Mise en place en avril 2017, la Commission d’enquête parlementaire sur le système d’enseignement au Burkina Faso a livré les conclusions de ses travaux, le 24 novembre, au cours d’une séance plénière. La photographie présentée par les dix commissaires de l’école burkinabè est peu reluisante. C’est pourquoi, ils ont proposé 77 recommandations pour corriger cette situation plus que préoccupante.
La Commission d’enquête parlementaire présidée par le député Luc Yé (ancien secrétaire général du ministère des Enseignements secondaire et supérieur) avait pour mission de diagnostiquer les maux qui entravent la performance du système éducatif burkinabè, du préscolaire au supérieur y compris le non formel, et de proposer des mesures correctives. Pour y arriver, elle a sillonné neuf régions du pays et a collecté une masse importante d’informations, le tout compilé dans un document d’environ 900 pages. Pour faciliter la lecture, un rapport de synthèse de 106 pages a été produit, mis à la disposition de l’ensemble des députés et publié sur le site web du parlement (www.assembleenationale.bf).
Le préscolaire, une affaire du privé ?
Selon le rapport de la commission, le taux actuel d’inscription au préscolaire est de 2,9%, avec 55 003 pour l’année scolaire 2015/2016, contre 73 081 en 2014/2015, soit une régression de 24,73%. Au niveau continental, il est de 18% et 33,5% dans l’espace CEDEAO. Sur le plan des infrastructures, le privé totalise 374 centres d’éveil et d’éducation préscolaires contre 99 pour le public. C’est dire que l’éducation préscolaire reste embryonnaire dans notre pays et est essentiellement l’œuvre du privé. Les frais de scolarité varient entre 15 000 et 50 000 FCFA au public tandis qu’au privé, il est compris entre 30 000 et 500 000 FCFA.
Au niveau du primaire, l’effectif des élèves en 2015/2016 était 2 873 049. Au cours de la même année, le Burkina comptait 11 292 écoles publiques et 3 363 écoles privées. Selon l’annuaire statistique 2015/2016 du MENA, le nombre de salles de classes fonctionnelles au cours de l’année scolaire 2015/2016 était de 59 938 soit une moyenne de quatre classes par école et de 48 élèves par classe. « Le ratio élèves/classe cache des disparités car il atteint 58 élèves/classe dans les Hauts-Bassins. Dans les centres urbains et même dans des chefs-lieux de commune, les effectifs atteignent 100 à 120 élèves par classe », précise le rapport de la commission.
800 enseignants suppléants à Ouaga et Bobo
Le nombre d’enseignants du primaire est estimé à 69 148. Un nombre suffisant mais avec une mauvaise répartition. « De toute évidence, il faut relever les mauvaises répartitions régionale et provinciale de ce personnel qui reste, pour l’essentiel, concentré dans les grands centres urbains, en surnombre aussi bien dans les écoles que les administrations du système éducatif et autres. Si des régions comme l’Est et le Sahel éprouvent chaque année un déficit, on enregistre plus de 500 suppléants à Ouagadougou et plus de 300 à Bobo-Dioulasso », lit-on dans le rapport.
Bâtiments vétustes, laboratoires en ruine
- Le président de la commission répondant aux questions des députés
Au niveau du post primaire et du secondaire, au cours de la période sus-indiquée, on dénombrait 1 725 711 élèves dont 29 088 élèves l’Enseignement et la Formation techniques et professionnels. Cet effectif est réparti dans 3 228 établissements, soit 1 806 établissements publics et 1 422 établissements privés. Des bâtiments vétustes, des salles de classes fortement dégradées, des laboratoires mal construits, non équipés ou complètement en ruine, ont constaté les commissaires parlementaires.
Quant au personnel enseignant, en 2015/2016, le nombre d’enseignants qui assuraient les cours dans les établissements d’enseignement post-primaire et secondaire était de 38 475 dont 18 434 du public et 20 041 du privé.
Les investissements n’ont pas suivi le rythme des effectifs
Au niveau du supérieur, en 2015/2016, l’effectif des étudiants se situait à 94 728. Les mesures n’ayant pas suivi les effectifs, les goulots d’étranglement sont légion, notamment l’insuffisance d’infrastructures académiques et sociales (laboratoires, amphithéâtres, restaurants…). « En vérité, ce sont les investissements (aussi bien dans les infrastructures et équipements que dans les ressources humaines) dans le domaine de l’enseignement supérieur qui n’ont pas suivi le rythme d’accroissement des effectifs d’étudiants, qui, pourtant, était parfaitement prévisible », a confié le rapporteur de la commission.
Aussi, le basculement dans le système LMD (Licence-Master-Doctorat) s’est fait sans réunir les conditions préalables, ce qui n’aura fait qu’exacerber les problèmes déjà existants. En rappel, il existe 528 filières de formation dans les universités burkinabè et autres instituts supérieurs.
Au regard des difficultés énumérées auxquelles fait face le système d’enseignement de notre pays, les membres de la commission d’enquête ont fait 77 recommandations. Au nombre de celles-ci, il y a l’accroissement du budget alloué à l’éducation et la commission propose 35% du budget pendant cinq ans. Elle recommande également l’adoption d’une charte nationale sur l’éducation en vue d’en faire, au-delà des professions de foi, une priorité nationale.
Car, « l’insertion réussie du Burkina Faso dans le concert des nations et l’épanouissement harmonieux de ses citoyens passent par un système éducatif intégré, adapté et performant qui a son prix ».
Voir la Synthèse du rapport ici : http://www.assembleenationale.bf/IM…
Moussa Diallo
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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