017, à son quartier général. Objectif : situer l’opinion nationale sur ce qui se passe dans les universités publiques et rappeler qu’aucun appel à la violence venant de sa part n’a été lancé contre les étudiants.
A 24h de la fin de la grève de 72 heures de l’Association nationale des étudiants du Burkina (ANEB) qui a connu des affrontements sanglants entre étudiants, le mercredi 6 décembre 2017, un calme apparent règne à l’Université Ouaga 1 Pr Joseph-Zerbo. Quelques étudiants, notamment ceux de la 2e année d’Histoire et Archéologie et de la Licence 3 Anglais ont repris les cours, ce jeudi matin. Plusieurs amphithéâtres étaient vides.
- Une vue de quelques étudiants présents à la conférence de presse
Est-ce par peur de représailles ou par solidarité avec le principal syndicat des étudiants en grève pour exiger la levée de la sanction jugée « inique et injuste » infligée à l’étudiant Bahan Yénilo ? Bien malin celui qui saura y répondre. Pour le président de l’ANEB-Ouaga, Alexis Zabré, l’association n’est pas esseulée et la majorité des étudiants est de son côté. Au cours d’une conférence de presse, lui et ses camarades sont revenus sur l’origine de la grève. Ils ont également dénoncé ce qu’ils qualifient d’« escalade répressive » organisée par les autorités universitaires contre leur mouvement.
Les péripéties de l’affaire selon l’ANEB
- Alexis Zabré, président de l’ANEB-Ouaga
Selon les conférenciers, tout est parti d’une altercation entre Bahan Yénilo et son délégué de classe Zango Karim au sujet d’une décision de l’administration de programmer la rentrée des nouveaux bacheliers d’Anglais Bac 2016. « Suite à ladite altercation, le comité exécutif de l’ANEB, dans un souci de prévenir la dégradation du climat social sur le campus, a entamé un dialogue avec les autorités universitaires qui a duré 9 mois, ont rappelé les conférenciers ».
Quelles sont les péripéties de ce dialogue ? Selon Alexis Zabré, une première audience a été tenue en avril 2017 au cours de laquelle le président Rabiou Cissé s’est engagé à régler le différend à l’amiable entre les deux étudiants. Mais les choses ont été tout autres selon les conférenciers qui ont déploré la convocation d’un conseil de discipline pour sanctionner Bahan Yénilo.
- Les militants pro-ANEB, bâtons en mains, mais selon l’association, la violence a été voulue par l’administration
« Une deuxième audience s’est donc tenue en juillet 2017 pour souligner des irrégularités dans la procédure du conseil de discipline et rappeler au Pr Rabiou Cissé de respecter son engagement de conciliation des étudiants à l’amiable. Suite à cette audience le Pr Rabiou Cissé a annulé le conseil de discipline tenu en juillet pour vice de procédure notamment l’absence du président, du secrétaire général », explique le président de l’ANEB-Ouaga dans sa déclaration liminaire. Et de poursuivre : « A notre grande surprise le conseil de discipline a été repris avec les mêmes irrégularités et pire, contrairement aux allégations du ministre Alkassoum, la sanction a été aggravée ».
Contre un « acharnement subjectif »
- L’ANEB en veut au vice-président chargé des enseignements et des innovations pédagogiques
Mordicus, l’ANEB affirme avoir tenu et une troisième audience a eu lieu en novembre 2017 pour « dénoncer les irrégularités, le refus du président de respecter sa parole donnée, le caractère inique, disproportionné et injuste de la sanction ». « Mais à cette audience, a déploré M. Zabré, le président de l’UO et son staff dont M. Sawadogo nous ont opposé un refus catégorique de respecter les textes ». C’est donc suite à ce qu’elle a qualifié d’ « acharnement subjectif », que l’ANEB est partie en grève de 48 heures puis de 24 heures avant d’observer un sit-in. Face au mutisme des autorités, les étudiants sont alors passés à la vitesse supérieure en décrétant un mot d’ordre de grève de 72h qui s’est soldé par des affrontements entre étudiants pro-ANEB et anti-ANEB faisant des blessés de part et d’autre.
Une dent contre le Vice-président
Les images d’étudiants, bâtons et gourdins en mains, ont fait le tour des réseaux sociaux et des médias. De quoi susciter le courroux de bon nombre de Burkinabè contre l’ANEB. Mais pour les premiers responsables de l’association, les autorités universitaires ont travaillé à semer les germes de la division entre les étudiants. A les en croire, des étudiants manipulés ont fait le tour des amphis pour appeler d’autres étudiants « à se révolter, à frapper les éléments de l’ANEB et à boycotter la grève ».
- L’ANEB souhaite un prompt rétablissement aux blessés
L’ANEB en veut au vice-président chargé des enseignements et des innovations pédagogiques, Pr. Mamadou Sawadogo, qu’elle estime « zélé ». Pour l’ANEB, la violence « a été voulue, organisée et entretenue par l’administration avec à sa tête M. Sawadogo ». Les conférenciers en veulent pour preuve, les propos tenus par l’homme dans un quotidien de la place ici rapportés : « Honnêtement, nous avons demandé que des mesures soient prises pour permettre à ceux qui veulent suivre les cours de pouvoir le faire. Mais, malheureusement ces mesures n’étaient pas à la hauteur comme nous le voulions ».
« Nul n’a le monopole de la violence »
« La lutte ira crescendo », parole d’Alexis Zabré qui a annoncé la tenue d’une assemblée générale le samedi 09 décembre pour faire le point de la grève et dégager les perspectives. En attendant, l’ANEB a souhaité prompt rétablissement à tous les blessés et appelé les « étudiants honnêtes » à se démarquer des appels à la violence contre elle. Aux autorités universitaires et au ministre de l’enseignement supérieur, Pr. Alkassoum Maïga, le principal syndicat d’étudiants rappelle que « Nul n’a le monopole de la violence ».
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Herman Frédéric Bassolé
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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